Perturbations métaboliques suite à l'exposition gestationnelle aux retardateurs de flamme organophosphorés : biochimie sanguine et profils en acides gras.

Les retardateurs de flamme organophosphorés (RFOPs), notamment le phosphate de triphényle (TPhP) et le phosphate de tricrésyle (TCP), sont incorporés dans une grande variété de polymères pour leur conférer une résistance au feu. Ils sont donc présents dans de nombreux appareils électriques et électroniques industriels et grand public, dans les matériaux de construction, les meubles et les textiles. L'exposition professionnelle a été démontrée par la présence de RFOPs dans les usines de traitement des déchets d'équipements électriques et électroniques et dans les zones de maintenance des avions. Les profils toxicologiques de ces produits chimiques ont suscité des inquiétudes quant à leurs effets sur le développement de l’axe reproducteur masculin et le métabolisme des lipides.
Des rats femelles Sprague-Dawley ont été exposées par gavage à des doses croissantes de TPhP ou de TCP du 12ème au 19ème jours de gestation. Des organes et liquides biologiques ont été prélevés sur les mères et les fœtus. La physiologie maternelle a été analysée par le biais du gain poids gestationnel, de la biochimie sanguine et des concentrations et profils d'acides gras dans le foie et les glandes surrénales. La production de testostérone fœtale a été mesurée. L'expression des gènes impliqués dans le métabolisme du cholestérol et des acides gras dans les foies et les surrénales maternels et fœtaux a été analysée.
Le TPhP a provoqué de légères perturbations dans l'organisme maternel uniquement à la dose la plus élevée, avec une diminution du gain de poids pendant la gestation, une perturbation mineure de l'expression des gènes métaboliques dans les organes maternels, mais aucun effet sur la production de testostérone chez le fœtus. Le TCP a démontré des capacités de perturbation endocrinienne et métabolique plus importantes, induisant à la dose la plus élevée une toxicité maternelle et une toxicité fœtale, avec une diminution de la production de testostérone et une augmentation du stockage des lipides dans le foie fœtal, ainsi qu'une perturbation dose-dépendante de l'expression des gènes métaboliques.
Ces résultats donnent un nouvel éclairage sur les propriétés toxicologiques des RFOPs grâce à des mécanismes d'action différents via des perturbations endocrinienne et métabolique. Par ailleurs, les salariés sont exposés à des mélanges, il pourrait donc être pertinent de déterminer, par une étude de terrain, si des modifications métaboliques sont également observables chez ces salariés exposés aux RFOPs et les conséquences sur leur santé.