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Covid-19 : le travail à l’heure de la pandémie

Interview du Dr Marie-Cécile Bayeux-Dunglas, conseiller médical à l’INRS

Depuis le 17 mars, les déplacements ont été réduits au strict minimum sur le territoire. Le télétravail est la règle pour tous les postes qui le permettent. Cependant, pour les activités jugées indispensables et lorsque le télétravail n’est pas possible, il est nécessaire de s’organiser en assurant la protection des salariés. Entretien avec le Dr Marie-Cécile Bayeux-Dunglas, expert médical en prévention du risque biologique et conseiller médical en santé au travail à l’INRS.

Marie-Cécile Bayeux

L’INRS doit être très sollicité sur les questions liées à la santé et la sécurité au travail en période de pandémie. Comment êtes-vous organisés ?

Nous recevons toujours, au niveau de l'INRS, de très nombreuses questions d'assistance des entreprises. L'INRS continue d'assurer son rôle auprès de ces entreprises et de leur répondre. Pour ce qui est des questions relatives au coronavirus, celles que nous recevons le plus fréquemment alimentent une FAQ actualisée très régulièrement sur le site de l’institut.

Quels sont les modes de transmission du Covid-19 ?

On considère que des contacts étroits avec une personne infectée sont nécessaires pour transmettre la maladie : contact direct à moins d’un mètre lors d’une toux, d’un éternuement ou une discussion en l’absence de mesures de protection. Un autre mode de transmission du virus est le contact de mains non lavées avec le visage. C’est pourquoi les mesures de distanciation sociale et les gestes barrières sont indispensables pour se protéger de la maladie.

Au travail comme ailleurs, il existe des gestes simples ou gestes barrière qui permettent de limiter les risques de contamination. Quels sont-ils ?

Compte tenu des modes de transmission du coronavirus, il est effectivement indispensable d’appliquer des gestes barrière, à savoir se laver les mains très régulièrement à l’eau et au savon ou avec une solution hydroalcoolique, tousser ou éternuer dans son coude ou dans un mouchoir, saluer sans se serrer la main, éviter les embrassades, utiliser des mouchoirs à usage unique et les jeter et, enfin, limiter les déplacements et les contacts au strict nécessaire en préservant une distance de plus d’un mètre entre les personnes.

Toutes ces consignes seront affichées dans l’entreprise. L’employeur doit veiller à l’approvisionnement des installations sanitaires en savon et en papier à usage unique de préférence. Lorsque l’accès aux installations sanitaires n’est pas possible (coursiers, personnel en déplacement ponctuel…), il mettra à la disposition des salariés des solutions hydroalcooliques. Il mettra en place toutes les mesures permettant de respecter les mesures de distanciation nécessaires (plus d’un mètre) et s’assurera du nettoyage régulier des locaux et des surfaces.

Quels sont les symptômes de la maladie ?

Ils sont variés et peuvent évoquer n’importe quelle infection respiratoire virale. Les principaux symptômes sont la fièvre ou la sensation de fièvre et la toux qui est cependant inconstante. Peuvent y être associés maux de tête, courbatures, frissons, fatigue… La perte brutale de l’odorat, sans obstruction nasale et disparition totale du goût, sont également des symptômes qui ont été observés chez les malades. Les symptômes peuvent s’aggraver avec des difficultés à respirer.

Que doit faire un salarié s’il ressent certains de ces symptômes ?

Devant l’apparition de symptômes évocateurs de la maladie Covid-19 (fatigue, fièvre, douleurs musculaires, toux…), il convient de rester chez soi en prévenant son employeur, d’éviter les contacts, d’appeler un médecin (son médecin traitant, un médecin en téléconsultation, le médecin du travail de sa structure…). En cas de difficultés à respirer ou de malaise, il convient d’appeler le Samu Centre 15. En cas de doute sur la conduite à tenir, le ministère de la Santé a mis en place un logiciel pour orienter sur la marche à suivre (maladiecoronavirus.fr)

Les salariés seront informés de cette procédure.

 

Que faire si un salarié présente des symptômes évocateurs de la maladie Covid-19 sur le lieu de travail ?

En cas de symptômes évocateurs survenant sur le lieu de travail, l’organisation de la prise en charge doit être mise en œuvre selon les consignes établies au préalable par la cellule de crise en concertation avec le médecin du travail. La procédure doit être affichée et connue de tous. Par exemple : isoler le salarié (dans les locaux du service de santé au travail s’il est sur place, ou sinon dans une pièce définie au préalable), éviter les contacts avec les collègues (garder une distance de plus d’un mètre), appliquer les gestes barrières, prévenir le supérieur hiérarchique et organiser le retour à domicile. Le salarié contacte son médecin traitant. Appeler le 15 seulement en cas d’urgence.

