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Alcool furfurylique

Fiche toxicologique n° 160

Sommaire de la fiche

Édition : 2010

Pathologie - Toxicologie

  • Toxicocinétique - Métabolisme [8, 9]

    L’alcool furfurylique est bien absorbé dans l’organisme par toutes les voies d’exposition ; il se distribue essentiellement dans le foie et les reins, est transformé en 2-furoylglycine et est éliminé dans l’urine.

    Chez l'animal
    Absorption

    Les données de toxicologie expérimentale démontrent que l’alcool furfurylique peut pénétrer dans l’organisme par les voies digestive, respiratoire et cutanée. L’absorp­tion gastro-intestinale représente au moins 86 à 89 % des doses administrées par voie orale (0,275 - 2,75 - 27,5 mg/kg) chez le rat.

    Distribution

    Après absorption gastro-intestinale de 14C]-alcool furfu­rylique, les plus fortes quantités de molécules radiomar­quées sont mesurées dans le foie et les reins du rat, les plus faibles dans le cerveau[16].

    Métabolisme

    Les voies de biotransformation de l’alcool furfurylique sont relativement bien connues chez le rat (voir fig. 1). La voie majeure, après administration orale, est une oxyda­tion en furfural, puis en acide furoïque qui est conjugué avec la glycine et éliminé. Une voie mineure mène à l’acide funacrylique qui est également éliminé sous forme de conjugué avec la glycine. Une excrétion de CO2 dans l’air expiré a été montrée chez le rat et la souris. La formation de CO2 nécessite soit l’ouverture de la molécule en 2-oxo-glutarate qui, par l’intermédiaire du cycle de Krebs, est dégradé en CO2, soit une décarboxylation de l’acide furoïque.

    Schéma métabolique

    Excrétion

    L’urine est la voie majeure d’élimination chez le rat et la souris (83 - 88 % de la dose administrée), 2 à 4 % sont éli­minés dans les fèces ou expirés sous forme de CO2. La 2-furoylglycine est le métabolite urinaire majeur (73­ - 80 %) ; l’acide furoïque (1 - 6 %, après exposition à forte dose uniquement), l’acide furanacrylique (3 - 8 %) et la furanacryloylglycine sont des métabolites mineurs.

    Chez l'Homme

    Le schéma métabolique est semblable chez l’homme ; cependant les études ont été menées avec une exposition au furfural et non à l’alcool furfurylique. Après exposition aux vapeurs de furfural pendant 8 heures, la rétention pulmonaire moyenne est de 77,9 %. Les métabolites uri­naires sont la furoylglycine (en majorité) et l’acide furanacrylique ; l’acide furoïque n’a pas été détecté.

    Après exposition cutanée aux vapeurs de furfural pendant 8 heures, l’absorption est de 20 à 30 % de la dose retenue dans les poumons lors d’une exposition identique. Une exposition cutanée au liquide (immersion d’une main pendant 15 minutes) engendre une absorption identique à celle d’une exposition par inhalation à 10 mg/m3 pen­dant 8 heures [9.

  • Mode d'actions
  • Toxicité expérimentale
    Toxicité aiguë

    En exposition aiguë, l’alcool furfurylique est essentielle­ment un irritant respiratoire et un irritant oculaire modéré ; c’est un allergène faible.

    Après exposition par inhalation (65 - 125 - 250 ppm), les ani­maux manifestent une détresse respiratoire, une irritation oculaire (yeux rouges, exophtalmie, larmes) et nasale (rhi­norrhée) et des signes neurologiques (léthargie après une phase initiale d’excitation) aux concentrations létales. L’au­topsie des survivants ne révèle aucune atteinte en dehors d’une inflammation des cornets du nez accompagnée d’une nécrose et d’une métaplasie squameuse de l’épithé­lium respiratoire et d’une nécrose de l’épithélium olfactif [11]. Après exposition orale, les seuls signes de toxicité, observés chez le rat, sont des convulsions et une paralysie respiratoire précédant la mort aux doses létales[12].

