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Le dossier médical en santé au travail : quelles évolutions ?

Focus juridiques Le dossier médical en santé au travail (DMST) constitue un outil de prévention et de traçabilité des expositions professionnelles, permettant d’apprécier le lien entre l’état de santé du travailleur et le poste de travail qu’il occupe. Un nouveau décret précise les règles d’élaboration, d’accessibilité et de conservation de ce dossier.

Quelles sont les modalités de constitution du dossier médical en santé au travail (DMST) ?

Comme auparavant, le DMST doit être constitué pour chaque travailleur bénéficiant d’un suivi individuel de son état de santé par un service de prévention et de santé au travail (SPST). Désormais il doit être créé obligatoirement sous format numérique sécurisé. Cela permet notamment de faciliter le partage d’informations issues du dossier entre les différents professionnels.
Le DMST peut être constitué par le médecin du travail ou par un professionnel de santé de l’équipe pluridisciplinaire de santé au travail : le collaborateur médecin, l’interne en médecine du travail et l’infirmier en santé au travail, sous l’autorité du médecin du travail, lors de la visite d’information et de prévention ou lors de l’examen médical d’aptitude à l’embauche. Ces professionnels peuvent désormais constituer le DMST de tout salarié, y compris s’il bénéficie d’un suivi individuel renforcé (Sir).

À noter : ces nouvelles modalités sont applicables à compter du 31 mars 2023 pour les nouveaux dossiers créés à compter du 16 novembre 2022 ainsi que pour les dossiers des travailleurs toujours suivis par un SPST..

Quels éléments doivent obligatoirement figurer dans le DMST ?

Le DMST retrace, dans le respect du secret médical, les informations relatives à l’état de santé du travailleur, aux expositions auxquelles il a été soumis, ainsi que les avis et propositions du médecin du travail.
Avant la loi du 2 août 2021 pour renforcer la prévention en santé au travail et ses décrets d’application, les indications relatives au contenu du DMST étaient issues des recommandations de bonnes pratiques de la Haute Autorité de santé (Has).
 

Le décret du 15 novembre 2022 ajoute un nouvel article dans le Code du travail (article R. 4624-45-4) qui liste désormais les éléments qui doivent figurer dans le DMST :

  • les données d’identité du travailleur (données médico-administratives, contact de son médecin traitant) ;
  • les informations permettant de connaître les risques actuels ou passés auxquels le travailleur est ou a été exposé (caractéristiques du ou des postes de travail, secteur d’activité dans lequel il exerce, données d’exposition à un ou plusieurs facteurs de « pénibilité », mesures de prévention mises en place) ;
  • les informations relatives à l’état de santé du travailleur recueillies lors des visites et examens nécessaires au suivi individuel de son état de santé ;
  • les correspondances échangées entre professionnels de santé aux fins de la coordination et de la continuité de la prise en charge du travailleur ;
  • les informations formalisées concernant les attestations, avis et propositions d’aménagement, d’adaptation ou de transformation du poste de travail ou les mesures d’aménagement du temps de travail, les informations délivrées au travailleur sur les expositions professionnelles, les risques identifiés, les moyens de protection, l’existence ou l’absence d’une pathologie en lien possible avec une exposition professionnelle, ainsi que les avis médicaux ;
  • la mention de l’information du travailleur sur ses droits en matière d’accès aux données le concernant et sur les conditions d’accès à son DMST ;
  • le cas échéant, le consentement ou l’opposition du travailleur à l’accès à son DMST, notamment par le médecin praticien correspondant, les différents professionnels des SPST ou encore par un autre SPST.


Ce contenu minimum vise à harmoniser les dossiers et à permettre l’échange d’informations entre les différents professionnels autorisés à y avoir accès.

Les données intégrées dans le DMST sont des données à caractère personnel sensibles, qui doivent faire l’objet d’une protection par le SPST.

À noter : Ce contenu devra apparaître à compter du 31 mars 2023 dans les DMST des travailleurs toujours suivis par un SPST ainsi que pour les nouveaux dossiers créés à compter du 16 novembre 2022. Il n’est pas exigé pour les dossiers des travailleurs qui ne sont plus suivis à cette date.

Qui sont les professionnels autorisés à avoir accès au DMST ?

Outre le médecin du travail, ce dossier peut être consulté et alimenté, sous la responsabilité de ce dernier, par les collaborateurs médecins, les internes en médecine du travail, ainsi que par les infirmiers.


Il est également accessible au médecin praticien correspondant, sauf opposition du travailleur.

Le médecin praticien correspondant est un médecin de ville qui dispose d’une formation en médecine du travail. Depuis le 1er janvier 2023, il peut contribuer, en lien avec le médecin du travail, au suivi individuel de l’état de santé du travailleur, à l’exception du Sir.


Désormais, l’intervenant en prévention des risques professionnels (IPRP) et l’assistant de SPST (sur délégation du médecin du travail et sous sa responsabilité) peuvent également alimenter et consulter certaines informations du DMST. Celles-ci concernent en particulier les données d’identité du travailleur ainsi que des informations permettant de connaître les risques actuels ou passés auxquels le travailleur est ou a été exposé.


Toutes les actions réalisées sur le DMST, quel qu’en soit l’auteur, doivent être tracées et conservées (notamment la date, l’heure et l’identification du professionnel concerné).


