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Dioxyde de carbone

Fiche toxicologique n° 238

Sommaire de la fiche

Édition : Juin 2020

Pathologie - Toxicologie

  • Toxicocinétique - Métabolisme [25, 26]

    Le dioxyde de carbone pénètre et est éliminé par inhala­tion ; il diffuse librement à travers la membrane alvéolaire vers le sang où il provoque une acidose respiratoire.

  • Mode d'actions
  • Toxicité expérimentale
    Toxicité expérimentale

    Le dioxyde de carbone est un gaz asphyxiant à partir de 30 % chez le rat ; sa diffusion très aisée à travers les mem­branes tissulaires est responsable de la rapidité d’appari­tion des effets sur le pH sanguin, les poumons, le cœur et le système nerveux central.

    Aiguë et subchronique [26]

    L’effet le plus important du CO2 s’exerce sur l’équilibre acide/base et les électrolytes. La période d’acidose non compensée est caractérisée, chez le cobaye (15 % CO2, 73 j), par une baisse du pH extracellulaire et urinaire, de la concentration plasmatique en phosphore inorganique, de l’excrétion pulmonaire de CO2 et de l’excrétion urinaire de bicarbonates, et par une augmentation de la concentra­tion plasmatique de calcium et de l’excrétion urinaire de phosphore. Pendant la période de compensation, le pH extracellulaire retourne à la valeur normale, le taux de cal­cium plasmatique reste élevé et le taux de phosphore inorganique reste faible pendant 20 jours. Cet effet sur le calcium et le phosphore inorganique, associé à une calcification rénale, suggère une stimulation de la para­thyroïde. Chez le rat (15 %, 11 j), on observe une augmen­tation de l’excrétion urinaire d’ions NH4+ et d’acides. À fortes concentrations, l’acidose respiratoire se développe plus rapidement et est compensée plus vite par des méca­nismes homéostatiques (tampons sanguins, modifica­tions respiratoires et compensation rénale) qu’à des concentrations plus faibles.

    Les conséquences d’une exposition au CO2 sur le système nerveux central sont immédiates à forte concentration: excitation psychomotrice, inconscience et convulsions. Chez le singe, une stimulation de la zone corticale et sub­corticale, accompagnée d’une augmentation de l’activité hypothalamique, a été montrée pour une exposition de 10 minutes à 30 % de CO; si la concentration augmente, il apparaît un effet dépressif mis en évidence par une élé­vation du seuil de stimulation du cortex moteur.

    Les effets pulmonaires semblent dus à l’acidose induite, plutôt qu’à une action directe du CO2. Ils sont immédiats et apparaissent à concentration plus faible que ceux sur le système nerveux central : accroissement de la ventilation­ minute, de la fréquence respiratoire, du volume courant et diminution de la conduction des voies respiratoires à par­tir d’une concentration de 5 %. La combinaison de ces effets peut entraîner une dyspnée, l’apparition d’une aci­dose respiratoire non compensée accompagnée d’œdème pulmonaire (rat, réversible en 7 j, et cobaye), de perte de surfactant entraînant une nécrose des cellules épithéliales bronchiolaires et d’atélectasie (affaissement des alvéoles pulmonaires, cobaye). Chez le singe, on note une stimula­tion de la fréquence respiratoire jusqu’à une concentra­tion de 10 %, puis une dépression jusqu’à la mort de l’animal à un taux de CO2 supérieur à 50 %. La survie à des concentrations élevées est possible si l’exposition est pro­gressive (augmentation de 0,12 à 0,5 % par min) et si le retour à l’air normal se fait par une diminution progressive de la concentration de CO2 (1 à 2 % par min).

    Une réponse biphasique du même type a été observée sur le système cardiovasculaire du singe et du chien: aug­mentation de la fréquence cardiaque jusqu’à 10 % de CO2 puis diminution jusqu’à 35 - 40 % et arrêt cardiaque à des concentrations supérieures. Si la concentration de CO2 est augmentée progressivement, le singe survit jusqu’à 51 % de CO2. Le retour à l’air normal doit être progressif sous peine de troubles du rythme cardiaque, qui peuvent être mortels en 2 à 10 minutes. Une étude similaire chez le rat révèle des arythmies pendant l’exposition (50 - 70 % de CO2) qui s’amplifient si la correction de l’anomalie est trop rapide.

