Proportion et nombre de cas de troubles musculo-squelettiques du membre supérieur potentiellement évitables : Estimations pour la région française des Pays de la Loire

Contexte et objectif : Les troubles musculo-squelettiques du membre supérieur (TMS-MS) sont l'un des problèmes de santé au travail les plus courants et les plus coûteux. En 2017, les TMS-MS représentaient 87 de toutes les maladies professionnelles en France. L’objectif de cette étude était d’estimer la proportion et le nombre de cas de TMS-MS attribuables aux facteurs de risque personnels et professionnels chez les salariés des Pays de la Loire (PdL).

Méthodes : 3 710 salariés de la région des PdL ont été inclus par tirage au sort dans la cohorte Cosali entre 2002 et 2005 par des médecins du travail de la région. Les participants ont bénéficié d’un examen clinique standardisé selon le consensus européen SALTSA recherchant six types de TMS-MS. Les données sur les caractéristiques personnelles et les conditions de travail ont été recueillies au moyen d'un auto-questionnaire. Entre 2007 et 2010, 1 611 salariés ont été réexaminés par leur médecin du travail. Seuls les salariés indemnes de TMS-MS à l’inclusion ont été inclus dans cette étude (734 hommes et 512 femmes, âgés de 20 à 54 ans). Les fractions de TMS-MS attribuables (FRA) aux facteurs de risque ont été estimées à partir de modèles logistiques multivariés. Le nombre total de cas incidents de TMS-MS au niveau régional a été estimé après redressement par repondération des individus de l'échantillon à partir des données du recensement 2007 des PdL. Le nombre de TMS-MS évitables a été obtenu en multipliant la FRA par le nombre total de cas TMS-MS estimé en 2007.

Résultats : Au cours du suivi, 74 cas (10 % de l’échantillon d’étude) de TMS-MS ont été diagnostiqués chez les hommes et 65 cas (13 %) chez les femmes. Les facteurs de risque associés à l’incidence de TMS-MS étaient : « efforts physiques élevés (échelle RPE de Borg  12), prévalence [Prev]=57 %, nombre de cas [Ncas]=57 » et « faible soutien social de la hiérarchie ou des collègues, Prev=38 %, Ncas=36 » chez les hommes, et « travail avec un ou deux bras écartés du corps régulièrement ou de manière prolongée, Prev=24 %, Ncas=27 » et « surpoids/obésité, Prev=25 %, Ncas=24 » chez les femmes. Chez les hommes, une estimation de 30 000 nouveaux cas de TMS-MS, représentant 50 % de tous les nouveaux cas à l’échelle de la région, étaient attribuables aux « efforts physiques élevés » et 10 000 nouveaux cas (soit 17 %) étaient attribuables au « faible soutien social ». Le nombre de nouveaux cas de TMS-MS attribuables à la combinaison de ces deux facteurs professionnels était de 34 921, représentant 58 % des nouveaux cas de TMS-MS dans les PdL en 2007. Chez les femmes, 14 000 nouveaux cas (soit 20 % de tous les nouveaux cas de TMS-MS) étaient attribuables au « travail avec les bras écartés du corps » et 13 000 nouveaux cas (soit 19 %) étaient attribuables au « surpoids/obésité ».

Discussion & conclusion : Cette étude est basée sur une cohorte prospective avec un échantillon représentatif de la population salariée au moment de l'inclusion. Une autre des forces de cette étude est la définition de cas qui était basée sur un examen clinique standardisé ainsi que les FRA estimées qui sont ajustées. Les limites de cette étude sont liées notamment à l’auto-déclaration de l’exposition, l’estimation de FRA basée sur une hypothèse de relation causale entre exposition et TMS-MS et aussi sensible aux seuils utilisés pour définir les niveaux d'exposition. En conclusion, une part importante des TMS-MS dans la région des PdL pourrait être évitée en réduisant les expositions professionnelles telles que les efforts physiques, le travail avec les bras écartés du corps et en améliorant le soutien social de la hiérarchie et des collègues. Ces résultats permettent d’estimer le nombre de TMS-MS potentiellement évitables par des actions préventives à l’échelle de la région étudiée.