En outre, il convient de respecter les règles de confidentialité prévues par le Code de la santé publique (vie privée et secret des informations concernant le travailleur) et les règles d’identification électronique et d’interopérabilité définies par des référentiels.


Lorsque le travailleur relève de plusieurs SPST ou cesse de relever d’un de ces services, son DMST est accessible au service compétent, en charge de son suivi. Le travailleur doit être informé et ne doit pas s’opposer à la transmission de son dossier.


Les informations concernant des tiers (toutes les personnes qui n’interviennent pas dans le suivi individuel de l’état de santé) ne sont communicables que dans la mesure où elles sont strictement nécessaires à la continuité du suivi.

Quels sont les droits du travailleur en lien avec son DMST ? 

Le travailleur a accès à son DMST à tout moment, soit directement, soit par l’intermédiaire d’un médecin qu’il désigne. Pour exercer ce droit, il n’a pas besoin de motiver sa demande.

Le travailleur doit être informé, lors de la création de son DMST (et lors des situations prévues en cas de pluralité de SPST) de son droit de s’opposer à l’accès :

  • à son DMST, par le médecin praticien correspondant ou par les professionnels chargés d’assurer, sous l’autorité du médecin du travail, le suivi de son état de santé ;
  • aux DMST détenus par d’autres SPST, par les professionnels chargés du suivi de son état de santé.


Cette information peut être donnée par tout moyen (y compris dématérialisé). La délivrance de l’information ainsi que l’exercice (le cas échéant) de l’un de ces droits sont retracés dans le DMST.

Le droit d’opposition du travailleur ne s’applique toutefois pas à la constitution et à l’alimentation du dossier.

 

Selon le Code du travail (art. R. 4624-45-8), le travailleur peut également exercer ses droits de rectification, d’effacement et de limitation, prévus aux articles 16 à 18 du règlement général sur la protection des données (RGPD) auprès du SPST.

Quelles sont les règles relatives à la conservation du DMST ?

La conservation du DMST vise à assurer la continuité du suivi individuel en santé au travail du travailleur tout au long de sa prise en charge dans le SPST. Elle permet également de garantir la traçabilité des expositions professionnelles, dans le respect du secret médical.

Les informations concernant la santé des travailleurs sont :

  • soit conservées au sein des SPST qui les ont recueillies ;
  • soit déposées par le SPST auprès d’un organisme hébergeur (dans le respect des dispositions du Code de la santé publique).

Dans ces deux situations, le SPST doit veiller à ce que toutes les dispositions soient prises afin d’assurer la confidentialité des informations ainsi conservées ou hébergées.

En principe, le dossier doit être conservé pendant une durée de 40 ans à compter de la date de la dernière visite ou du dernier examen du titulaire au sein du SPST concerné (dans la limite d’une durée de 10 ans à compter de la date du décès de la personne titulaire du dossier).


Certaines exceptions sont toutefois prévues :

  • si la responsabilité médicale du service ou de professionnels de santé est mise en cause (recours gracieux ou contentieux), ces délais peuvent être suspendus ;
  • certains articles du Code du travail prévoient des échéances spécifiques :
    • 50 ans après la fin de la période d’exposition à des agents chimiques dangereux (article R. 4412-55 du Code du travail) ;
    • pendant une période pouvant atteindre 40 ans après la cessation de l’exposition à des agents biologiques (article R. 4426-9 du Code du travail) ;
    • jusqu’au moment où le travailleur exposé à des rayonnements ionisants a ou aurait atteint l’âge de 75 ans et, en tout état de cause, pendant une période d’au moins 50 ans à compter de la fin de l’activité professionnelle impliquant une exposition aux rayonnements ionisants (article R. 4451-83 du Code du travail).

À noter : Ces nouvelles règles de conservation sont applicables à compter du 31 mars 2023 pour tous les dossiers.

Quels sont les liens entre le DMST et le dossier médical partagé (DMP) ?

Le DMP, instauré par la loi du 13 août 2004 relative à l’assurance maladie, constitue un carnet de santé numérique qui conserve et sécurise les informations de santé d’une personne bénéficiaire du régime de la Sécurité sociale. Il peut contenir des renseignements ou des documents produits lors d’une prise en charge des soins, de diagnostic ou de prévention.


Depuis le 31 mars 2022, le médecin du travail chargé du suivi individuel de l’état de santé d’une personne peut accéder à son DMP et l’alimenter, sous réserve de son consentement et de son information préalable quant aux possibilités de restreindre l’accès au contenu de son dossier. Le travailleur peut donc refuser cet accès au médecin du travail. Ce refus ne peut être porté à la connaissance de l’employeur et ne constitue ni une faute ni un motif justifiant l’émission d’un avis d’inaptitude.

À compter du 1er janvier 2024, certains éléments du DMST pourront alimenter le DMP.

La Haute Autorité de Santé (HAS) a publié une recommandation de bonnes pratiques concernant les catégories d’informations susceptibles d’être intégrées dans le volet santé au travail du DMP.

 

 

Références juridiques

Décret n° 2022-1434 du 15 novembre 2022 relatif au dossier médical en santé au travail

  • Article L. 4624-8 du Code du travail
  • Articles R. 4624-45-3 à R. 4624-45-9 du Code du travail
Voir aussi
Mis à jour le 14/04/2023