Accès rapides :

Vous êtes ici :

  1. Accueil
  2. Publications et outils
  3. Bases de données
  4. Fiches toxicologiques
  5. Isoproturon (FT 283) (rubrique sélectionnée)

Isoproturon

Fiche toxicologique n° 283

Sommaire de la fiche

Édition : 2011

Pathologie - Toxicologie

  • Toxicocinétique - Métabolisme [2, 5, 6]

    Absorbé rapidement par voie digestive, l’isoproturon est largement distribué dans l’organisme puis éliminé en grande partie en 24 heures sous forme de métabolites dans les urines.

    Chez l'animal
    Absorption

    Chez le rat, l'absorption orale de l'isoproturon après admi­nistration unique par gavage de 50 mg/kg est rapide et importante (90 %). Ce degré d'absorption est peu modifié lors d'administration unique d'une forte dose (500 mg/kg) ou lors d'administration répétée (50 mg/kg pendant 14 jours).

    Distribution

    Chez le rat, après une administration orale de 14C] isoproturon (marquage sur le carbone du groupe carbonyle de l'urée), la distribution est large dans tout l'organisme avec des concentrations plus importantes dans le sang, le foie et les reins. La distribution n'est pas affectée par la dose administrée ni par la fréquence (dose unique ou répétée).

    168 heures après l'administration, la radioactivité retrouvée dans tous les organes n'excède pas 0,6 % de la radioactivité administrée.

    Une administration répétée n'entraîne pas d'accumula­tion.

    Métabolisme

    Chez le rat, le métabolisme de l'isoproturon est très important. La molécule parente n'est pas retrouvée dans les urines.

    Les métabolites principaux résultent d'une oxydation du groupement isopropyl et d'une N-déméthylation.

    Lors d'administration orale, aucune réaction de conjugai­son (glucuro- ou sulfo-conjugaison) n'intervient dans le métabolisme de l'isoproturon.

    Aucun clivage de la liaison amide n'a été identifié et l'ab­sence de dérivés de l'aniline parmi les métabolites a clai­rement été démontrée.

    Excrétion

    L'élimination est rapide, elle est complète 3 jours après l'administration.

    La plus grande partie est éliminée en 24 heures principale­ment dans les urines (> 85 %) sous forme de métabolites.

    Surveillance Biologique de l'exposition

    Le dosage urinaire de la 1-[4-(1-hydroxy-1-méthyléthyl)phényl]-3-méthylurée (un des métabolites de l'isoprotu­ron) a été effectué chez les sujets exposés lors de l'acci­dent industriel survenu en 1996 (cf. paragraphe Toxicité aiguë chez l'homme). Le seuil de concentration limite était fixé à 1 mg/L pour la surveillance professionnelle ; la valeur la plus élevée a été retrouvée à 3,2 mg/L, sans signes cliniques ni biologiques.

  • Mode d'actions
  • Toxicité expérimentale
    Toxicité aiguë [2, 5-7]

    L’isoproturon présente une faible toxicité aiguë. Il n’est pas irritant pour la peau et les yeux et n’est pas sensibilisant par voie cutanée.

    Toxicité systémique

    De nombreuses études de toxicité aiguë ont été réalisées. Les DL50 par voie orale de l'isoproturon chez le rat et la souris sont supérieures à 2 000 mg/kg. Chez le chien, aucune mortalité n'a été observée après une administra­tion unique de 1 000 mg/kg (dose maximale testée). Les signes cliniques observés ne sont pas spécifiques.

    Les DL50 par voie cutanée chez le rat, le lapin et le cobaye sont supérieures à 2 000 mg/kg. À cette dose, ni mortalité ni effet délétère systémique n'ont été observés.

    La CL50 de l'isoproturon chez le rat, pour une exposition corps entier de 4 heures est supérieure à 1,95 mg/L (concentration maximale atteignable). À cette dose, ni mortalité ni effet délétère systémique n'ont été observés.

    Irritation

    L'isoproturon n'est irritant ni pour la peau ni pour les yeux du lapin.

    Sensibilisation cutanée

    L'isoproturon n'est pas sensibilisant pour la peau chez le cobaye dans un test de Magnusson et Kligman.

    Toxicité subchronique, chronique [2, 5, 6]

    La toxicité de l’isoproturon lors d’exposition répétée par voie orale a été testée chez les rongeurs, le chien et le singe. Les organes cibles principaux sont le foie (induction enzy­matique, hépatomégalie, modifications histologiques) et le sang (anémie hémolytique).

