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N-Méthyl-2-pyrrolidone

Fiche toxicologique n° 213

Sommaire de la fiche

Édition : Décembre 2020

Pathologie - Toxicologie

  • Toxicocinétique - Métabolisme [1, 17, 18]

    La N-méthyl-2-pyrrolidone (NMP) est rapidement et forte­ment absorbée par inhalation, voie orale ou cutanée. Elle se distribue dans tout l'organisme, est métabolisée et excrétée dans l'urine essentiellement sous forme de 5-hydroxy-NMP et de 2-hydroxy-N-méthylsuccinimide.

    Chez l'animal
    Absorption

    Chez l'homme et chez le rat, la NMP est rapidement absorbée par inhalation (env. 90 %), ingestion et passage cutané (rat: 69-78 %). La pénétration est légèrement plus faible à travers la peau du rat in vivo (7,7 mg/cm2/h) que par la peau humaine in vitro (17 mg/cm2/h). Le pic plas­matique apparaît, chez le rat, 2 heures après intubation gastrique et 1 à 2 heures après application cutanée ; 24 heures après application, 80 % de la dose de NMP est absorbé, moins de 2 % s'est évaporé.

    Interaction

    La NMP favorise le passage des autres substances à tra­vers la peau.

    Distribution

    La NMP se distribue dans tout l'organisme et en particu­lier le foie, l'intestin, l'estomac, les testicules, le thymus, les reins et la vessie ; chez la rate gestante, elle traverse le placenta et passe chez le fœtus.

    Dans les premières heures après exposition orale ou cuta­née chez le rat, la NMP inchangée est largement majori­taire dans le plasma avec une demi-vie de 9 à 12 heures. Chez l'homme, après exposition par inhalation (10­50 mg/m3, 8 h), la concentration de NMP plasmatique est maximale à la fin de l'exposition et décline ensuite avec une demi-vie de 4 heures.

    Métabolisme

    La NMP n'est pas métabolisée lors de la pénétration, mais plutôt par les hydroxylases et les oxydases hépatiques, en trois métabolites (cf. fig. 1). Chez l'homme, les pics de concentration plasmatique des métabolites apparaissent, après une exposition de 8 heures par inhalation, avec un délai de 2 heures par rapport à la NMP pour la 5-HNMP, 4 heures pour le NMS et 16 heures pour le 2-HNMS ; les demi-vies plasmatiques sont de 6, 8 et 16 heures respectivement.

    Chez le rat, le métabolisme de la NMP est saturable : le pic plasmatique de la 5-HNMP apparaît à des temps variables avec la dose (4 à 24 h après injection iv. de 1 à 500 mg/kg).

    Excrétion

    Après administration inhalatoire chez l'homme, l'élimina­tion urinaire de NMP et de ses métabolites connus correspond à environ 90% de la dose administrée, 65% après exposition orale et 22-24% environ après exposition cutanée.

    Chez le rat exposé par voie orale, la NMP est éliminée inchangée dans l'urine à raison de 4 à 10% de la dose et sous forme 5-HNMP pour 42 à 55% de la dose; exposé par voie cutanée, il élimine 73 à 82% de la dose administrée. Il n'y a pas de métabolites conjugués ; environ 2% de la dose est éliminée dans les fèces.

    Surveillance Biologique de l'exposition

    Etant donné la bonne pénétration cutanée de la N-méthyl-2-pyrrolidone (NMP), la mise en place d’une surveillance biologique est intéressante.

    Le dosage urinaire de la 5-hydroxy-N-méthylpyrrolidone (5-HNMP) en fin de poste, bien corrélé avec l'exposition à la NMP, est le paramètre à privilégier pour la surveillance biologique de l'exposition.

    Le dosage du 2-hydroxy-N-méthyl-2-succinimide (2-HMSI) urinaire le lendemain matin du poste exposant, bien corrélé à l'intensité de l'exposition de la veille peut également être utilisé.

    En cas d'exposition cutanée prédominante ou d'exposition à des solutions diluées, les pics d'élimination urinaire du 5-HNMP et du 2-HMSI sont retardés (de 4 à 6 heures).

    Pour ces deux indicateurs, il existe des valeurs biologiques d’interprétation (VBI) pour la population professionnellement exposée proposées par plusieurs organismes ainsi que des VBI issues de la population générale [19].

