Accès rapides :

Vous êtes ici :

  1. Accueil
  2. Publications et outils
  3. Bases de données
  4. Fiches toxicologiques
  5. White-Spirit (FT 94) (rubrique sélectionnée)

White-Spirit

Fiche toxicologique n° 94

Sommaire de la fiche

Édition : 1998

Pathologie - Toxicologie

  • Toxicocinétique - Métabolisme [6]

    Les white-spirit sont facilement absorbés par inhalation.  Ils sont distribués chez l'animal dans le sang, le tissu adipeux, les reins, le foie et le cerveau et sont éliminés dans l'air expiré et l'urine.

    Chez l'animal
    Absorption

    Les white-spirit sont facilement absorbés par inhalation. L'étude de leur toxicociné­tique est rendue complexe par la présence de nombreux produits chimiques ; le pour­centage de chaque composé et ses proprié­tés physico-chimiques affectent fortement la toxicocinétique d'absorption.

    Chez l'animal, les composés saturés (hydrocarbures aliphatiques et alicycliques) sont moins absorbés par le tractus respira­toire que les composés insaturés (alcènes et hydrocarbures aromatiques), les chaînes ramifiées moins que les chaînes linéaires et les n-alcanes de faible taille moléculaire moins que ceux de plus grande taille.

    Chez l'homme, exposé à une concentra­tion de vapeur de 190 ppm (1000 mg/m3), 59 % des hydrocarbures aliphatiques et alicy­cliques et 70 % des hydrocarbures aroma­tiques sont absorbés dans les 30 minutes. Si l'exposition a lieu pendant un exercice, la quantité absorbée augmente en raison de l'accroissement de la ventilation pulmonaire. L'état d'équilibre dans l'air alvéolaire est atteint en 20 min au repos et en 1h30 en cours d'exercice. A l'équilibre, l'air alvéolaire contient 31,6 à 33,6 % de la concentration d'exposition en aliphatiques et 8 à 11,5 % de la concentration d'exposition en aroma­tiques, quels que soient les niveaux d'expo­sition (34 à 400 ppm). Lors d'une exposition à une concentration de 100 ppm, 6 h/j, pendant 5 jours, la concentration sanguine passe de 2 mg/L (jour 1) à 2,54 mg/L (jour 5), témoin d'une légère accumulation pendant les 5 jours d'exposition.

    Le passage transcutané, mesuré in vitro, est directement proportionnel à la solubilité aqueuse des composés. Il n'y a pas de don­nées quantitatives sur l'absorption orale ou cutanée des white-spirit chez l'homme ou l'animal.

    Distribution

    Après absorption, les white-spirit sont distribués chez l'animal dans le sang, le tissu adipeux, les reins, le foie et le cerveau.

    La présence de white-spirit dans le tissu adipeux a été montrée chez l'homme exposé à 100 ppm, à raison de 6 h/j, pendant 5 jours. Ils s'y accumulent graduellement pendant l'exposition avec une phase de redistribu­tion. Le coefficient de partage tissu adi­peux/sang a été estimé à 47. La durée de la phase de redistribution est de 20 h environ et la demi-vie des white-spirit dans les graisses de 46 à 48 h. Les white-spirit pas­sent aussi dans le cerveau.

    Métabolisme

    La transformation des white-spirit est peu connue. Les études chez l'animal ont été effectuées avec leurs composants pris indivi­duellement. Les hydrocarbures aliphatiques sont oxydés en alcools correspondants par les mono-oxygénases. Les alcanes mono- ou polycycliques sont oxydés en alcool, voire en aldéhyde/cétone ou acide carboxylique puis conjugués à l'acide glucuronique ou aux sul­fates. Les alkylbenzènes sont oxydés en alcools sur la partie alkyle par le système mono-oxygénase à cytochrome P450 ; une oxydation directe du noyau aromatique peut parfois se produire ; l'alcool est soit conjugué à l'acide glucuronique ou aux sulfates soit oxydé en aldéhyde/cétone ou acide carboxylique qui peuvent alors être conjugués.

    Excrétion

    Les white-spirit absorbés sont éliminés dans l'air expiré et l'urine. En raison de leur forte tension de vapeur et de leur faible coef­ficient de partage sang/air, les composés aliphatiques de faible taille moléculaire et les composés alicycliques sont éliminés dans l'air expiré. Chez le lapin l'expiration représente 25 à 35 % des composés alipha­tiques et 15 % des composés alicycliques absorbés ; chez l'homme (100 ppm, 7 h), l'air expiré contient 12 % des composés alipha­tiques absorbés, 10 min après l'exposition et 2 %, 16 h après la fin de l'exposition. Les métabolites sont éliminés principalement dans l'urine; les métabolites volatils peu­vent être exhalés.