Quelles sont les règles organisationnelles à respecter pour les personnes qui travaillent sur site?

Il faut tout d’abord rappeler que le télétravail est actuellement la règle pour tous les postes qui le permettent.

Dans des établissements indispensables à la vie de la nation, qui sont les seuls autorisés à recevoir du public et pour les entreprises au sein desquelles le télétravail n’est pas possible, ou seulement pour une partie des effectifs, tout doit être mis en œuvre pour limiter les contacts physiques rapprochés ou prolongés entre les personnes présentes sur le site, ou avec les intervenants extérieurs (nettoyage, service de sécurité…). Dans tous les cas, distanciation et mesures barrières doivent être la règle.

Il convient tout d’abord de limiter le nombre de personnes présentes simultanément sur le lieu de travail ou dans un même local, d’éviter les réunions, de privilégier les bureaux individuels en répartissant les salariés présents, de favoriser la communication par courrier électronique, téléphone, audioconférence ou visioconférence. L’accès pour les visiteurs (livreurs…) doit être limité et – s’il est indispensable – il faut restreindre le nombre de personnes présentes en même temps. En ce qui concerne la restauration collective, lorsque celle-ci doit être maintenue, elle doit être organisée de façon à limiter les contacts entre les personnes (élargissement des plages horaires, espacement des tables…). L’accès aux espaces de convivialité et autres lieux de pauses collectives est également à limiter.

Le port du masque et de gants est-il nécessaire pour tous les travailleurs ?

Le port d'un masque chirurgical ou d'un masque FFP2 est aujourd'hui réservé à certaines catégories de professionnels particulièrement exposés (professionnels de santé, salariés des structures médico-sociales accueillant des personnes fragiles,
transport sanitaire, services d'aide à domicile...).
Dans les autres secteurs, l'employeur détermine les mesures de protection collective et organisationnelles à mettre en oeuvre pour assurer la santé et la sécurité de ses salariés. Si des risques résiduels persistent, il pourra le cas échéant, compléter ces mesures par la mise à disposition de masques. L'utilisation de nouvelles catégories de masques alternatifs réservés à des usages non sanitaires peut être envisagée, notamment pour les professionnels en contact avec le public.
Dans tous les cas, pour limiter les risques de transmission, le port d'un masque doit s'accompagner de règles d'hygiène strictes (ne pas le toucher, hygiène des mains avant et après le retrait...).
Pour ce qui est des gants, dans la plupart des situations de travail en entreprise, les mesures d'hygiène, et notamment le lavage des mains, sont suffisantes. Si toutefois des gants sont utilisés pour éviter que les mains ne se contaminent au contact de certaines surfaces, il convient d'être particulièrement vigilant. Il est impératif, pour éviter de se contaminer, de ne pas porter les mains gantées au visage, d'ôter les gants en faisant attention de ne pas toucher sa peau avec la partie extérieure, de jeter les gants après chaque utilisation et de se laver les mains ou de réaliser une friction hydroalcoolique après avoir enlevé ses gants.

Un nettoyage spécifique de l'espace de travail est-il nécessaire ?

Le coronavirus SARS-CoV-2 est sensible aux tensioactifs présents dans les produits de nettoyage et aux désinfectants habituels tels que l'alcool à 70° ou l'eau de javel à 0,1 % de chlore actif. Il peut persister quelques heures sur les surfaces sèches et quelques jours sur des surfaces humides.
Même si le principal mode de transmission de la maladie Covid-19 se fait par l'intermédiaire des gouttelettes émises lors de la toux, d'un éternuement ou d'une discussion à moins d'un mètre d'un sujet infecté, la transmission par des mains sales, souillées au contact de ces surfaces et portées au visage doit être prise en compte.
Il est donc préconisé de procéder à un nettoyage plus fréquent que le nettoyage habituel des locaux pour toutes les surfaces en contact avec les mains (rampes d'escalier, poignées de portes, boutons d'ascenseurs...). Dans les bureaux partagés, des lingettes ménagères ou des produits compatibles avec les surfaces nettoyées peuvent être mis à disposition des utilisateurs pour le nettoyage des claviers, souris, téléphones, terminal... Il est également indispensable d'assurer un ramassage régulier des poubelles.

Des dispositions particulières doivent-elles être prises pour le personnel des commerces en contact avec le public ?

