Accès rapides :

Vous êtes ici :

  1. Accueil
  2. Publications et outils
  3. Bases de données
  4. Fiches toxicologiques
  5. Monoxyde de carbone (FT 47) (rubrique sélectionnée)

Monoxyde de carbone

Fiche toxicologique n° 47

Sommaire de la fiche

Édition : Avril 2021

Pathologie - Toxicologie

  • Toxicocinétique - Métabolisme [11, 26]

    Absorbé par voie respiratoire, le monoxyde de carbone se fixe essentiellement à l'hémoglobine pour former de la carboxyhémoglobine qui se distribue dans l'organisme et perturbe l'apport en oxygène des organes. Le monoxyde de carbone est éliminé par les poumons.

    Chez l'Homme
    • Absorption :

    Chez l’homme comme chez l’animal, le monoxyde de carbone est absorbé par les poumons. Il diffuse à travers les membranes alvéolo-capillaires : le monoxyde de carbone dissous se retrouve alors dans le sang. En présence d’une concentration constante, le taux d’absorption diminue régulièrement jusqu’à atteindre un état d’équilibre après 200-500 min [26]. La concentration en carboxyhémoglobine augmente rapidement dès le début de l’exposition, ralentit après 3 heures puis atteint un plateau stable à la fin d’une exposition de 8 heures.

     

    • Distribution :

    Le monoxyde de carbone traverse les barrières hémato-encéphalique et placentaire. Entre 80 et 90 % du monoxyde de carbone dissous dans le sang diffusent dans les érythrocytes et se fixent sur l’hémoglobine, dont l’affinité pour le monoxyde de carbone est environ 250 fois supérieure à celle pour l’oxygène. Il se fixe aussi réversiblement sur d’autres hémoprotéines : myoglobine (10 à 15 %), cytochrome c-oxydase (d’où une inhibition de la respiration mitochondriale), cytochrome P450, peroxydases et catalases. Le monoxyde de carbone modifie la dissociation oxygène-hémoglobine de telle manière qu’il diminue la libération d’oxygène dans les tissus. Les organes et tissus à forte consommation en oxygène sont donc les plus sensibles à cette hypoxie : cœur, cerveau, les muscles squelettiques ainsi que le fœtus [11]. La formation endogène de monoxyde de carbone dans l’organisme conduit à des taux de carboxyhé­moglobine (HbCO) de l’ordre de 0,4 à 0,8 % chez les non-fumeurs. Chez les fumeurs, le taux est de 3 à 8 %, en fonction de l'importance du tabagisme [27].

     

    • Elimination :

    Le monoxyde de carbone est éliminé essentiellement dans l’air expiré et, dans une moindre mesure (≈ 10 %) via métabolisme oxydatif [26]. La concentration en carboxyhémoglobine décline avec une demi-vie d’élimination, dépendante de la durée et de l’intensité de l’exposition et influencée par l’âge et le sexe. Ainsi, celle-ci augmente avec l’âge (surtout entre 2 et 20 ans) et est en moyenne 6 % plus longue chez les hommes [28]La décroissance est d’abord rapide et exponentielle, probablement liée à la distribution du monoxyde de carbone vers un compartiment périphérique (rate, muscle ou hémoprotéines), ainsi qu’à l’excrétion pulmonaire. Une deuxième phase plus lente reflète vraisemblablement la libération du monoxyde de carbone depuis le compartiment périphérique et son élimination. Après une exposition à 2 % de monoxyde de carbone pendant 1 à 3 minutes chez le mouton, les demi-vies d’élimination sont de 5,7 et 103 minutes, respectivement pour la phase rapide et la phase lente. Ces temps augmentent pour une exposition à 500 ppm pendant 5 à 10 h pour atteindre 21 et 118 minutes. Après une exposition continue pendant 49 heures, la moitié du monoxyde de carbone est éliminée en 30 à 180 minutes et 90 % en 180 à 420 minutes [29].

    La vitesse de disparition de la carboxyhémoglobine est fonction de son taux initial, de la quantité d’oxygène disponible et de la variation individuelle.