  • Mode d'actions
  • Toxicité expérimentale
    Toxicité aiguë [6-8]

    Les white-spirit sont peu toxiques après exposition aiguë. Ils entraînent un effet dépresseur du système nerveux central et une irritation (ORL et oculaire) par inhalation et pour la peau et les yeux (test de Draize chez le lapin). Les white-spirit ne sont pas sensibilisants pour le cobaye.

    Les white-spirit sont peu toxiques pour l'animal après exposition aiguë. La DL50 est supérieure à 5000 mg/kg chez le rat par voie orale, supérieure à 3160 mg/kg chez le lapin par voie cutanée et la CL50 est supérieure à 12 mg/l chez le rat, la souris et le cobaye par inhalation (4 h).

    Les symptômes reflètent une dépression du système nerveux central (hypoactivité, ataxie, légère perte de coordination, modifica­tions mineures du comportement) et une irri­tation après exposition par voie inhalatoire (saignements des narines, irritation oculaire).

    Dans le test de Draize, les white-spirit sont légèrement à sévèrement irritants pour la peau du lapin selon la dose (200 à 2000 mg/kg) et peu ou pas irritants pour les yeux (0,1 mL). Une baisse de 50 % de la fréquence respiratoire est obtenue chez la souris après une exposition à une concentration de 4400 mg/m3 (770 ppm) pendant 1 min.

    Les white-spirit ne sont pas sensibili­sants pour le cobaye (test de Buehler).

    Toxicité subchronique, chronique [6, 7]

    Une exposition prolongée peut entraîner par voie orale, des effets hématologiques et hépatiques (rat) et par voie cutanée des effets hépatiques (lapin). Chez le rat, un effet neurotoxique est observé et une néphropathie non extrapolable à l’Homme chez le mâle seulement.

    Une exposition orale prolongée (500 - 2500­ - 5000 mg/kg par gavage, 7 j/sem, 13 sem) induit chez le rat une baisse de poids corpo­rel, une modification des paramètres san­guins ou sériques (numération plaquettaire, glucose, urée, cholestérol, alanine aminotransférase, bilirubine, gamma-glutamyltransférase) une augmentation du poids relatif du foie, des reins et des surrénales, une hyper­trophie hépatocellulaire et des lésions rénales (gouttelettes hyalines). Tous les effets sont réversibles après 4 semaines de récupération.

    Par voie cutanée, on observe uniquement une réduction du gain de poids (mâles et fe­melles) et des lésions hépatiques (femelles) chez le lapin (2000 mg/kg, 3 j/sem, 28 j) ainsi qu'une augmentation du poids des reins chez le rat mâle (300 ppm, 6 h/j, 5 j/sem, 90 j).

    Lors d'une exposition de longue durée par voie respiratoire de cinq espèces diffé­rentes, les cobayes se sont révélés être l'es­pèce la plus sensible. Après 90 jours d'expo­sition à des concentrations de 363 mg/m3 (70 ppm environ) la mortalité augmente ; l'exa­men post-mortem a mis en évidence une irritation pulmonaire.

    Chez le rat, on observe un effet neuro­toxique :

    • réduction de la vitesse de conduction nerveuse au niveau de l'axone des nerfs de la queue (4800 mg/m3 - 900 ppm environ - 8 h/j, 26 sem) ; les tests neurocomportemen­taux indiquent des effets légers observés exclusivement immédiatement après l'expo­sition quotidienne,
    • augmentation du taux de catécholamines et de sérotonine cérébrales et dimi­nution du contenu en protéines des synaptosomes (2290 et 4580 mg/m3, resp. env. 400 et 800 ppm, 6 h/j, 6 mois) ; les tests neuro­comportementaux n'ont pas mis d'effet en évidence,
    • modification des potentiels évoqués sensoriels dans le cerveau, mesurés 2 mois après une exposition au white-spirit désaromatisé (2339 et 4679 mg/m3, resp. 400 et 800 ppm, 6 mois) ; une exposition de 3 semaines à ce même solvant accroît la teneur des tis­sus cérébraux en espèces oxygénées réac­tives.

    Les white-spirit induisent, chez le rat mâle seulement (400 et 800 ppm, 6 h/j, 5 j/sem, 12 sem), une néphropathie dite «à α2u-globuline», mise en évidence par une augmentation de poids des reins, des modifications fonc­tionnelles (augmentation du volume urinaire et du contenu de l'urine en glucose, protéines et cellules épithéliales) et des modifications structurelles de nature focale (dilatation des tubules qui contiennent des cylindres pro­téiques, gouttelettes hyalines dans l'épithé­lium tubulaire proximal, régénération de l'épi­thélium du cortex rénal). Cette néphropathie à α2u-globuline est spécifique du rat mâle et est observée lorsqu'il est exposé à de nom­breux hydrocarbures ; son mécanisme de sur­venue n'est pas extrapolable à l'homme.

