Dioxyde de titane : la prévention demeure
La réglementation européenne évolue, les mesures de prévention restent inchangées.
Le dioxyde de titane, utilisé sous forme de poudre dans de nombreux secteurs d’activité, peut provoquer des irritations des yeux et des affections respiratoires. Si la Cour de justice de l’Union européenne a confirmé l’annulation de sa classification comme substance cancérogène suspectée, le Centre international de recherche sur le cancer le considère toujours comme « peut-être cancérogène ». La mise en œuvre de la démarche de prévention des risques chimiques reste de rigueur en entreprise. Explications avec Sylvain Keav, expert d’assistance conseil à l’INRS.
Qu’est-ce que le dioxyde de titane ?
Le dioxyde de titane est un solide blanc de formule TiO2 qui se rencontre, en milieu professionnel, sous forme particulaire (poudres sèches ou suspensions liquides). Il en existe plusieurs types (ou grades), se différenciant par les propriétés physico-chimiques des particules qui les composent : forme(s) cristalline(s), niveau de pureté, granulométrie, morphologie, revêtement de surface, etc.
On distingue deux grades principaux :
- le dioxyde de titane « fin » (forme micrométrique), constitué de particules primaires dont le diamètre est généralement compris entre 0,1 et 0,4 µm ;
- le dioxyde de titane « ultrafin » (forme nanométrique), composé principalement de particules primaires dont le diamètre est généralement compris entre 10 et 50 nm.
Quelles sont les utilisations du dioxyde de titane ?
Le dioxyde de titane sous forme de poudre micrométrique est utilisé depuis plus d’un siècle pour ses propriétés opacifiantes et blanchissantes. Il sert principalement de pigment blanc (peintures, laques, vernis, revêtements, encres d'imprimerie, plastiques, etc.), mais il est aussi utilisé dans d’autres applications comme la fabrication de composants électroniques (semi-conducteurs, résistances, etc.), de médicaments (en tant qu’excipient), de produits cosmétiques (savons, crèmes, dentifrices), d’autres composés du titane (carbure de titane, titanates), etc.
Depuis le début des années quatre-vingt-dix, le dioxyde de titane est également employé sous forme de poudre nanométrique, notamment pour ses capacités d'absorption des rayons ultraviolets. Il est, par exemple, employé dans les secteurs de la cosmétique (en particulier pour la fabrication de produits de protection solaire), de l'agroalimentaire, de l'épuration d’air, etc.
Quels sont les dangers du dioxyde de titane pour la santé ?
Les poussières de dioxyde de titane peuvent entraîner une irritation mécanique des yeux et des voies respiratoires. Chez l’humain, les données disponibles à ce jour sont insuffisantes pour établir formellement le lien entre l’exposition chronique au dioxyde de titane micrométrique et le risque de survenue de pathologies respiratoires chroniques et de cancers, notamment pulmonaires. En outre, aucune étude n’a considéré spécifiquement le dioxyde de titane sous sa forme nanométrique.
Pour autant, des expérimentations ont montré une augmentation de l’incidence des tumeurs pulmonaires bénignes chez les rats exposés par inhalation à des particules micrométriques de dioxyde de titane à une concentration extrêmement élevée. D’autres expériences ont montré que les particules nanométriques sont à l’origine d’une augmentation des tumeurs bénignes et malignes chez le rat à forte dose.
Sur la base de ces données, le Centre international de recherche sur le cancer (Circ) a classé toutes les poussières de dioxyde de titane, quelle que soit leur granulométrie, comme agent possiblement cancérogène pour l’être humain (groupe 2B).
Que dit la réglementation ?
Celle-ci a récemment évolué. Le dioxyde de titane sous forme de poudre contenant 1 % ou plus de particules d'un diamètre ≤ 10 µm, était classé, depuis le 1er octobre 2021, par la Commission européenne (Règlement délégué UE 2020/217 du 4 octobre 2019 rectifié) comme cancérogène suspecté pour l’être humain (catégorie 2) par inhalation. Cette classification et l’étiquetage associé ont été annulés, le 23 novembre 2022, par le Tribunal de l’Union européenne. Cette décision a été confirmée, le 1er août 2025, par la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE). Conformément au règlement (CE) n° 1272/2008 modifié (dit règlement CLP), les fournisseurs restent toutefois tenus de classer cette substance sur la base des données pertinentes disponibles sur ses dangers.
Quelle démarche de prévention adopter ?
La prévention des risques liés à la fabrication, à l’utilisation et au stockage de dioxyde de titane et de produits qui en contiennent en entreprise s’inscrit dans le cadre de la démarche de prévention des risques chimiques [lien vers https://www.inrs.fr/risques/chimiques/approche-generale-prevention.html]. Cette démarche consiste à :
- évaluer les risques ;
- supprimer ou substituer les produits et procédés dangereux ;
- mettre en œuvre un plan d’actions de prévention ;
- contrôler l’efficacité des actions menées et leur pérennité ;
- mettre en place des mesures complémentaires (information et formation des salariés, application de mesures d’hygiène, définition et diffusion des procédures d’urgence, suivi de l'état de santé des salariés exposés).
Il est rappelé, à défaut de substitution, que la mise en œuvre de mesures de prévention collective d’ordre organisationnel ou technique est prioritaire sur les mesures de protection individuelle, et, que de manière générale, il convient de rechercher le niveau d'exposition le plus bas possible.