Dans tous les établissements recevant du public et autorisés à être ouverts (commerces alimentaires, stations-service, banques, bureaux de tabac et de distribution de presse…), il est indispensable d’appliquer certaines règles :

  • limiter le nombre de clients simultanément présents dans le magasin ;
  • respecter une distance de sécurité entre les travailleurs et les clients et faire respecter cette distance entre les clients (affiche, marquage au sol…) dans l’établissement et à la caisse ;
  • nettoyer régulièrement avec une lingette ménagère les surfaces : comptoir, ordinateurs, terminal de paiement électronique… ;
  • éviter tout contact physique avec les clients ;
  • fournir des moyens d’hygiène pour se laver très régulièrement les mains avec de l’eau et du savon ou avec une solution hydroalcoolique, et éviter de se toucher le visage ;
  • privilégier l’utilisation des caisses automatiques lorsqu’elles existent ;
  • privilégier les moyens de paiement automatiques (CB sans contact, monnayeur de caisse…) ;
  • retirer les documents à disposition, à feuilleter ou à lire.

Certains dispositifs, tels que des écrans en plexiglass, peuvent permettre également de limiter le risque de projection de gouttelettes. Ils doivent être nettoyés fréquemment, en respectant les mêmes procédures de nettoyage que les autres surfaces.

Comment accueillir des livreurs dans mon entreprise en limitant le risque pour mes salariés ?

Tout d’abord, vous devez organiser leur venue, en amont, de façon à ce qu’ils ne soient pas tous présents en même temps sur votre site. Ensuite, il faut mettre une signalétique les incitant à se laver les mains (avec savon et papier à usage unique ou solution hydroalcoolique) avant de leur donner accès à votre entreprise, au local de la machine à café/ou de pause. L’organisation intégrera le respect de la distanciation qui est indispensable, par exemple on peut procéder en déposant si c’est possible la marchandise sur une surface permettant de la récupérer plutôt que de donner le produit de la main à la main.

De nombreuses personnes sont aujourd'hui en télétravail. Y a-t-il des conseils à prodiguer pour éviter l'isolement, limiter les risques psychosociaux ?

Il est important pour la santé et la sécurité des salariés en télétravail qu’ils soient informés des mesures à adopter pour maîtriser les risques auxquels ils sont exposés, notamment du fait de leur environnement de travail à domicile. Aussi il convient de recommander aux salariés de définir, dans la mesure du possible, un espace de travail dédié (au mieux dans une pièce isolée) pour ne pas être dérangé et d’aménager leur poste de travail de manière à être bien installés (chaise confortable, hauteur de la table…). Il est également important de recommander aux salariés de se fixer des horaires, le plus simple étant de garder le même rythme que celui pratiqué dans l’entreprise ; de s’octroyer des pauses régulières (cinq minutes toutes les heures) ; d’anticiper et planifier leur charge de travail sur la semaine pour organiser les travaux à faire selon les priorités. Les bonnes pratiques de déconnexion sont nécessaires pour préserver les temps de repos et concilier au mieux la vie personnelle et la vie professionnelle, notamment dans le contexte de fonctionnement très dégradé de certaines entreprises confrontées à l’absence de certains salariés, au changement des équipes, au bouleversement des horaires de travail, à la désorganisation des activités, etc. Des points réguliers avec le manager sont par ailleurs nécessaires pour aider à la gestion des priorités du travail. Son statut (libre, occupé, absent, en pause…) peut être renseigné par les outils informatiques. Plus généralement, l’utilisation de tous les outils de communication à distance (mails, tchats, documents partagés, visioconférence, outils de travail collaboratif, agenda partagé) est recommandée. Une mise à disposition, par l'employeur, d'un support pour l'aide à l'utilisation de ces outils est indispensable. Enfin, même en télétravail, le contact avec les collègues reste essentiel : organisez des réunions téléphoniques ou en visioconférence, des points réguliers…

Le rappel de ces bonnes pratiques est d’autant plus important qu’elles sont totalement nouvelles pour certains télétravailleurs qui n’ont jamais eu l’occasion de télétravailler avant l’épisode de pandémie et peuvent ainsi se sentir démunis face à cette nouvelle organisation du travail dans un contexte général anxiogène.

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Mis à jour le 01/04/2020
FOCUS JURIDIQUE
  • COVID19 : obligations des employeurs et des salariés en période de pandémie

    Ce focus juridique sous forme de FAQ répond aux questions que peuvent se poser les employeurs et les travailleurs.

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