    Effets génotoxiques [6]

    Les études retrouvées ne permettent pas de conclure chez l’animal sur la toxicité pour la reproduction des white-spirit.

    Un certain nombre de tests de génotoxici­té in vitro et in vivo (tests sur Salmonella typhimurium et Saccharomyces cerevisiae, test de mutation sur cellules de lymphome murin, tests d'échanges entre chromatides sœurs sur lymphocytes humains, tests cyto­génétiques sur moelle osseuse de rat, test du micronoyau sur moelle osseuse de sou­ris, tests de létalité dominante sur souris et rat) ont donné des résultats négatifs.

    Effets sur la reproduction [6, 7]

    Les études retrouvées ne permettent pas de conclure chez l’animal sur la toxicité pour la reproduction des white-spirit.

    Les études de la toxicité des white-spirit pour la reproduction conduisent à un résul­tat négatif mais les données sont insuffi­santes pour une évaluation complète. Aucun effet n'est observé chez le rat sur les mères et les fœtus jusqu'à une concentra­tion de 2400 mg/m3, 6 h/j, 6e au 15e jour de gestation ; une exposition à une concentra­tion de 5700 mg/m3, 6 h/j, 3e au 20e jour de gestation, provoque une toxicité maternelle (baisse de poids et irritation oculaire) et une toxicité fœtale (baisse de poids, retard d'os­sification et apparition de côtes supplémen­taires) qui pourrait résulter de la toxicité maternelle.

  • Toxicité sur l’Homme

    La toxicité aiguë est semblable à celle des autres hydrocarbures pétroliers liquides distillant à des températures inférieures à 300°C (irritation et dépression du système nerveux central). La toxicité à terme est modérée, avec des effets similaires aux autres solvants. Il s’agit essentiellement d’une irritation (cutanée, oculaire, respiratoire) et d’une dépression du système nerveux central. Même si plusieurs études montrent un excès de cancers chez des travailleurs exposés aux white-spirit, les données observées ne permettent pas de conclure à une relation causale avec l’exposition aux white-spirit. Aucune étude portant sur la reprotoxicité potentielle des white-spirit pris isolément n’est disponible à la date de publication de cette fiche toxicologique.

    Toxicité aiguë [6, 9]

    La toxicité aiguë des white-spirit est com­mune à celle des autres hydrocarbures pétroliers liquides distillant à des tempéra­tures inférieures à 300 °C ; ils sont irritants et dépresseurs du système nerveux central.

    Plusieurs cas d'intoxications aiguës secondaires à une inhalation, ingestion et/ou contamination cutanée ont été décrits.

    Lors d'expositions professionnelles, l'in­halation de vapeurs de white-spirit peut pro­voquer des signes d'irritation oculaire (lar­moiement, conjonctivite), nasale et/ou pul­monaire à partir de 100 ppm.

    Les effets essentiels des white-spirit sont neurologiques. Une baisse de la sensation olfactive peut être observée à partir de 24 ppm pour une exposition de 15 minutes (le seuil de détection olfactive est très bas de l'ordre de 0,4 ppm) ; elle peut s'associer à une sensation de malaise autour de 150 ppm ; ces symptômes étant réversibles à l'arrêt de l'ex­position. D'autres symptômes à type de céphalées, de sensations vertigineuses ou ébrieuses peuvent apparaître dès 100 ppm (exposition 7 heures), parfois associés à des nausées et vomissements, voire à une somnolence ou à des signes d'irritabilité. Lors de très fortes expositions, des troubles de conscience peuvent survenir. Une altération des fonctions psychomotrices (notamment dextérité, mémoire), variable en fonction de la durée et de l'intensité de l'exposition, est fréquemment décrite : elle peut survenir à partir de 50 ppm (exposition 7 heures) [9].

    En cas de contact cutané direct ou par l'intermédiaire de vêtements souillés ou lors de projections, peuvent apparaître des signes d'irritation cutanée (à type d'érythè­me, œdème, prurit) ou oculaire (larmoie­ment, conjonctivite) de gravité variable.

    L'injection accidentelle sous pression de produits contenant des solvants du type white-spirit est la cause de lésions doulou­reuses très étendues avec des nécroses cutanée, sous cutanée et/ou tendineuse.

