Généralités sur la substance
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Nom de la substance
Parathion-éthyl -
Famille chimique
Pesticides organophosphorés -
Numéro CAS
56-38-2 -
Synonyme(s)
- Thiophosphate de O,O-diéthyle et de O-4-nitrophényle
- Phosphorothioate de O,O-diéthyle et de O-p-nitrophényle
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Fiche(s) toxicologique(s)
Renseignements utiles pour le dosage p-Nitrophénol urinaire
Valeurs d’imprégnation en population générale adulte
p-Nitrophénol urinaire : 3,1 µg/L (2,7 µg/g de créatinine) (95ème percentile chez les adultes de plus de 20 ans), NHANES 2015-2016 [G3]
Valeurs biologiques d’interprétation établies pour les travailleurs
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VBI françaises (VLB règlementaire, VLB ANSES)
--- valeur non déterminée ---
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VBI européennes (BLV)
--- valeur non déterminée --- -
VBI américaines de l'ACGIH (BEI)
p-Nitrophénol total urinaire : 0,5 mg/g de créatinine en fin de poste (ACGIH, 2020) [G1]
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VBI allemandes de la DFG (BAT, EKA, BLW)
--- valeur non déterminée ---
Moment du prélèvement
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Dans la journée
fin de poste -
Dans la semaine
fin de semaine
Facteur de conversion
- 1 mmol/L = 139 mg/L
Laboratoires effectuant ce dosage
Le dosage n’est pas proposé par les laboratoires référencés dans BiotoxRenseignements utiles pour le choix d'un indice biologique d'exposition
Toxicocinétique - Métabolisme
Il existe une mention de l'ACGIH et de la DFG signalant le risque de passage percutané.
Facilement absorbé principalement par voies cutanée mais aussi respiratoire (aérosols, poussières) et oculaire et de façon accidentelle par voie digestive. L'absorption cutanée est importante et prolongée. Le parathion se distribue à de nombreux organes et tissus, en particulier dans les tissus riches en lipides, car il est lipophile ; en cas d'intoxication aiguë, il est relargué progressivement à partir du tissu graisseux.
Le parathion est métabolisé dans le foie en paraoxon, puissant inhibiteur des cholinestérases. Ces deux produits sont ensuite rapidement hydrolysés par des estérases avec production d'alkylphosphates (diéthyl- et diéthylthio-phosphates pour le parathion-éthyl) et de p-nitrophénol. Ils sont éliminés dans les urines avec un pic d'excrétion à la 8ème heure après le début de l'exposition. La demi-vie d'élimination du p-nitrophénol est de 8 heures après absorption pulmonaire ; après absorption cutanée, l'élimination est beaucoup plus lente (environ 10 % en 5 jours).
Indicateurs biologiques d'exposition
Les activités des cholinestérases plasmatiques et intraérythrocytaires en fin de poste et fin de semaine sont utilisées pour la surveillance des travailleurs exposés aux organophosphorés et s'appliquent au parathion ; ils sont le reflet des expositions cumulées des semaines précédentes.
La corrélation entre baisse des cholinestérases et effets toxiques n'est pas toujours bonne car ces derniers dépendent de l'importance de la chute des cholinestérases mais aussi de la rapidité de cette chute. Le dosage des cholinestérases plasmatiques et intraérythrocytaires est utilisé comme test de dépistage, témoin des effets des expositions cumulées des semaines précédentes. Ce dosage est le meilleur test pour la détection des effets aigus.
L'ACGIH, pour ces 2 paramètres, recommande de déterminer avant exposition, pour chaque travailleur (du fait de la grande variabilité interindividuelle), au moins une fois par an, l'activité cholinestérasique de base comme la moyenne de deux dosages, à au moins 3 jours d'intervalle, après une période sans exposition d'au moins 30 jours. Un retrait du poste est recommandé jusqu'au retour de l'activité à plus de 80 % du niveau de base.
Pour l'activité de l'acétylcholinesérase intraérythrocytaire, la Commission allemande DFG a proposé une valeur BLW correspondant à la réduction de l'activité à 70 % de la valeur de référence, en fin de poste, après plusieurs postes en cas d'exposition au long cours (valeur plafond en raison des effets de toxicité aiguë) (Valeur BLW, DFG 2023). La mesure individuelle de l'activité avant exposition doit être utilisée comme valeur de référence. La valeur BLW est établie en l'absence de données suffisantes pour proposer une valeur BAT (Voir document Signification des principales VBI).
Le dosage de l'acétylcholinestérase érythrocytaire (AChE) est le meilleur indicateur de l'inhibition de l'acétylcholinestérase dans les hématies, mais aussi un bon indice de l'activité cholinestérasique des autres tissus (notamment nerveux) et le meilleur reflet des effets sur la santé. D'autres substances comme certains métaux lourds (plomb, cadmium...), les HAP, certains pesticides (pyréthrine, paraquat) sont susceptibles d'inhiber les AChE.
Le dosage de la butyrylcholinestérase plasmatique ou sérique (BuChE ou cholinestérase plasmatique ou pseudocholinestérase) est souvent préféré parce que l'activité de la BuChE varie parallèlement à celle de l'AChE et que la conservation des prélèvements plasmatiques pour ce dosage est plus facile ; ce paramètre est cependant moins spécifique que l'activité de l'AChE. Il peut être utilisé comme témoin de la baisse des AChE à condition de connaître les limites de sa valeur prédictive : aux faibles doses, les OP n'inhibent pas également ces deux enzymes.