     

    D’autres indicateurs ont été proposés pour lesquels il n’y a pas de VBI établie :

    • Les dosages plasmatiques de la 5-HNMP et du 2-HMSI n’apportent pas d’information supplémentaire par rapport aux dosages urinaires.
    • Les dosages de la NMP dans le plasma et/ou dans les urines en fin de poste sont bien corrélés avec l'intensité de l'exposition mais seule une faible fraction de la NMP est éliminée sous forme inchangée dans les urines. Il faudra par ailleurs se méfier d'une contamination du prélèvement.
    • Le dosage du N-méthylsuccinimide (MSI) dans les urines ou le plasma en fin de poste est également bien corrélé à la concentration atmosphérique de NMP. Le MSI ayant une demi-vie plus longue que la 5-HNMP, ce marqueur semble être un meilleur reflet de l'exposition moyenne, en cas d'exposition fluctuante.
  • Mode d'actions

    Figure 1 : Métabolisme de la NMP [17, 18]

  • Toxicité expérimentale
    Toxicité aiguë [1, 6, 20]

    La NMP est faiblement toxique pour l'animal en exposition aiguë, elle est essentiellement irritante.

    Après inhalation de NMP, les rats ont une respiration rapide et irrégulière, une diminution des réflexes à la dou­leur et un léger saignement nasal ; 14 jours après l'exposi­tion, l'autopsie révèle une irritation pulmonaire. Exposés par voie orale, les animaux présentent une irritation du tractus gastro-intestinal et, à doses sublétales, ataxie et accroissement de la diurèse. Après exposition cutanée, occlusive ou non, on observe une léthargie à des doses supérieures ou égales à 5000 mg/kg et un érythème à 10 000 mg/kg.

    Voie

    Espèce

    CL50 / DL50

    Réf.

    Orale

    Souris

    4050-5 320 mg/kg

    5

    Rat

    3598-5010 mg/kg

    5, 6

    Lapin

    3500 mg/kg

    7

    Cobaye

    4400 mg/kg

    7

    Cutanée

    Lapin

    8000 mg/kg

    4000 mg/kg (peau abrasée)

    5, 7

    Rat

    > 2 500 mg/kg

    4

    Inhalation

    Rat

    > 5100 mg/m3/4 h

    1, 8

    La NMP non diluée provoque une irritation légère à modé­rée de la peau (0,5 mL sous occlusion, érythème et œdème) et de l'œil du lapin (0,1 mL, opacité cornéenne, iri­tis et conjonctivite réversibles en 14-21 jours) [20].

    Toxicité subchronique, chronique [1, 6, 21, 23]

    La NMP induit une toxicité générale après exposition répé­tée par voie orale ; par inhalation, les vapeurs sont irri­tantes et les aérosols toxiques. Les cibles principales sont le foie et les testicules.

    Chez le rat, exposé dans la nourriture pendant 4 semaines ou 90 jours, la NMP induit une réponse systémique à des concentrations > 18 000 ppm : baisse de la prise de nourri­ture et de poids, modification des paramètres sériques, leucopénie modérée, altérations histologiques des tes­ticules et du thymus, hypertrophie hépatocellulaire centrolobulaire chez les femelles et modification de poids des reins, des poumons, du cerveau et des testicules. La NOAEL est de 3000 ppm pendant 90 jours. La souris ne présente pas d'effet systémique ; en revanche, on note un effet rénal après 4 semaines (hypertrophie de l'épithélium des tubes rénaux distaux) et une hypertrophie hépatocellulaire centrolobulaire après 90 jours. La NOAEL est de 1000 ppm pendant 90 jours.

    La toxicité de la NMP par inhalation est variable selon les conditions d'exposition :

    • les rats exposés essentiellement sous forme de vapeurs ne présentent qu'une inflammation minime des poumons, à 400 mg/m3 pendant 2 ans[24], et une irritation du sys­tème respiratoire à 1000 mg/m3 pendant 4 semaines [8],
    • les rats, exposés à des atmosphères (1000 mg/m3 pen­dant 4 semaines, corps entier) contenant une quantité non négligeable d'aérosol, présentent une toxicité sévère (létalité, modifications des poumons, du foie, de la moelle osseuse et du système lymphatique [24] ; une exposition de 3 mois (nez seul) provoque une irritation respiratoire à partir de 1000 mg/m3 et des lésions testiculaires à 3000 mg/m3[22].