    De nombreuses études subchroniques, par administration orale, ont été réalisées via l'alimentation chez les rats et le chien et par gavage chez le singe.

    Une anémie hémolytique (associée à une méthémoglobi­némie et caractérisée par des corps de Heinz, une hyper­plasie médullaire, une hématopoïèse extra-médullaire et une augmentation de l'hémosidérine dans le foie, les reins et la moelle osseuse) est observée à partir de 800 ppm chez le rat, 500 ppm chez le chien et 150 mg/kg pc/j chez le singe.

    Les lésions hépatiques (augmentation du poids, prolifé­ration des canalicules biliaires, dégénérescence des hépa­tocytes, foyers basophiles) sont associées à une augmentation de l'activité enzymatique (phosphatases alcalines, ALAT, ASAT) et une réduction des protéines totales ou de l'albumine.

    L'inclusion de groupes satellites dans ces études a permis de mettre en évidence la réversibilité de ces effets.

    Les doses sans effet toxique pour une exposition de 90 jours sont de 80 ppm (5,6 mg/kg pc/j) chez le rat, de 50 ppm (3 mg/kg pc/j) chez le chien et de 50 mg/kg pc/j chez le singe.

    Des études chroniques par voie orale ont été réalisées chez les rongeurs.

    Chez le rat, l'isoproturon administré vie durant via l'ali­mentation, aux doses de 0, 80, 400 et 2 000 ppm provoque à partir de 400 ppm des effets hépatiques (augmentation du poids de l'organe associée à des modifications histolo­giques) et une baisse de l'hémoglobine. À 2 000 ppm, il est de plus noté une baisse du gain de poids corporel, une augmentation des transaminases, des phosphatases alca­lines et du cholestérol. La dose sans effet toxique pour une exposition vie durant par voie orale chez le rat est de 80 ppm (3,1 mg/kg pc/j).

    Une étude vie durant via l'alimentation réalisée chez la souris (doses testées : 0, 50, 200 et 1 600 ppm) n'a révélé qu'une baisse de poids à la plus forte dose. La dose sans effet toxique pour une exposition vie durant chez la sou­ris par voie orale est de 200 ppm (20 mg/kg pc/j).

    Une étude de neurotoxicité différée, réalisée chez la poule pondeuse aux doses de 0, 75, 150 et 300 mg/kg pc/j par gavage, n'a pas mis en évidence de toxicité ni sur le système nerveux central ni sur le système nerveux périphérique.

    Dans une étude de toxicité subchronique (90 jours) par voie cutanée chez le lapin, la dose sans effet toxique est de 1 000 mg/kg pc/j (seule dose testée).

    Dans une étude de toxicité de 14 jours par inhalation chez le rat (dose maximale testée 0,25 mg/L, exposition corps entier 6 h/j, 5 j/sem.), aucun effet toxique systémique ou local n'a été observé.

    Effets génotoxiques [2, 5-7]

    De nombreux tests in vitro et in vivo permettent de conclure que l’isoproturon ne présente pas de potentiel génotoxique.

    Sur les bactéries (Salmonella typhimurium et Escherichia coli) dans plusieurs tests d’Ames, l'isoproturon ne présente pas d'activité mutagène avec ou sans activation métabo­lique.

    Sur cellules fungiques (Saccharomyces cerevisiae), un test de mutation génique et plusieurs tests de recombinaison mitotique réalisés avec l'isoproturon se sont tous avérés négatifs.

    Sur cellules de mammifères, l'isoproturon ne présente pas d'activité mutagène dans un test de mutation génique sur cellule de lymphome murin. L'isoproturon n'induit pas non plus d'aberration chromosomique dans un test sur lymphocytes humains.

    Les essais de synthèse non programmée de l’ADN (UDS) réalisés avec l'isoproturon sur hépatocyte de rat se sont révélés négatifs.

    In vivo

    Des résultats négatifs sont obtenus chez la souris, dans un test du micronoyau par gavage (dose maximale testée de 1 750 mg/kg) et dans un test d'aberration chromoso­mique sur moelle osseuse par gavage (dose maximale tes­tée 5 000 mg/kg).

    Dans un essai de synthèse non programmée de l’ADN sur cellule hépatique de rat, l'isoproturon ne produit pas non plus d'activité génotoxique lors d'administration par gavage (dose maximale testée 1 500 mg/kg).