    Une induction de l’activité des surrénales est mise en évi­dence par une excrétion augmentée d’adrénaline, de noradrénaline, de 17-OH-corticostéroïdes et de catécholamines plasmatiques à des concentrations de CO2 supé­rieures à 6 %. Des concentrations narcotiques (30 % dans l’air, 10 min) induisent chez le rat et le cobaye une baisse du cholestérol surrénalien et du nombre de lymphocytes et une augmentation du nombre d’éosinophiles et du poids des surrénales. En cas d’hypercapnie prolongée (cobaye, 15 %, 7 j), la stimulation corticale surrénalienne a lieu pendant la période d’acidose non compensée et disparaît avec la compensation. Si l’exposition est inter­mittente, il n’y a pas de compensation de l’acidose et pas de baisse de la réponse sympathosurrénalienne. La réponse de stress à l’hypercapnie représenterait donc un effet non spécifique dépendant du pH sanguin.

    Le développement d’une tolérance a été observé lors d’ex­positions prolongées ; celle-ci se manifeste par une ampli­fication de l’efficacité respiratoire, qui aboutit à une meilleure absorption d’oxygène et une excrétion de dioxyde de carbone plus efficace, et une normalisation de la fréquence cardiaque après une tachycardie initiale [26].

    Le dioxyde de carbone gazeux n’est pas irritant pour la peau ; sous forme solide (carboglace) ou liquide, il peut provoquer des gelures cutanées ou oculaires [27].

    Effets cancérogènes [26]

    Une seule étude suggère un effet cancérogène de la car­boglace par voie cutanée chez la souris. 

    La carboglace uti­lisée dans un test d’irritation chronique (déposée tous les jours sur la peau abrasée) provoque une irritation locale avec épaississement de la peau au site d’exposition, des papillomes (87 %) après 3 semaines et des carcinomes (7 %) après 240 jours. Les auteurs imputent ce développe­ment à l’effet non spécifique d’un irritant froid. 

    II n’y a pas d’étude par inhalation.

    Effets sur la reproduction [26]

    Le dioxyde de carbone induit, chez le rat mâle, des modifica­tions testiculaires sans effet sur la fertilité, et des modifica­tions cardiaques et squelettiques chez le fœtus.

    Chez le rat, le dioxyde de carbone induit suivant la concen­tration (2,5 - 5 - 10 % CO2 + 20 % O2 + azote qsp 100 %) et de la durée de l’exposition (1 à 8 h), des modifications dégé­nératives des testicules. Les effets histologiques majeurs sont des perturbations tubulaires : desquamation et perte de netteté luminale à partir de 5 % pendant 4 heures, sillons et vacuolisation à partir de 10 % pendant 4 heures. Ces modifications sont réversibles 36 heures après l’arrêt de l’exposition. Chez la souris (35 %, 3 fois 2 h), il affecte la maturation des spermatozoïdes en diminuant la surface de la tête ; il n’y a pas de corrélation établie avec une baisse de la fertilité.

    Le dioxyde de carbone entraîne des malformations fœta­les chez le rat (6 % CO2 + 20 % O2 + 74 % N2 pendant 24 h entre le 5e et le 21e jour de gestation) et le lapin (10 - 13 % CO2, 4 à 10 h, pendant 2 ou 3 j entre le 7e et le 12e jour de gestation). Chez le rat, il augmente la mortalité post­natale, les malformations cardiaques et celles du sque­lette. La plus forte incidence est observée après exposition des mères pendant le 10e jour de gestation. Chez le lapin, le dioxyde de carbone induit des malformations squelet­tiques assez diversifiées.

  • Toxicité sur l’Homme

    L’exposition à de fortes concentrations est rapidement mortelle. Les effets sont d’abord une augmentation de l’amplitude et de la fréquence respiratoire, puis cardiovasculaires et vasomoteurs pour évoluer vers des troubles neurologiques graves (convulsion, coma). L’inhalation peut causer une bronchodilatation chez l’asthmatique en crise. A basse température, le contact avec le dioxyde de carbone peut provoquer des brûlures (neige carbonique). Les expositions prolongées peuvent provoquer des signes respiratoires, cardiovasculaires et neurologiques, sans modification des performances psychomotrices. Il n'y a pas de données sur d'éventuels effets cancérogènes ou toxiques pour la reproduction.

    Les effets sur l’Homme du dioxyde de carbone ont été lar­gement étudiés, du fait des nombreuses circonstances d’intoxications par ce gaz, normalement présent en faible concentration dans l’atmosphère.