    Les urines des animaux exposés, quelle que soit la voie, présentent une coloration jaune qui fonce avec la dose ; bien que cette coloration soit liée à la NMP, elle n'est pas associée à des modifications rénales; elle serait probablement due à la présence d'un métabolite et reflé­terait la charge corporelle.

    Effets génotoxiques [1, 6]

    Le pouvoir génotoxique de la NMP est faible in vitro et nul in vivo, dans le cadre des tests disponibles.

    La NMP est faiblement mutagène, in vitro, pour les bacté­ries dans le test d'Ames ; elle induit une aneuploïdie chez la levure.

    In vivo, elle n'est ni clastogène ni aneuploïdogène dans la moelle osseuse de hamster chinois et n'induit pas de micronoyau dans celle de la souris.

    Effets cancérogènes [1, 6]

    La NMP n'est pas cancérogène pour le rat; elle induit des tumeurs hépatiques chez la souris par voie orale.

    La NMP n'est pas cancérogène par voie orale ou par inha­lation chez le rat (1600 - 5000 - 15 000 ppm dans la nourri­ture ou 10 - 100 ppm, 6 h/j, 5 j/sem., pendant 2 ans) ; le principal effet est une néphropathie progressive et une atrophie testiculaire chez le mâle. Chez la souris (600­ - 1200 - 7200 ppm dans la nourriture pendant 18 mois), elle provoque une augmentation, à la forte dose, des adé­nomes hépatocellulaires dans les deux sexes et des carci­nomes hépatocellulaires chez le mâle accompagnés d'une augmentation du nombre de foyers de cellules altérées ; la NOAEL est de 600 ppm pour les mâles et 1200 ppm pour les femelles.

    Effets sur la reproduction [1, 6, 24-26]

    La NMP est toxique pour le développement (avec induction de malformations) par voie orale et cutanée chez le rat et le lapin. Elle semble affecter la fertilité chez le rat des deux sexes par voie orale.

    Fertilité

    Il n'y a pas d'effet sur la fertilité du rat par inhalation jus­qu'à la plus haute dose testée de 116 ppm (6 h/j, 7 j/sem., 2 générations).

    Par voie orale, la NMP induit une baisse de l'indice de fer­tilité chez le mâle et de fécondité chez la femelle de la 1re génération à 500 mg/kg, accompagnée de modifica­tions histologiques : diminution du nombre de corps jau­nes chez la femelle et hypospermie avec atrophie testiculaire bilatérale chez le mâle [22]. Ces effets n'ont pas été observés dans une deuxième étude réalisée aux mêmes doses [23].

    Développement

    Par inhalation, la NMP n'induit aucune toxicité sur le développement du rat (jusqu'à 120 ppm soit 494 mg/m3, 6 h/j, du 6e au 20e jour de gestation) ; chez le lapin, il appa­raît une côte surnuméraire à 1000 mg/m3 (tête seule, 6 h/j, 7e au 19e jour de gestation) sans toxicité maternelle.

    Par voie orale, chez le rat, on observe une baisse de poids fœtal (> 250 mg/kg/j), une embryolétalité et des résorp­tions (> 500 mg/kg/j), des variations squelettiques (> 500 mg/kg/j, diminution d'ossification des os du crâne et des sternèbres) et des malformations externes (> 250 mg/kg/j, anasarque, atrésie anale associée à une queue résiduelle ou absente), viscérales (> 500 mg/kg/j, cœur et gros vaisseaux) et squelettiques (> 500 mg/kg/j, absence d'arcs vertébraux et de vertèbre caudale). Chez le lapin, en présence de toxicité maternelle, la NMP pro­voque une augmentation des résorptions et des malfor­mations cardiovasculaires et des os du crâne ainsi que des déformations des vertèbres pré-sacrées.

    Par voie cutanée, chez le rat, elle entraîne des résorptions et une foetolétalité, un retard d'ossification et des malfor­mations squelettiques à des doses toxiques pour les mères; chez le lapin, seule une altération squelettique (13e côte surnuméraire) apparaît en absence de toxicité maternelle.