    Surveillance Biologique de l'exposition

    Le dosage sanguin de la carboxyhémoglobine ou le dosage en fin de poste du monoxyde de carbone dans l’air expiré peuvent être proposés pour la surveillance biologique des expositions. Ils permettent d'apprécier l'importance de l'exposition du jour même si l'exposition est relativement constante. Des valeurs biologiques d’interprétation (VBI) pour le milieu de travail et en population générale et une VBI pour le milieu de travail respectivement sont proposées pour ces deux indicateurs [30]. L'interprétation des résultats doit tenir compte notamment du tabagisme, de l’exposition environnementale, d'une éventuelle co-exposition (en particulier dichlorométhane), de l’existence d’une anémie hémolytique, d'une oxygénothérapie préalable.

    Le dosage sanguin de monoxyde de carbone a également été proposé, sans VBI pour cet indicateur.

  • Mode d'actions
  • Toxicité expérimentale
    Toxicité aiguë

    Le monoxyde de carbone provoque une baisse d'activité, un coma plus ou moins profond puis la mort des animaux. L'hypoxie est la cause d'une hypotension, de tachycardie, d'une vasodilatation, puis d'une hyperglycémie et des lésions cérébrales et cardiaques souvent irréversibles.

    Les CL5O sont respectivement de 2070 et 2800 mg/m3/4 h chez le rat et la souris (animaux morts pendant l’exposition, avec un taux de HbCO compris entre 50 et 80 % chez le rat). Chez le cobaye, elle est de 6550 mg/m3 dans les mêmes conditions (taux de HbCO compris entre 57 et 90 %). Les animaux présentent une baisse de l’activité motrice après 10 à 12 minutes, un coma léger après 30 minutes et une perte totale de conscience après 1 à 2 heures [31].

    L’action toxique majeure du monoxyde de carbone résulte de l’hypoxie provoquée par la conversion de l’oxyhémoglobine en carboxyhémoglobine. La saturation de l’hémoglobine par le monoxyde de carbone varie selon les espèces [29] et le rythme respiratoire. Les principaux symptômes sont une hypotension, une hypothermie et une tachycardie initiale [32]. Leur sévérité est fonction de l’espèce et du pourcentage sanguin de carboxyhémoglobine. Des taux de carboxyhémoglobine jusqu’à 10 % (exposition à 50 - 70 mg/m3) ne conduisent pas à des modifications hématologiques, cardiaques ou cérébrales [29]. Au-delà de 20 % apparaît, au niveau cardiovasculaire, une augmentation du débit cardiaque, consécutive à l’accroissement du volume systolique et à la tachycardie ainsi qu’une vasodilatation périphérique accompagnée d’une diminution de la résistance vasculaire. Au niveau sanguin, on observe une hémoconcentration et une acidose lactique [33]. L’inconscience et la mort surviennent lorsque la carboxyhémoglobinémie atteint 50 à 80 % [33].

    Après la fin de l’exposition, apparaissent une hyperglycémie et un déficit neurologique corrélé à la présence de lésions cérébrales, principalement au niveau de la substance blanche [32]. Ces lésions se manifestent comme des œdèmes et sont fonction de la présence combinée de l’hypotension, de l’hypoxémie et/ou de l’acidose sanguine [34]. La réversibilité des modifications induites par le monoxyde de carbone dépend de la dose inhalée.

    Une concentration élevée de glucose sanguin augmente le déficit neurologique et la létalité chez le rat [35]. Chez le singe, le monoxyde de carbone (100 ppm) augmente l’étendue d’une ischémie myocardique induite.

    Des études récentes montrent une activation et une prolifération des cellules microgliales (cellules immunitaires du système nerveux central, à pouvoir phagocytaire) et une augmentation de l’expression de plusieurs marqueurs immunologiques, au niveau du cerveau de rats exposés à 2000 ppm pendant 40 minutes puis à 3000 ppm pendant 20 minutes [36].

    Chez le rat adulte, une exposition à de fortes concentrations de monoxyde de carbone (500 à 1500 ppm, < 10 h) potentialise une perte auditive liée au bruit, de manière irréversible [37]. Des effets similaires ont aussi été observés chez le lapin (700 ppm, 9,5 h/j pendant 5 jours) [38].

