Que faire en cas d'exposition ? [R1, R2, R3] Guide de lecture
Définition d'un sujet exposé
Victime d'un accident d'exposition au sang : contact accidentel avec du sang ou un liquide biologique potentiellement contaminant, suite à une effraction cutanée (piqûre, coupure, égratignure...) ou une projection sur une muqueuse (muqueuses oculaires et nasales, bouche) ou sur une peau lésée (dermatose, plaie...).
Principales professions concernées
Personnels de santé, personnels de laboratoires qui manipulent des prélèvements sanguins, plus rarement, personnes susceptibles d'être en contact avec des objets piquants, tranchants, traînants, souillés par du sang (par exemple: les secouristes, les gardiens de prison, les personnels de la filière déchets, les policiers, les tatoueurs...).
Conduite à tenir immédiate
- En cas d'effraction cutanée ou de projection sur la peau :
- nettoyer à l'eau et au savon puis rincer abondamment ;
- compléter par une désinfection locale : de préférence avec un produit chloré : hypochlorite de sodium (eau de Javel à 2,6 % de chlore actif diluée au 1/5ème ou solution de Dakin). Laisser agir au moins 5 minutes.
- En cas de projection sur le visage ou les yeux :
- rincer abondamment avec du sérum physiologique ou, à défaut, avec de l'eau courante pendant au moins 5 minutes.
- Consulter un médecin référent ou un médecin de garde aux urgences : si la prescription d'un traitement antirétroviral (traitement post exposition ou TPE) se justifie, elle sera d'autant plus efficace qu'elle sera mise en route le plus tôt possible, au mieux dans les 4 premières heures et jusqu'à 48 heures au plus tard.
Évaluation du risque
Selon les caractéristiques de la source et le type d'exposition
Le statut sérologique du patient source
- Patient source VIH positif connu. Il est important de disposer des éléments suivants : stade de l'infection, détail du traitement antirétroviral en cours et surtout résultat de la charge virale plasmatique la plus récente possible (lorsqu'elle est indétectable, le risque de transmission est nul), notion d'une souche résistante en cas de charge virale détectable ;
- Patient source VIH inconnu : faire un test VIH rapide (TDR ou TROD) chez le patient source avec son accord (résultat en 1 heure), systématiquement vérifié par ELISA quel que soit le résultat ; si suspicion de séroconversion en cours, faire un test ELISA, voire un ARN-VIH plasmatique chez le patient source.
Le type de produit biologique en cause dans l’AES
Produit biologique : sang, liquide biologique contaminé par le sang, ou certains liquides biologiques tels que le LCS, le liquide pleural, le liquide broncho-alvéolaire et le liquide amniotique (risque décroissant).
Type d'exposition
Le risque de transmission du VIH est plus important en cas de blessure profonde, de piqûre avec une aiguille creuse et notamment avec une aiguille ayant servi à un geste en intra-veineux ou intra-artériel. Il est beaucoup plus faible mais documenté après contact sanguin cutanéo-muqueux.
Le port d'une protection (gants, lunettes...) diminue le risque de transmission.
Spécificité de l'exposition au laboratoire
Source particulièrement à risque : cultures virales.
Selon les caractéristiques du sujet exposé
Pas d'immunité protectrice.
Prise en charge du sujet exposé
Mesures prophylactiques
Après les soins locaux d'antisepsie (cf. CAT immédiate) et en fonction de l'évaluation du risque, un traitement antirétroviral post exposition (TPE) pourra être prescrit au mieux dans les 4 heures suivant l'exposition et dans les 48 heures au plus tard.
Les recommandations actuelles (HAS/ANRS/CNS) datent de juillet 2024 (R2) :
Après exposition au sang, dans le cadre professionnel : il est essentiel de documenter le statut sérologique VIH de la personne source quand cela est possible, et en cas de positivité la charge virale.
Les recommandations sont détaillées dans le tableau ci-dessous.
Tableau 1 : Indications de traitement post-exposition (TPE) après exposition au sang (Traitement préventif post exposition au VIH, HAS/ANRS/CNS, 2024).
| Risque et nature de l'exposition | Personne source vivant avec le VIH avec CV détectable ≥50 copies/mL | Personne source vivant avec le VIH traitée depuis >6 mois avec CV <50 copies/mL | Personne source de statut VIH impossible à déterminer |
| Piqûre profonde, aiguille creuse intravasculaire | TPE recommandé | TPE non recommandé | TPE à discuter si facteurs de risques épidémiologiques |
| Coupure avec bistouri, piqûre avec aiguille IM ou SC, piqûre avec aiguille pleine, exposition cutanéo-muqueuse avec temps de contact > 15 min |
TPE recommandé |
TPE non recommandé |
TPE non recommandé |
| Piqûre avec seringue abandonnée, crachat, morsure, griffure | TPE non recommandé | TPE non recommandé | TPE non recommandé |
Modalités du TPE :
Le TPE doit être instauré le plus tôt possible (idéalement dans les 4 heures et jusqu’à 48h suivant l’exposition).
Le type de TPE recommandé est l’association : ténofovir, lamivudine et doravirine. En alternative, il peut être utilisé une association de 2 INTI et 1 INI.
Cas particulier du laboratoire
En cas d’exposition cutanéo-muqueuse à du virus concentré, un traitement post exposition pourra être proposé même si le temps de contact est inférieur à 15 minutes.
Suivi médical
Test de référence : Ac anti VIH1 et VIH2 dans les 8 jours après exposition :
- si prophylaxie prescrite, surveillance clinique et biologique de la tolérance du traitement : plusieurs consultations : à 48h si prescription initiale aux urgences, à J15 si besoin puis à 4 semaines ;
- si source VIH+ ou VIH inconnu, suivi sérologique à 6 semaines après exposition complétée d’une autre sérologie à 12 semaines en cas de TPE (R4, R5) ;
- si source VIH- : pas de suivi sérologique (sauf si suspicion d'une séroconversion en cours de la source) ;
- si source VIH+ présentant une charge virale indétectable (<50 copies/ml), il est également inutile d'effectuer une surveillance ultérieure (R1).
NB : en cas d’AES, pas de don du sang pendant 4 mois (10).
En cas de grossesse
Certains traitements antirétroviraux sont contre-indiqués. Avis spécialisé nécessaire.
Pour l'entourage du sujet exposé
Si exposition à risque, rapports sexuels protégés pendant 3 mois après l'exposition et pas de don du sang.