    Les résultats de plusieurs essais de mutation létale domi­nante chez la souris (dose maximale testée 5 000 mg/kg par gavage) ainsi que ceux d'un test d'aberration chromo­somique sur sperme de souris (dose maximale testée de 3 312 mg/kg par gavage) se sont également avérés négatifs.

    Effets cancérogènes [2, 5, 6]

    Des études de cancérogénèse ont été réalisées chez le rat et la souris. L’isoproturon n’est pas cancérogène chez la souris, mais provoque des tumeurs hépatiques (tumeurs malignes hépatocellulaires et cholangiocarcinomes) chez le rat par un mécanisme non génotoxique avec un seuil clairement établi. Une activité promotrice de l’isoproturon a été mise en évidence dans des études mécanistiques.

    Une étude vie durant par voie orale via l'alimentation réalisée chez la souris n'a pas montré d'effet cancérogène même à la plus forte dose testée (dose maximale testée 1 600 ppm : 175 mg/kg pc/j).

    Chez le rat, l'isoproturon administré vie durant via l'alimentation, aux doses de 0, 80, 400 et 2 000 ppm, provoque une augmentation de l'incidence des tumeurs hépatiques (tumeurs malignes hépatocellulaires et cholangiocarcinomes) à partir de 400 ppm chez le mâle et 2 000 ppm chez la femelle. La dose sans effet toxique pour une exposition vie durant par voie orale chez le rat est de 80 ppm (3,1 mg/kg pc/j).

    Des études mécanistiques ont été réalisées chez le rat. L'administration répétée (14 jours) par gavage chez le rat mâle aux doses de 0, 80, 200 et 500 mg/kg pc/j provoque une hépatomégalie, une prolifération du réticulum endo­plasmique lisse des hépatocytes et une induction des enzymes hépatiques en charge du métabolisme des xéno­biotiques. Ces effets sont reliés à la dose et réversibles. L'activité promotrice de l'isoproturon dans le processus de cancérogenèse a été étudiée. Dans un premier essai chez le rat mâle, suite à une administration de diéthylnitrosamine (inducteur tumoral), l'administration via l'alimenta­tion de 2 000 ppm d'isoproturon pendant 37 semaines a augmenté de façon significative l'incidence de nodules prénéoplasiques.

    Dans un second essai réalisé chez le rat (mâle et femelle), les animaux préalablement exposés à de la nitrosomorpholine (inducteur tumoral) ont été exposés via l'alimen­tation pendant 12 semaines à 0, 4, 20, 80, 400 ou 2 000 ppm d'isoproturon. Dans les conditions de cet essai, l'isoproturon s'est avéré promoteur de cancérogénèse à 2 000 ppm uniquement chez le mâle.

    L'activité inductrice de l'isoproturon dans le processus de cancérogénèse a également été étudiée dans deux essais chez des rats partiellement hépatectomisés (doses tes­tées 32, 80, 200, 750 mg/kg en administration unique). Dans les conditions de ces essais, l'isoproturon augmente l'incidence des lésions prénéoplasiques (foyers GST-P+) avec ou sans promotion par le phénobarbital. Cependant, l'augmentation des lésions prénéoplasiques est considé­rée comme secondaire à une forte cytotoxicité et non consécutive d'un effet mutagène direct. En effet, les niveaux de dose d'isoproturon conduisant à une augmen­tation significative de ces lésions représentent trois fois la dose maximale tolérée des études long terme et un seuil a clairement été identifié.

    Au regard des résultats de ces études, l'isoproturon est un promoteur de cancérogénèse chez le rat par un méca­nisme d'induction des enzymes hépatiques et par hépatotoxicité. Un seuil a clairement été identifié.

    Le mécanisme d'action proposé ne peut être exclu chez l'homme.

    Effets sur la reproduction [2, 5, 6]

    L’isoproturon provoque des effets néfastes sur les fonctions de reproduction uniquement à des doses auxquelles une toxicité générale est observée.

    Chez le rat et le lapin aucun effet tératogène n’a été mis en évidence. Des effets fœtotoxiques sont observés dans les deux espèces à des doses toxiques pour les mères.

    Fertilité

    Quatre études 2-générations ont été réalisées chez le rat, via l'alimentation aux doses de 0, 100, 200, 400 et 2 000 ppm. Dès 200 ppm, des lésions histologiques hépatiques (dégénérescence hydropique) et spléniques (hyperplasie lymphoïde) traduisent une toxicité générale. À partir de 400 ppm, il est observé une diminution du gain de poids et une baisse de la consommation alimentaire de la génération parentale F1, ainsi qu'une baisse du gain de poids des petits F2 pendant la période d'allaitement. La dose sans effet est de 100 ppm (10 mg/kg pc/j) pour les parents et leur progéniture.