    L'ingestion accidentelle est susceptible d'entraîner des signes d'irritation digestive (douleurs abdominales, nausées, vomisse­ments, puis diarrhées), voire des lésions plus sévères de la muqueuse intestinale (ulcérations) lors d'ingestion massive. Une dépression du système nerveux central (syndrome ébrieux puis troubles de conscience) peuvent également survenir. La sévérité des symptômes dépend essentiel­lement de l'éventuelle aspiration pulmonaire du white-spirit, réalisant une pneumopathie d'inhalation dont les premiers signes, appa­raissant dans les 8 heures suivant l'accident, sont radiologiques (opacités floconneuses localisées le plus souvent aux lobes moyen et inférieur droits) ; les signes cliniques sont plus tardifs : toux, dyspnée, fièvre, le plus souvent régressifs en 2 à 3 jours, en l'absence de surinfection.

    Toxicité chronique [6, 9-12]

    D'une façon générale, la toxicité à terme des white-spirit est modérée. Les white-spi­rit n'entraînent pas d'effet spécifique qui les distingue des autres solvants.

    Lors d'expositions chroniques ont été décrits le plus souvent des signes d'irrita­tion cutanée, oculaire et/ou respiratoire mais aussi des symptômes variés à type de céphalées, perte d'appétit, asthénie, sensa­tion ébrieuse, nausées ; ces symptômes sont, au moins au début, réversibles à l'arrêt de l'exposition.

    Le syndrome psycho-organique, à un stade réversible ou irréversible, est l'effet toxique chronique majeur des white-spirit. Il associe des effets neurologiques centraux à type de troubles du sommeil, de la concen­tration, de la mémoire, de la personnalité, d'irritabilité, voire des diminutions des per­formances intellectuelles ; ces troubles ont été rapportés le plus souvent pour des durées d'exposition supérieures à 10 ans et parfois pour des expositions faibles (40 ppm) mais il n'est pas possible d'établir une relation dose-effet. Ces symptômes ne sont que partiellement réversibles à l'arrêt de l'exposition. Des anomalies de l'électroen­céphalogramme ou des débits sanguins cérébraux, voire une atrophie cérébrale ont également été rapportées chez des peintres exposés principalement aux white-spirit pendant plus d'une vingtaine d'années. Ce syndrome psycho-organique a été surtout décrit lors d'expositions associées à d'autres solvants. Il est souvent difficile d'établir une relation dose-effet, en l'absen­ce d'information précise sur les niveaux d'exposition [6, 12, 13].

    Aucune étude épidémiologique établis­sant une neurotoxicité périphérique des white-spirit utilisés seuls n'a été retrouvée.

    Des cas de glomérulopathies aux solvants ont été rapportés dont certaines sont attri­buées aux white-spirit. Une gloméruloné­phrite diffuse avec nécrose focale (avec pré­sence d'anticorps antimembrane basale) a été observée chez un patient de 29 ans expo­sé 6 h/j, pendant un an au Solvant Stoddard (white-spirit) utilisé pour le nettoyage de voi­tures sans aucune protection [10]. Une étude prospective cas-témoins chez 248 tra­vailleurs de l'industrie automobile n'a pas permis de retrouver de relation entre l'expo­sition à une coupe naphténique (de même composition que les white-spirit) à des concentrations de 6 à 790 mg/m3 et l'excré­tion urinaire de 4 paramètres de la fonction rénale mesurés deux fois, à un an d'interval­le (protéines totales, albumine, ß2-microglobuline, N-acétyl-D-glucosaminidase) [11]. D'autres études chez des sujets exposés à de faibles concentrations de white-spirit n'ont pas mis en évidence d'atteinte rénale infraclinique imputable au solvant [6].

    Quelques cas, rares et anciens, d'anémie aplasique ont été décrits lors d'exposition aux white-spirit : la relation avec l'exposition n'a pas été clairement établie [6].

    Les white-spirit sont responsables par action dégraissante de dermatoses d'irrita­tion, desséchantes et parfois fissuraires de la peau lors de contacts répétés.

    Effets cancérogènes [6]

    Plusieurs études épidémiologiques chez des travailleurs potentiellement exposés aux white-spirit (peintres, ouvriers de la fabrica­tion des peintures) ont été retrouvées : un excès de cancers (tous cancers confondus, mais aussi cancers bronchopulmonaires) est noté de façon constante, voire dans cer­taines études des cancers de l'estomac, de l'œsophage et de la vessie et des leucémies. Cependant dans aucune de ces études, il n'est possible de faire de relation directe avec l'exposition aux white-spirit seuls.

    Effets sur la reproduction [6]

    Plusieurs publications concernant les effets sur la reproduction chez l'homme ont été retrouvées, mais aucune distinction entre les différents types de solvants n'a été faite et aucune ne concerne les white-spirit pris isolément.

  • Interférences métaboliques
  • Cohérence des réponses biologiques chez l'homme et l'animal
EN SAVOIR PLUS SUR LES FICHES TOXICOLOGIQUES