Application de méthodes d’analyse de paniers du marché dans l’évaluation de l’exposition aux mélanges d’agents chimiques au sein de deux grands bases de données d’exposition professionnelle.

Des enquêtes menées dans les milieux de travail français suggèrent qu’approximativement 15% des travailleurs sont exposés à au moins trois substances chimiques différentes. Les situations de polyexpositions et leurs effets sur la santé demeurent cependant insuffisamment évalués. Afin de caractérisé les situations de polyexposition professionnelles en France, cette étude a interrogé les mesures individuelles d’exposition dans deux grandes bases de données, soit Colchic et Scola. L’extraction a porté sur 118 substances chimiques ayant au moins 100 mesures quantififiables entre 2010 et 2019, incluant 31 cancérogènes (groupes CIRC 1, 2A et 2B). Les mesures ont été groupées sous forme de situations de travail (ST, combinaison de secteur d’activité, de métier, de tâche et d’année). Les situations de polyexposition ont été évaluées à l’aide de techiniques de minage d’ensembles fréquents. Au total 275 213 mesures ont été extraites, distribuées entre 32 670 ST et englobant 4 692 combinaisons distinctes de substances chimiques. 32 % de l’ensemble des ST étaient associées à 2 substances (médiane 3 agents/ST) et 13 % de l’ensemble des ST était associées à 2 cancérogènes (médiane 2 cancérogènes/ST). Les coexpositions les plus fréquents impliquaient les combinaisons éthylbenzène-xylène (1 550 ST), quartz-cristobalite (1 417 ST) et toluène-xylène (1 305 WS). Les combinaisons fréquentes de cancérogènes incluaient également les couples plomb-chrome hexavalent (368 ST) et benzène-éthylbenzène (314 ST). Les poussières de bois (6% des ST avec une exposition à au moins une autre substance) et l’amiante (8%) avaient les proportions les plus faibles de ST avec coexposition à d’autres substances. Les tâches avec les proportions de coexposition à des cancérogènes les plus élevées incluaient le soudage à l’arc électrique (37 % des ST avec coexposition), la polymérisation et la distillation (34 %) et le forage et l’excavation (34 %). En somme, la polyexposition aux substances chimiques (incluant les substances cancérogènes) était hautement prévalente dans les bases de données et son évaluation devrait faire l’objet d’une attention soutenue dans la démarche de prévention des risques de maladies professionnelles.