Accès rapides :

Vous êtes ici :

  1. Accueil
  2. Publications et outils
  3. Bases de données
  4. Fiches toxicologiques
  5. Bromure d'éthidium (FT 236) (rubrique sélectionnée)

Bromure d'éthidium

Fiche toxicologique n° 236

Sommaire de la fiche

Édition : Février 2025

Pathologie - Toxicologie

  • Toxicocinétique - Métabolisme

    Aucune donnée n’existe sur l’absorption du bromure d’éthidium. Après injection intraveineuse (IV), il est principalement distribué vers les reins, les surrénales, la thyroïde et le cœur chez le rat et vers le système nerveux central chez la souris. Une accumulation dans le foie et les reins est observée après injection intramusculaire chez le lapin et le veau. Il est majoritairement éliminé dans les fèces par la bile et à un moindre degré via les urines chez le lapin, le veau et la souris.

    Absorption, distribution, métabolisme et excrétion

    Le bromure d'éthidium est un agent intercalant de l’ADN qui supprime ou inhibe la synthèse d’ARN et de protéines dans de nombreuses cellules.

    L'absorption du bromure d'éthidium n'a été mesurée ni chez l'animal ni chez l'Homme. Sa distribution dans l'orga­nisme et sa transformation métabolique sont rapportées après injection intraveineuse, intrapéritonéale ou intra­musculaire, chez la souris, le rat, le lapin ou le veau.

    La concentration sanguine maximale de 14C]-bromure d'éthidium est atteinte, chez le lapin et le veau, 1 heure après une injection intramusculaire (1 mg/kg), puis elle diminue rapidement en 24 heures chez le veau et 96 heu­res chez le lapin. L'excrétion urinaire représente 33 % de la dose chez le lapin après 4 jours et 20 % chez le veau après 2 jours ; la majeure partie de la dose injectée est éliminée dans les fèces par la bile (60 % chez le lapin, 50 % chez le veau). Il n'y a pas de réabsorption intestinale, l'excrétion de molécules marquées mesurée à la sortie de la bile et l'excrétion fécale sont identiques. Après 9-10 jours, il reste 2 à 4 % de la dose injectée dans l'animal, avec une accu­mulation dans le foie et les reins [8].

    Injecté par voie intraveineuse chez le rat (15 mg/kg), le bromure d'éthidium radiomarqué s'accumule, après 4 heures, dans les reins, les surrénales, la thyroïde et le cœur [8]. Chez la souris, des signes de passage du bromure d'éthidium des vaisseaux sanguins vers le système ner­veux sont notés dès 3 minutes après l'injection (0,1 mL d'une solution à 0,1 %) ; dans cette étude, il n'est pas retrouvé dans les régions protégées par la barrière méningée. L'étendue et l'intensité du marquage dans le système ner­veux augmentent pendant 30 minutes, puis diminuent ; le bromure d'éthidium n'est plus détecté après 24-­48 heures [9]. L'excrétion biliaire est de 14-15 % de la dose après 7 heures chez le rat [8] et 50-55 % de la dose après 16-18 heures chez la souris.

    In vitro, le bromure d'éthidium est acétylé, par le cyto­chrome P448 hépatique de rat et une protéine soluble, en un ou plusieurs métabolites mutagènes pour S. typhimurium [8].

    In vivo, les métabolites majeurs sont le 8-acétyléthidium, l'éthidium inchangé et le 8-acétyl-2-hydroxyéthidium glu­curonide (Fig. 1). Ce dernier n'est présent dans la bile qu'en cas d'induction du système métabolique hépatique [10].

    Schéma métabolique

     

    Fig. 1 : Transformation métabolique du bromure d'éthidium chez le rat [11]

  • Toxicité expérimentale
    Toxicité aiguë

    Il n'y a pas de donnée publiée concernant la toxicité du bromure d'éthidium administré par les voies courantes d'exposition. L’injection intraveineuse peut être mortelle chez la souris ; des atteintes respiratoires sont également observées. Des lésions cérébrales sont décrites après injection intra-crânienne chez le rat. Il ne traverse pas la barrière méningée chez la souris.

    La DL50 par voie sous-cutanée chez la souris est de 110 mg/kg [8].

    Les souris survivent à une injection intraveineuse de 0,1 mL d'une solution à 0,1 % ; 30 % des animaux recevant 0,1 mL d'une solution à 0,5 % meurent en 4 minutes, les survivants présentent des signes de détresse respiratoire qui se prolongent 12 à 16 heures après l'injection.

    Après injection intra-crânienne chez le rat (2,5 mg/kg), le bromure d'éthidium induit un état spongieux diffus de la région ventro-latérale du tronc cérébral. Ces lésions sont caractérisées par une dégénérescence des oligodendro­cytes et la formation de vacuoles dans la myéline ; elles sont suivies d'une démyélinisation des axones (après 6 jours) avec, dans ces zones, une disparition complète des oligodendrocytes. La myéline se reforme après 12 jours. Chez la souris, le bromure d'éthidium se concentre dans les noyaux et les nucléoles de certaines cellules nerveuses situées à l'extérieur de la barrière méningée, mais ne la traverse pas [12].