    Toxicité aiguë [3, 6]

    À forte concentration, le dioxyde de carbone est principa­lement un gaz asphyxiant qui peut entraîner la mort. L’im­portance des effets observés dépend de la concentration dans l’atmosphère et de nombreux facteurs physiolo­giques (âge du sujet, état vasculaire...) ou climatiques (température extérieure, pression en oxygène.).

    Les premières manifestations apparaissent lors de l’inhala­tion d’une atmosphère contenant 2 % de CO2; elles se tra­duisent par une augmentation de l’amplitude respiratoire.

    • À partir de 4 %, la fréquence respiratoire s’accélère et la respiration peut devenir pénible chez certains sujets.
    • À partir de 5 %, s’y ajoutent des céphalées, une sensa­tion de vertige ainsi que les premiers effets cardiovascu­laires et vasomoteurs (augmentation de la fréquence cardiaque et de la pression artérielle, vasodilatation péri­phérique).
    • À 10 %, on peut observer des troubles visuels (parfois associés à une dégénérescence rétinienne), des tremble­ments, une hypersudation et une hypertension artérielle avec perte de connaissance, chez certains sujets, si l’expo­sition dure une dizaine de minutes.
    • Lorsque l’on avoisine 20 %, des troubles graves d’appari­tion rapide peuvent survenir: dépression respiratoire, convulsion, coma et mort. Ces intoxications peuvent se compliquer d’une lyse musculaire. Il existe de nombreux cas de morts accidentelles brutales, liés à l’inhalation de fortes concentrations de CO2 accumulé dans des lieux confinés (silos, caves) ou à des catastrophes environne­mentales.

    L’inhalation de concentrations comprises entre 2 et 10 % peut entraîner une bronchodilatation chez l’asthmatique en crise.

    On n’oubliera pas que le contact avec du CO2 à très basse température (neige carbonique) peut provoquer des brû­lures, avec phlyctènes sur la peau.

    Toxicité chronique [6, 28, 29]

    Les effets d’une exposition prolongée au CO2 ont été étu­diés pour évaluer la tolérance des sujets à des séjours en espace confiné (sous-marins, par exemple). Les données existantes concernent des expositions expérimentales de volontaires à des concentrations assez élevées: 0,5 à 4 % avec une pression partielle d’oxygène normale.

    • Pour des concentrations inférieures à 1 %, les variations des paramètres biologiques ne sont pas significatives.
    • À partir de 1 %, on note une légère augmentation de la pression de CO2 artérielle ainsi que de la pression partielle en oxygène en raison d’une hyperventilation.
    • À partir de 2 %, l’augmentation de la pression partielle de CO2 dans le sang artériel et l’air expiré s’accentue ; elle est associée à une faible diminution du pH, sans autre anomalie notable.
    • À partir de 3 %, l’hyperventilation est marquée ainsi que la baisse du pH artériel (acidose respiratoire).
    • À 4 %, on constate de plus l’apparition de céphalées et de gastralgies au repos, d’asthénie et d’extrasystoles à l’effort. Une augmentation du nombre d’hématies est également notée, peut-être en relation avec une hémo­concentration liée à une polyurie hydrique au cours des 24 premières heures d’exposition.
    • Au-delà, le seuil de tolérance est clairement dépassé.

    Dans aucun de ces cas, des modifications des performan­ces psychomotrices n’ont été mises en évidence.

    Des observations anciennes d’exposition dans des sous-marins de la Seconde Guerre mondiale dans lesquels la concentration en CO2 était de l’ordre de 3 %, associée à un taux d’oxygène de 15 à 17 %, faisaient état de phases d’ex­citation et de dépression, d’une augmentation du flux sanguin cutané ainsi que d’une diminution de la tempéra­ture centrale et de la pression artérielle. Ces signes pou­vaient s’associer à un ralentissement de la fréquence respiratoire et à des anomalies des fonctions mentales. Ces résultats, peut-être en relation avec d’autres polluants atmosphériques, n’ont pas été rapportés ultérieurement.

    Dans une étude, on rapporte des altérations de la vision des couleurs (axe vert) qui n’ont jamais confirmés par la suite [30].

    Il n’y a pas de données concernant un effet cancérogène ou toxique pour la reproduction, lors d’expositions chro­niques professionnelles à du dioxyde de carbone.

  • Interférences métaboliques
  • Cohérence des réponses biologiques chez l'homme et l'animal
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