     

    Irritation, sensibilisation

    Le monoxyde de carbone n’est pas irritant [27].

    Toxicité subchronique, chronique [26]

    L'exposition répétée au monoxyde de carbone conduit à une augmentation du nombre d'hématies et une hyperviscosité sanguine qui induisent une cardiomégalie. Le monoxyde de carbone favorise l'athérosclérose d'animaux nourris avec un régime riche en graisses.

    Le monoxyde de carbone n’a pas d'effets toxiques cumulatifs. Des phénomènes cardiovasculaires compensatoires se développent suite à des expositions répétées plus ou moins longues : effets hémodynamiques (dès 7,5 % HbCO), effets hématologiques (dès 9 % HbCO), hypertrophies cardiaques (12-58 % HbCO) et arythmies (2.6-12 % HbCO).

    Après les modifications observées lors d’une intoxication aiguë, une polycythémie apparaît en 3 à 5 jours, ayant pour conséquence une hypervolémie et une hyperviscosité sanguine sans modification du volume plasmatique (rats adultes, 500 ppm en continu pendant 42 jours ; HbCO 40 %). Les taux d’hématocrite, d’hémoglobine, le nombre d’érythrocytes et la concentration cellulaire en hémoglobine augmentent tout au long de l’exposition, les taux les plus importants étant mesurés après 30 et 42 jours d’exposition. L’augmentation de la viscosité entraîne un retour aux environs de la normale de la pression sanguine et de la résistance périphérique. Une cardiomégalie se développe après quelques jours dans les deux ventricules, plus importante pour le ventricule droit, et dans l’atrium. Après 5 à 6 semaines d’exposition, le débit et la fréquence cardiaques ainsi que le volume systolique sont légèrement supérieurs à la normale. La pression artérielle et la résistance périphérique restent en dessous de la normale [39].

    Dans une étude plus ancienne, l’augmentation du taux d’hémoglobine est observée chez des rats dès 100 ppm de monoxyde de carbone pendant 30 jours (HbCO 9,25 %) [40].

    Après l’arrêt de l’exposition, certains effets apparaissent et persistent plusieurs semaines : résistance périphérique et pression artérielle élevées, probablement dues à la forte viscosité sanguine en absence de vasodilatation périphérique, volume systolique diminué, tachycardie ; la polycythémie et la cardiomégalie s’installent progressivement pendant les 20 ou 30 jours suivants [41].

    L’exposition au monoxyde de carbone (environ 15 % carboxyhémoglobinémie pendant 10 semaines) favorise la fixation du cholestérol sur les artères, contribuant ainsi au développement d’athérosclérose [11].

    Effets génotoxiques

    Si les tests réalisés in vitro sont négatifs, certains tests in vivo sont positifs.

    In vitro

    Les tests d’Ames, réalisés sur E. coli et S. typhimurium, et un test de mutation génique sur cellules de mammifères (lymphome de souris) ont donné des résultats négatifs, avec et sans système d’activation métabolique [6].

    In vivo

    L’exposition de souris gestantes au monoxyde de carbone induit, dans les cellules sanguines des mères et des fœtus, une augmentation des échanges entre chromatides sœurs et des micronoyaux (0, 1500, 2 500 et 3500 ppm, 10 min au 5, 11 et 16 jour de gestation ou 0, 500 ppm, 1 h/j, 1er au 6ème, du 7è au 13è ou du 14è au 20è jour de gestation) [42].

    Au contraire, un test de micronoyau réalisé chez le rat (exposition pendant 28 jours, concentrations non disponibles) donne des résultats négatifs [6].

    Effets cancérogènes

    Il n'y a pas de donnée sur les effets cancérogènes du monoxyde de carbone chez l'animal à la date de publication de la fiche.

    Effets sur la reproduction

    Le monoxyde de carbone provoque des effets tératogènes ainsi qu'une importante foetotoxicité (altération notamment du système nerveux).

    Fertilité

    Aucun effet sur le taux de gestation n’est observé suite à une exposition en continu à 50 ppm de monoxyde de carbone (uniquement souris mâles ou souris mâles et femelles, 2 semaines avant l’accouplement).