    Toxicité subchronique, chronique

    Aucune donnée n’est disponible chez l’animal à la date de publication de cette fiche toxicologique (2010).

    Effets génotoxiques [8]

    De nombreux tests ont donné des résultats positifs in vitro et in vivo.

    De nombreuses études ont été menées pour évaluer le potentiel mutagène et les effets sur l'ADN du bromure d'éthidium.

    In vitro, la majorité des résultats sont positifs ou faible­ment positifs, généralement en présence de système d'ac­tivation métabolique :

    • il induit des mutations, uniquement en présence d'acti­vateur métabolique, sur S. typhimurium TA1537, TA1538 et TA98 (ni TA100, ni TA1535) ;
    • il donne des résultats positifs dans le test du lymphome de souris et dans le SOS Chromotest, en présence d'activa­teur métabolique, sur S. typhimurium ; ces résultats sont négatifs sur E. coli ;
    • il induit la recombinaison chromosomique sur S. cerevisiae  ;
    • il génère la réparation de l’ADN dans les hépatocytes de rat mais non l'inhibition de la synthèse d’ADN dans les cellules HeLa ;
    • il provoque un étirement des chromosomes dans les lym­phocytes humains en culture et antagonise l'action de la colchicine ;
    • il arrête la division cellulaire dans les fibroblastes d'embryon de poulet ;
    • il provoque la formation de micronoyaux dans les cellules embryonnaires de hamster syrien ;
    • par contre, il n'induit ni mutation cellulaire ni échange entre chromatides-sœurs sur cellules V79 ; la réponse mutagène est faible sur cellules CHO de hamster chinois.

    In vivo, il provoque des mutations létales récessives et la recombinaison mitotique chez la drosophile, la formation de micronoyaux dans les larves de triton et des échanges entre chromatides sœurs dans la moelle osseuse de la souris.

    Effets cancérogènes [8]

    Un effet antitumorigène est rapporté sur les cellules de mélanome de hamster et chez la souris porteuse de lymphome. L’effet cancérogène n’a pas été étudié.

    L'effet cancérogène du bromure d'éthidium n'a pas été testé sur l'animal. On lui attribue un potentiel antitumorigène, par exemple sur les cellules de mélanome de hams­ter ; la survie de l'animal est augmentée par le traitement au bromure d'éthidium. Le mécanisme d'action semble basé sur une forte inhibition de la synthèse d’ADN de ces cellules par inhibition de l’ADN polymérase ARN dépen­dante. Un effet antitumorigène a aussi été montré chez la souris porteuse de lymphome.

    Effets sur la reproduction [8]

    Le bromure d’éthidium est tératogène chez la grenouille.

    Le bromure d'éthidium provoque des malformations sévères dans un essai de tératogenèse sur l'embryon de grenouille (test FETAX). Les malformations atteignent tous les organes majeurs ; on observe, entre autres, courbure de la moelle épinière, anencéphalie, microcéphalie et microphtalmie. La DL50 du bromure d'éthidium dans ce test est de 0,05 mg/mL et la dose efficace qui induit 50 % de malformations (DE50) est de 0,035 mg/mL.

  • Toxicité sur l’Homme

    Aucune donnée n’existe sur les effets toxiques aigus ou chroniques chez l’Homme. Les données disponibles sont insuffisantes pour conclure concernant les effets mutagènes, cancérogènes ou sur la reproduction.

    Il n'y a pas de donnée publiée concernant des effets toxiques, aigus ou chroniques, liés au bromure d'éthidium chez l'Homme. En particulier, aucun trouble neurologique traduisant une démyélinisation n'est rapporté.

    Par analogie à certains autres composés voisins, on peut penser que le produit est moyennement irritant pour la peau et l'œil.

    Du fait de son activité mutagène expérimentale, la possi­bilité d'un effet cancérogène et de troubles de la repro­duction est posée. Un article suggère que le travail en laboratoire de biologie moléculaire peut être à l'origine d'une augmentation du risque d'apparition de certains cancers (os, lymphomes non hodgkiniens). Les sujets sont généralement polyexposés : bromure d'éthidium mais aussi autres molécules potentiellement cancérogènes (acrylamide, méthylnitrosoguanidine, méthanesulfonate de méthyle) et substances radioactives [13].

    Le suivi d'un certain nombre de grossesses chez des femmes travaillant avec du bromure d'éthidium n'a pas retrouvé de malformations chez les enfants. Dans deux cas, l'analyse chromosomique effectuée sur des cellules prélevées par ponction amniotique n'a pas révélé d'ano­malie. Ces observations sont toutefois en nombre trop restreint pour permettre de conclure à l'innocuité de la substance (données non publiées).

  • Cohérence des réponses biologiques chez l'Homme et l'animal
EN SAVOIR PLUS SUR LES FICHES TOXICOLOGIQUES