    Voie Espèce DL50/CL50
    Inhalatoire Rat 592 ppm/1 h
    Inhalatoire Rat 233 ppm/4 h
    Inhalatoire Rat 85 ppm/6 h
    Inhalatoire Souris 397 ppm/6 h
    Orale Rat 132-275 mg/kg
    Orale Souris 160 mg/kg
    Cutanée Rat 3825 mg/kg
    Cutanée Souris 4920 mg/kg
    Cutanée Cobaye > 8500 mg/kg
    Cutanée Lapin 400-657 mg/kg

     Tableau I : Toxicité de l'alcool furfurylique[4, 10]

     

    Irritation - Sensibilisation

    L’alcool furfurylique est un irritant respiratoire chez l’animal.

    Localement, il n’est pas irritant pour la peau du chien et fai­blement irritant pour la peau du cobaye ; cependant des applications quotidiennes d’une solution à 50 % dans l’a­cétone entraînent, après 12 jours de traitement, séche­resse, hyperémie, desquamation et nécrose de la peau [12].

    L’irritation oculaire est modérée chez le lapin pour une instillation de 0,02 ml de liquide (réversible en 2 à 8 jours) et sévère pour une instillation de 0,05 ml (inflammation de la conjonctive, gonflement des paupières, opacité de la cornée ; réversible en 40 à 64 jours). Une exposition du rat à la vapeur saturée (700 ppm) provoque, après 8 minutes, une rougeur oculaire ; une exposition répétée à 19 ppm n’induit aucune irritation chez le rat ou la souris[12].

    L’alcool furfurylique est un allergène faible chez le cobaye ; une réaction de sensibilisation a été déclenchée par l’ap­plication cutanée, pendant 12 jours, de 40 μg d’alcool fur­furylique dans l’acétone [12].

    Toxicité subchronique, chronique [9]

    En exposition prolongée ou répétée, l’alcool furfurylique induit essentiellement des lésions nasales et rénales.

    Chez le rat et la souris, exposés par inhalation pendant 16 jours (0 - 127 - 257 - 510 - 1 020 mg/m3, 6 h/j, 5 j/semaine), on observe : létalité aux deux plus fortes concentrations, baisse de poids, dyspnée, hypoactivité, écoulement nasal et oculaire (> 257 mg/m3) et lésions de l’épithélium nasal respiratoire et olfactif, à toutes les concentrations. Une prolongation de l’exposition à 13 semaines augmente la sévérité des lésions de l’épithélium nasal (nécrose et métaplasie squameuse de l’épithélium respiratoire; nécrose et dégénérescence de l’épithélium olfactif). Une exposition pendant 2 ans (0 - 8 - 16 - 131 mg/m3) induit chez le rat, en plus de l’effet nasal, une toxicité rénale et, à la forte concentration, une hyperplasie des parathyroïdes et une ostéodystrophie fibreuse probablement liée aux effets rénaux. La souris femelle, exposée aux mêmes concentrations, présente une baisse de poids et développe une opacité cornéenne focale ; chez le mâle, on observe des lésions rénales dont la sévérité est liée à la concen­tration [11].

    Lors d’une exposition par voie orale (0 - 38 - 75 - 150 - 300 - ­600 mg/kg, gavage, 13 semaines), la létalité apparaît à 150 mg/kg chez le rat et 300 mg/kg chez la souris. Les rats recevant des doses ≥ 75 mg/kg présentent une baisse de poids ainsi que des lésions modérées du foie et des reins (dégénérescence des hépatocytes et des cellules épithé­liales tubaires du cortex rénal). Chez les souris, on observe des lésions identiques mais plus sévères (avec nécrose) à des doses quotidiennes ≥ 300 mg/kg.

    Effets génotoxiques [9]

    L’alcool furfurylique donne des réponses équivoques dans les tests de génotoxicité.

    In vitro:

    • test d’Ames (avec et sans activation métabolique) néga­tif pour les souches TA 98, TA 100, TA 1535, TA 1537 et TA 1538 de Salmonella typhimurium ;
    • induction d’aberrations chromosomiques, cellules ova­riennes de hamster chinois, équivoque avec activateurs métaboliques, négatif sans activateurs métaboliques ;
    • induction d’échanges entre chromatides sœurs, cellules ovariennes de hamster chinois, positif sans activateurs métaboliques, négatif avec activateurs métaboliques ;
    • induction d’échanges entre chromatides sœurs, lym­phocytes humains, négatif sans activateurs métaboliques [13].