    Espèce

    Voie

    NOAEL

    maternelle

    NOAEL

    fœtale

    Rat

    Orale (gavage)

    250 mg/kg/j

    125 mg/kg/j

    Rat

    Cutanée

    237 mg/kg/j

    237 mg/kg/j

    Lapin

    Inhalation

    1000 mg/m3 (tête seule, aérosol)

    500 mg/m3

    Lapin

    Orale

    55 mg/kg/j

    175 mg/kg/j

    Lapin

    Cutanée

    > 1000 mg/kg/j

    300 mg/kg/j

     

  • Toxicité sur l’Homme

    Il n'y a pas de cas d'intoxications aigües publié chez l'Homme. Certaines observations, partielles et discutables, rapportent des cas d'irritations cutanées ou oculaires. Aucune donnée n'existe sur les effets chroniques, mutagè­nes ou cancérogènes. Les données disponibles sur les effets sur la reproduction sont insuffisantes pour conclure.

    Toxicité aiguë [29-31]

    Une observation ancienne est citée régulièrement dans les articles. Elle rapporte l'application de patchs tests sur 50 volontaires qui n'aurait produit aucun effet cutané après une exposition de 24 heures et seulement des réac­tions transitoires modérées après des applications répé­tées. Les données sont à chaque fois très imprécises.

    Leira rapporte des symptômes d'irritations cutanées chez des ouvriers ayant manipulé de la NMP. Douze ouvriers ont dû coller de manière exceptionnelle des plaques d'acrylonitrile-butadiène-styrène avec ce solvant huit heures par jour, plusieurs jours de suite, avec un contact cutané certain et important. Dix ouvriers ont présenté des signes cutanés, survenus le premier ou deuxième jour de travail et d'intensité variable (au maximum peau érythéma­teuse, douloureuse, parsemée de vésicules).

    Beaulieu rapporte les résultats d'une campagne de mesures d'exposition à la NMP dans deux usines de fabri­cation de semi-conducteurs. Il signale que les personnes exposées à plus de 0,7 ppm se plaignent d'une odeur «inconfortable» au bout d'une demi-heure d'exposition, d'autres de céphalées. Pour des concentrations supé­rieures à 15 ppm, des irritations minimes des yeux sont notées. Au-dessus de 67 ppm, une sensation immédiate­ment intolérable est rapportée. Il n'est cependant pas pré­cisé dans l'article comment sont recueillis ces symptômes et donc quelle est leur fiabilité.

    Une étude effectuée chez des volontaires donne des résul­tats négatifs mais à des concentrations plus faibles. Six hommes ont été exposés durant 8 heures dans des conditions contrôlées à des niveaux de 10, 25 et 50 mg/m3. Aucun n'a présenté d'irritation oculaire ou des voies aériennes supérieures durant l'exposition et les huit heures qui ont suivi. Rhinomanométries et spirométries effectuées durant l'étude se sont avérées négatives.

    Toxicité chronique

    Aucune donnée n'est disponible chez l'homme à la date de publication de cette fiche toxicologique.

    Effets cancérogènes

    Aucune donnée n'est disponible chez l'homme à la date de publication de cette fiche toxicologique.

    Effets sur la reproduction [30]

    Solomon rapporte le cas d'une femme de 23 ans ayant accouché d'un enfant mort-né à 31 semaines. L'enfant ne présentait pas de malformations mais un retard de crois­sance, dépisté d'ailleurs lors des échographies de sur­veillance. Cette femme, primigeste, primipare, sans aucun antécédent médical, sans facteur de risque particulier, tra­vaillait dans un laboratoire de contrôle qualité où elle solubilisait des échantillons dans de la NMP. À la 16e semaine, la patiente a présenté un contact cutané impor­tant avec le produit suite à un phénomène accidentel. Quatre jours après, elle est victime d'un malaise avec céphalées, nausées et vomissements. Avant cela, le méde­cin du travail avait préconisé un changement de poste du fait du produit, refusé par l'employeur.

    Il est difficile de tirer des conclusions d'une seule observa­tion, qui n'est pas exempte de biais (stress créé par la demande, refusée par l'employeur, de mise à l'écart du poste du fait d'un risque pour la grossesse).

  • Interférences métaboliques
  • Cohérence des réponses biologiques chez l'homme et l'animal
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