    Développement

    Le fœtus est plus sensible que la mère à l’hypoxie induite par le monoxyde de carbone, son taux de carboxyhémoglobine à l’équilibre est plus élevé (10-15 % de plus que dans le sang maternel) et la dissociation de l’oxyhémoglobine moins aisée, ce qui empêche la libération d’oxygène de la mère au fœtus et de l’hémoglobine fœtale aux tissus fœtaux. La capacité de diffusion placentaire augmente avec l’âge gestationnel en fonction du poids fœtal [43].

    Chez le rat, de nombreuses études ont mis en évidence l’effet d’une exposition au monoxyde de carbone pendant la gestation sur le poids des fœtus, avec des LOAEC comprises entre 60 ppm (HbCO maternelle 15 %, exposition continue pendant toute la gestation) et 600 ppm (HbCO maternelle 30 %, exposition 2 h/j) [26].

    Suite à une exposition pendant la gestation, le monoxyde de carbone perturbe le développement du système nerveux central. Différents effets sont rapportés au niveau :

    • du contrôle de la fonction respiratoire, avec une réponse anormale à l’asphyxie et hypercapnie (cobayes, 200 ppm, 10 h/j, GD 23 ou 25 à GD 68, HbCO maternelle 8,5 %) ;
    • du comportement, avec une diminution de l’activité motrice et des réponses aux stimulations, altérations du réflexe de redressement ou de l’apprentissage (rats, dès 60 ppm en continu, toute la gestation, HbCO maternelle 15 %) ;
    • des niveaux de dopamine et norépinéphrine dans différentes régions du cerveau (rats, 60 ppm en continu, toute la gestation, HbCO maternelle 15 %) ;
    • du développement du cervelet, en lien avec le stress oxydatif induit (rats, 25 ppm) [44] ;  
    • du développement du système auditif (rats, dès 12,5 ppm, en continu du GD 8 à 20-22).

    Des effets sur le système nerveux périphérique sont observés chez des nouveau-nés, suite à une exposition pendant la gestation (rats, dès 75 ppm, en continu, GD 0-20, HbCO maternelle 7,3 %) : diminution de la myélinogenèse et de la conduction nerveuse au niveau des nerfs sciatiques.

    Des effets cardiaques (augmentation du poids et cardiomyopathies, dès 60 ppm chez le rat), immunologiques (modifications fonctionnelles des macrophages spléniques, rats, dès 75 ppm) et hématologiques (diminution de l’hématocrite et de l’hémoglobine, rats, dès 250 ppm) sont aussi rapportés chez des nouveau-nés suite à des expositions pendant la gestation.

    Une exposition postnatale pendant 32 jours induit une cardiomégalie et une tachycardie persistantes à l’âge adulte [45].

    Neurotoxicité

    L'exposition répétée conduit à des lésions au niveau du système nerveux central.

    Le monoxyde de carbone stimule l’augmentation du débit sanguin cérébral à des taux variables selon les régions (le faible flux du sang dans le cortex, expose celui-ci au risque d'hypoxie en priorité) et diminue la vitesse de conduction nerveuse pendant et après l’exposition. Les lésions histologiques se présentent comme un œdème généralisé, une vacuolisation et une démyélinisation. Elles sont fonction de l’hypotension et de l’acidose lactique alors que le taux de carboxyhémoglobine, la durée de l’exposition ou l’hémoconcentration ne jouent qu’un faible rôle [34].

  • Toxicité sur l’Homme

    L'exposition à de fortes concentrations de monoxyde de carbone est rapidement mortelle ; pour des concentrations plus faibles, les effets sont d'abord insidieux évoquant une intoxication alimentaire ou une ébriété pour évoluer vers des troubles neurologiques graves (coma, convulsion). En cas de survie, des séquelles sont possibles au niveau neurologique (syndrome parkinsonien, démence), sensoriel (troubles de la vue et de l'audition) et cardiaque (infarctus). Les expositions répétées peuvent induire des effets neurologiques et cardiaques (ischémie myocardique). Un effet toxique sur le système cardiovasculaire ne peut être exclu. Il n'y a pas de donnée sur d'éventuels effets génotoxiques ou cancérogènes du monoxyde de carbone. Le monoxyde de carbone est embryo-fœtotoxique : des effets tératogènes ont été rapportés dans des études de cas anciens.