     

    In vivo :

    • induction de micronoyaux, d’échanges entre chromatides sœurs et d’aberrations chromosomiques, moelle osseuse de souris (300 mg/kg, ip), négatif ;
    • induction d’aberrations chromosomiques et d’échanges entre chromatides sœurs, moelle osseuse de souris (1000 - ­2000 - 4000 ppm dans 0,5 ml d’eau par gavage, 1 fois ou pendant 5 jours consécutifs), positif à 4000 ppm en expo­sition unique ou répétée avec prélèvement à 18, 24 et 36 heures, positif à 2000 ppm en exposition unique et prélèvement 18 heures[14a et b];
    •  induction de mutation létale récessive, drosophile, négatif [15].
    Effets cancérogènes [9]

    L’alcool furfurylique induit l’apparition de tumeurs nasales et rénales, surtout chez les mâles.

    L’exposition de rats et de souris des deux sexes (0 - 2 - 8 - ­32 ppm, 6 h/j, 5 j/sem pendant 105 semaines) est associée à des lésions du nez et une augmentation de sévérité de la néphropatie. Les effets néoplasiques sont localisés chez le rat mâle au niveau du nez (adénomes, carcinomes ou carcinomes à cellules squameuses) et ne sont significa­tivement augmentés qu’à la plus forte dose ; chez les femelles, l’augmentation de l’incidence est marginale. Chez la souris mâle, des tumeurs sont observées au niveau des tubes rénaux (adénomes et carcinomes) à la plus forte concentration ; les femelles ne présentent pas de tumeur.

    Effets sur la reproduction

    Il n’y a pas de donnée dans la littérature pour les effets de l’alcool furfurylique sur la reproduction.

  • Toxicité sur l’Homme

    Chez l’homme, en dehors d’effets irritants sur les muqueuses oculaire et nasale et d’une légère altération des fonctions respiratoires, aucune autre anomalie n’a été rapportée lors d’exposition à l’alcool furfurylique.

    Toxicité aiguë [5, 12, 16]

    Des études sur volontaires ont montré que l’ingestion de 40 à 150 mg d’alcool furfurylique ne provoquait chez l’homme aucune atteinte clinique ou biologique.

    En milieu professionnel, les données proviennent de deux études déjà anciennes réalisées dans des fonderies ; dans cet environnement, des co-expositions sont également retrouvées, notamment à l’aldéhyde formique, ce qui ne permet pas d’imputer au seul alcool furfurylique tous les effets observés. Dans le premier cas, aucun effet n’est rap­porté lorsque les salariés sont exposés à la concentration de 10 ppm (≈ 40 mg/m3). Une irritation sévère des yeux avec un abondant larmoiement est notée pour une expo­sition de 15,8 ppm (≈ 65 mg/m3) associé à 0,33 ppm (≈ 0,4 mg/m3) d’aldéhyde formique. Dans le second, les irritations respiratoires sont observées alors que la concentration moyenne est de 7 mg/m3 avec des pics supérieurs à 40 mg/m3.

    Des phénomènes irritatifs respiratoires (douleurs pharyn­gées ou thoraciques, bronchite avec toux) ont été obser­vés chez des travailleurs exposés à l’alcool furfurylique (concentration non précisée) lors de la fabrication de ciments résistant à la corrosion. La contribution de l’alcool furfurylique aux troubles observés est difficile à évaluer en raison de la multiplicité des expositions[17].

    Les projections oculaires sont susceptibles d’entraîner une irritation sévère mais réversible sous traitement. Il n’y a pas de cas de sensibilisation respiratoire ou cutanée impu­table au seul alcool furfurylique.

    Toxicité chronique [5, 12]

    Une sécheresse de la peau et des dermatoses ont été signalées à la suite de contacts cutanés répétés avec l’alcool furfurylique.

    Âhman, en 1991, met en évidence chez un nombre réduit d’ouvriers d’une fonderie une légère anomalie des fonc­tions respiratoires. Dans cette entreprise où les concentra­tions moyennes d’exposition sont de 7 mg/m3 (pics d’exposition de plus de 40 mg/m3), l’auteur trouve une réduction de la capacité vitale forcée ; une co-exposition à la poussière est notée (< 2 mg/m3) et à l’aldéhyde formique (0,4 mg/m3). Aucune autre anomalie n’est signalée [18].

  • Interférences métaboliques
  • Cohérence des réponses biologiques chez l'homme et l'animal
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