    Chez quelques mâles de la génération F1, un retard de la spermatogénèse est noté à partir de 200 ppm. Les para­mètres de fertilité et de reproduction de la génération F1 (diminution de l'indice d'accouplement, de l'indice de ges­tation, diminution de la taille des portées) sont affectés à partir de 400 ppm. La dose sans effet sur la reproduction est également de 100 ppm (10 mg/kg pc/j).

    Développement

    Trois études de développement par gavage ont été réali­sées chez le rat à des doses allant jusqu'à 500 mg/kg pc/j. Il est observé une fœtotoxicité (augmentation des résorp­tions fœtales, baisse du poids des fœtus et ossifications incomplètes) en présence de toxicité sur les mères (baisse du gain de poids et de la consommation alimentaire). Aucun effet tératogène n'a été mis en évidence dans ces études.

    Chez le rat, la dose sans effet toxique pour les mères et la dose sans effet fœtotoxique sont de 80 mg/kg pc/j.

    Dans les deux études de développement chez le lapin par gavage (dose maximale testée 160 mg/kg pc/j), des effets fœtotoxiques (baisse du poids des fœtus et du placenta) sont observés à des doses toxiques pour les mères (baisse du gain de poids et de la consommation alimentaire). Aucun effet tératogène n'a été mis en évidence.

    La dose sans effet toxique pour les mères et la dose sans effet fœtotoxique issues de ces études sont de 40 mg/kg pc/j.

    Il n'existe aucune donnée de la littérature relative à l'expo­sition à l'isoproturon « technique ». Les seules données publiées concernent les effets rapportés chez l'homme lors de l'exposition aux préparations commerciales. La pré­sence de co-formulants dans les préparations est suscep­tible de modifier sensiblement le profil toxicologique observé chez l'animal à partir des études effectuées sur la substance active seule.

  • Toxicité sur l’Homme

    L’exposition aiguë aux préparations commerciales à base d’isoproturon est responsable de troubles digestifs, d’irritations cutanées, oculaires et respiratoires. En cas d’ingestion massive, des symptômes digestifs sont observés et la formation de méthémoglobine suivie d’hémolyse est possible. Une étude de portée limitée n’a pas observé de lésions de l’ADN. Aucune donnée sur les effets chroniques, cancérogènes ou sur la reproduction n’est disponible.

    Toxicité aiguë [8-10]

    L'isoproturon (sous forme de préparations commerciales), comme la plupart des urées substituées herbicides, est irritant pour les yeux et la sphère respiratoire.

    Le bilan sur 10 ans (01/01/1997-31/12/2007) des obser­vations du réseau de toxicovigilance agricole Phyt’Attitude fait état de plusieurs signalements de troubles digestifs et de signes d'irritation cutanée lors de l'exposition à des préparations à base d'isoproturon.

    À la suite d'un incident survenu en 1996 dans une usine de production, au cours duquel près d'une tonne d'isopro­turon a été libérée, un suivi biologique comprenant NFS, ainsi qu'un dosage sanguin de la créatinine, de l'urée, de la méthémoglobine et des enzymes hépatiques n'a montré aucune altération chez les sujets exposés.

    Nausées, vomissements, douleurs abdominales et diarrhées peuvent survenir en cas d'ingestion. Par analogie structu­rale avec les autres urées substituées, la formation de méthémoglobine suivie d'hémolyse est possible en cas d'ingestion massive.

    Toxicité chronique

    Pas de donnée chez l'homme.

    Effets génotoxiques [11]

    L'induction de lésions de l’ADN a été recherchée dans une étude incluant 11 agriculteurs exposés à l’isoproturon. Malgré l’existence d’importantes variations individuelles chez certains sujets, aucune modification statistiquement significative du taux de lésions à l’ADN n’a été retrouvée dans les échantillons sanguins avant et après l’exposition.

    Effets cancérogènes

    Pas de donnée chez l’homme.

    Effets sur la reproduction

    Pas de donnée chez l’homme.

  • Interférences métaboliques
  • Cohérence des réponses biologiques chez l'homme et l'animal
EN SAVOIR PLUS SUR LES FICHES TOXICOLOGIQUES