    Toxicité aiguë [10, 11, 26, 46, 48-50, 55]

    La symptomatologie de l’intoxication aiguë dépend essentiellement du taux de monoxyde de carbone atmosphérique et de la durée d’exposition.

    Les intoxications aiguë et subaiguë se manifestent par une symptomatologie fonctionnelle banale et variable ; 46 % des cas d'intoxication avérée au monoxyde de carbone seraient asymptomatiques. L’intoxication débutante peut simuler une intoxication alimentaire (nausées, vomissements) toutefois sans diarrhée ; ces signes digestifs s’associent souvent à de violentes céphalées temporales pulsatiles. À un degré de plus, on observe également une asthénie, des vertiges ainsi que des troubles de l’humeur (angoisse, agitation), comportementaux (syndrome confusionnel) ou visuels.

    Le début insidieux pose souvent le problème de son dépistage rapide et sa confirmation par le dosage de la carboxyhémoglobine (HbCO) ou de la concentration de monoxyde de carbone dans le sang. Il existe en effet une cor­rélation entre la sévérité des symptômes et let le taux d’HbCO. Les niveaux d'HbCO chez l'adulte sain, non-fumeur sont inférieurs à 1,5 %. Chez des sujets fumeurs (1 paquet par jour), le taux d'HbCO peut être compris entre 5 et 6 % [30]. Cependant, l'interprétation des résultats doit se faire avec précaution. Il faut tenir compte du statut tabagique du patient, du délai entre l'intoxication et le prélèvement sanguin, et de l'oxygénothérapie éventuellement débutée. La qualité du conditionnement de l'échantillon et le délai entre le prélèvement et la réalisation du dosage ont également leur importance.

    L’hypoxie est dans un premier temps compensée par une augmentation du débit cardiaque. Des signes cardiovasculaires peuvent être présents : douleurs angineuses avec signes d’ischémie à l’ECG, insuffisance cardiaque avec OAP hémodynamique, survenant plus volontiers sur un terrain prédisposé. Une rhabdomyolyse est également possible.

    Une exacerbation de la morbidité cardiovasculaire (ischémie myocardique, troubles du rythme) a été observée lors d’expositions aiguës chez des patients atteints de coronaropathies, ayant des concentrations d’HbCO entre 2,4 % et 5,8 %.

    Les symptômes cliniques à la phase d’état sont variables et peuvent associer : dyspnée à l’effort, réduction de l’efficience mentale, céphalées, troubles visuels, irritabilité, altération du jugement, confusion, agi­tation, nausées, vomissements et perte de conscience au moindre effort. Au-delà, il se produit un coma avec convulsions et la mort en cas d’ex­position prolongée.

    L’examen clinique est pauvre même à la phase d’état, la coloration rosée des téguments, considérée comme un signe caractéristique de l’intoxication à l’oxyde de carbone, est en fait rarement retrouvée. Le patient est le plus souvent pâle et cyanosé. On peut retrouver aussi une éruption bulleuse au niveau des doigts et des orteils. Les réflexes ostéotendineux sont d’abord augmentés, puis absents. L’hyperthermie et l’œdème aigu du poumon représentent des facteurs de gravité considérables.

    Dans les suites d’une intoxication aiguë, on observe par­fois un état pseudo-démentiel (aphasie, apraxie, agnosie) qui peut survenir après une période de rémission de durée variable (7 à 21 jours). Cet état peut, soit être réversible (dans 50 à 75 % des cas) après plusieurs mois, soit laisser des séquelles neuropsychiques à des degrés divers : syndrome parkinsonien, surdité de perception, syndrome de Ménière (acouphènes, surdité et troubles de l’équilibre), réduction des capacités intellec­tuelles, désorientation temporo-spatiale et polynévrite. Les séquelles minimes à type de troubles psychiques, d’amnésie rétrograde, d’altérations sensorielles (hypoacousie, acouphènes, troubles de la vision, …), de troubles du comportement, de céphalées, d’asthénie sont décrites dans 25 à 47 % des cas.