Le BEI de l'ACGIH de 60 % de l'activité individuelle de base pour le dosage de la butyrylcholinestérase plasmatique ou sérique en fin de poste est applicable pour une exposition aux pesticides inhibiteurs des cholinestérases.
Il existe une grande variabilité intra-individuelle des taux des BuChE (coefficient de variation de 3 à 46 %), de nombreuses possibilités d'erreurs (contamination de l'échantillon, stockage trop long de l'échantillon, variations induites par les techniques de dosage ou par les laboratoires plus ou moins expérimentés), une variabilité inter-individuelle (de nombreux facteurs entraînent une diminution de l'activité des cholinestérases plasmatiques : poids, âge, insuffisance hépatocellulaire, médicaments comme les antiglaucomateux et les antimyasthéniques) et surtout plusieurs phénotypes d'activité des BuChE dans la population générale : les homozygotes UU ayant une activité BuChE forte, les hétérozygotes UA ayant une activité intermédiaire (75 % environ de l'activité du groupe UU).
Les neuropathies centrales et périphériques qui peuvent survenir au décours d'une intoxication aiguë ou subaiguë par un ester phosphorique s'accompagnent d'une baisse de l'activité de la NTE (Neuropathy target esterase) lymphocytaire. En pratique, cette inhibition n'étant pas spécifique de l'intoxication et le dosage difficile nécessitant l'utilisation d'agents hautement toxiques, ce paramètre est rarement utilisé.
Le dosage du parathion dans le sang a été proposé en fin de poste de travail. Ce paramètre est spécifique mais il existe peu de données chez les populations professionnellement exposées. Il a surtout été utilisé en cas d'intoxications aiguës.
Le dosage du p-nitrophénol dans les urines en fin de poste de travail et fin de semaine est un indicateur sensible de l'exposition récente au parathion. Etant donnée la lenteur de l'absorption cutanée du parathion, cette excrétion peut être très prolongée. Ce paramètre est bien corrélé aux concentrations de parathion sanguin, plus spécifique et plus sensible que l'activité cholinestérasique. Cependant les expositions au nitrobenzène entraînent aussi l'élimination de p-nitrophénol dans les urines. La corrélation entre p-nitrophénol urinaire et cholinestérases intraérythrocytaires n'est pas toujours bonne : l'un reflète l'exposition récente, l'autre l'exposition cumulée des dernières semaines.
Le dosage des alkylphosphates : diéthylthiophosphate (DETP) et diéthylphosphate (DEP) dans les urines de fin de poste (ou début du poste suivant), est un témoin qualitatif de l'exposition aux organophosphorés dont le parathion mais aucune corrélation claire entre les taux d'alkylphosphates et l'inhibition de l'activité des cholinestérases n'a été démontrée. Ces paramètres sont plus sensibles que l'activité cholinestérasique mais non spécifiques d'un organophosphoré donné (par exemple le DETP est un métabolite commun au chlorpyrifos, au diazinon, coumaphos, sulfotep…). Ils sont de plus soumis à une grande variabilité (rôle de l'âge, du poids, de l'alimentation et de l'usage d'insecticides...).
Pour évaluer l'exposition percutanée de la veille, le prélèvement sera effectué avant le poste, le lendemain de l'exposition.
Des taux d'alkylphosphates urinaires non nuls sont retrouvés dans la population générale.
Interférences - Interprétation
L'activité cholinestérasique de base individuelle sera déterminée avant exposition comme la moyenne de deux dosages, à au moins 3 jours d'intervalle, après une période sans exposition d'au moins 30 jours, selon la même méthode et par le même laboratoire (une différence de moins de 20 % entre les 2 résultats devra être trouvée). Les mesures ultérieures, après exposition, peuvent être exprimées en pourcentage de l'activité enzymatique de base individuelle ou en pourcentage d'inhibition (par exemple, 70 % de l'activité de base individuelle correspond à 30 % d'inhibition de l'activité). Une diminution en dessous de 70 % de l'activité de base pour l'AChE (60 % pour la BuChE) ou la présence de signes cliniques (quel que soit le niveau d'activité) impose une éviction jusqu'au retour à 80 % de l'activité de base.
Si le niveau de base des BuChE et/ou AChE est inconnu, un dosage simultané BuChE et AChE peut être utile à l'interprétation des résultats :
L'activité des BuChE diminue plus rapidement que celle des AChE et revient à la normale plus rapidement ;
- si les deux sont diminuées, la contamination par les OP est probable ; faire une épreuve d'éviction du risque d'au moins 3 semaines ce qui confirmera l'hypothèse si les deux enzymes se normalisent ;
- s'il persiste une discordance (AChE normales, BuChE basses), la contamination par les OP est possible car certains OP inhibent plutôt les BuChE que les AChE ; faire une épreuve d'éviction du risque d'au moins 3 semaines :
* si les BuChE se normalisent, la contamination est très probable ;
* si les BuChE restent basses, il faut éliminer certaines pathologies (bilan hépatique) et rechercher secondairement un phénotype anormal (test à la dibucaïne).
Dans l'interprétation des résultats des dosages, il faudra impérativement tenir compte de l'absorption percutanée, de l'exposition à d'autres pesticides type carbamates, ou à certains médicaments à action anticholinergique.
Il est nécessaire de faire appel à des laboratoires expérimentés participant à des contrôles de qualité externes, utilisant la même technique de dosage, et si possible, au même laboratoire. Lors du prélèvement d'AChE, il faut éviter d'agiter le prélèvement afin de prévenir l'hémolyse et le délai entre le prélèvement et le dosage ne doit pas être trop long (< 48 heures). Le prélèvement sera conservé dans un endroit sec à l'abri de la lumière.
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Historique
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