    Des séquelles cardiaques graves peuvent survenir au cours d’intoxications avec hypoxie prolongée. Il s’agit d’une atteinte cardiaque qui se traduit à l’électrocardiogramme par des troubles de la repolarisation,  ou par l’apparition d’une nécrose myocardique même chez des sujets non prédisposés.

    Des atteintes musculo-tendineuses ainsi que des thrombophlébites ont également été rapportées.

    L’importance des séquelles semble être en rapport avec la gravité et la durée de l’intoxication, ce qui souligne l’im­portance d’un traitement rapide et approprié.

    Toxicité chronique [11, 26, 50, 56-59]

    Les signes d’appel sont le plus souvent banals et proches de ceux d’une intoxication subaiguë débutante : cépha­lées, vertiges et asthénie, parfois associés à des troubles digestifs.

    Les études conduites afin d’évaluer l’effet sur le myocarde de l’exposition répétée à de faibles doses de monoxyde de car­bone montrent que le monoxyde de carbone favo­rise le développement d’une ischémie myocardique à l’effort chez les sujets ayant une coronaropathie préexis­tante sans favoriser l’apparition de troubles du rythme. Ces observations pourraient expliquer que des études épi­démiologiques aient mis en évidence une association entre une élévation de la concentration atmosphérique en monoxyde de carbone et une augmentation de la mortalité générale, ainsi que de la mortalité par infarctus du myo­carde.

    Bien que le monoxyde de carbone n’entraine pas d’effets toxiques cumulatifs, une toxicité à long terme sur le système cardiovasculaire et neurologique ne peut être exclue. Certains auteurs rapportent les effets sur plusieurs organes, d’une exposition à long terme à de faibles concentrations de monoxyde de carbone, les plus visibles étant ceux observés sur le système cardiovasculaire. Des séquelles neurologiques semblent également fréquentes mais difficiles à attribuer exclusivement à une exposition au monoxyde de carbone.

    Effets génotoxiques

    Aucune donnée n’est disponible chez l’homme pour les effets génotoxiques à la date de publication de cette fiche toxicologique.

    Effets cancérogènes

    Aucune donnée n’est disponible chez l’homme pour les effets cancérogènes à la date de publication de cette fiche toxicologique.

    Effets sur la reproduction [11, 46, 47, 48, 49-54]

    Le monoxyde de carbone franchit facilement la barrière placentaire et l'hémoglobine fœtale possède une affinité pour le monoxyde de carbone supérieure à celle de l'hémoglobine maternelle. Aucune donnée n’est disponible à la date de publication de cette fiche concernant un impact d’une exposition au monoxyde de carbone seul sur la fertilité chez l’Homme.

    Bien qu’il existe des preuves épidémiologiques limitées des effets sur le développement chez l'Homme, plusieurs rapports de cas, dont certains anciens, se sont intéressés à des expositions au monoxyde de carbone pendant la grossesse.

    Certaines intoxications au monoxyde de carbone au cours du premier trimestre de grossesse ont été associées à diverses malformations (malformations des pieds et des mains, dysplasie et subluxation des hanches, agénésie d’un membre, atrésie des mandibules, microcéphalies).

    Une intoxication maternelle induit une intoxication fœtale retardée dont les conséquences dépendent de l’âge gestationnel et du niveau d’exposition (accouchement prématuré, avortement précoce ou tardif, mort in utero ou séquelles neurologiques d'événements anoxiques)

    L’exposition chronique pendant les deux premiers trimestres peut conduire à un retard de croissance intra-utérin, probablement inhérent à l’hypoxie chronique.

    Une étude prospective multicentrique sur l'intoxication aiguë au monoxyde de carbone pendant la grossesse a été publiée en 1991. Sur 5 cas avec une exposition maternelle majeure (désorientation, ou coma), 2 morts fœtales et 1 cas de paralysie cérébrale ont été rapportés. Dans les 35 cas restants, avec des expositions maternelles légères (maux de tête, nausées, déficience neurologique légère, faiblesse musculaire), aucune complication n’a été rapportée [55].

  • Interférences métaboliques
  • Cohérence des réponses biologiques chez l'homme et l'animal
EN SAVOIR PLUS SUR LES FICHES TOXICOLOGIQUES