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Fluorure d’hydrogène (ou acide fluorhydrique) et solutions aqueuses

Fiche toxicologique n° 6

Sommaire de la fiche

Édition : Février 2019

Pathologie - Toxicologie

  • Toxicocinétique - Métabolisme [1, 6]

    Les fluorures inorganiques sont absorbés par le tractus respiratoire, la peau et le tractus gastro-intestinal. Ils se distribuent dans tout l’organisme sous forme d’ions   F et se stockent dans les os et les dents. Ils sont éliminés essentiellement dans l’urine.

    Chez l'animal
    Absorption

    Chez le rat, le lapin et l’homme, 99% du fluorure d’hydrogène inhalé sont rapidement absorbés par l’épithélium du tractus respiratoire supérieur ; la concentration plasmatique est directement liée à la concentration d’exposition.

    Le fluorure d’hydrogène liquide est absorbé par la peau humaine ; chez le rat, la concentration sérique de F augmente avec la durée d’exposition et revient à la normale 96 heures après l’arrêt de l’exposition.

    L’absorption du fluorure d’hydrogène par le tractus gastro-intestinal est rapide; elle est diminuée par la présence de cations fixant le fluor (calcium, magnésium ou aluminium).

    Distribution

    Après absorption, l’ion F est transporté par le sang, 75% dans le plasma dont la moitié fixée aux molécules organiques, en particulier les acides gras, et 25% fixés aux globules rouges. Il se distribue dans tous les tissus, passe la barrière placentaire et atteint le fœtus. Il est séquestré dans les os et les dents par incorporation dans la structure après échange avec des groupements hydroxyles ; cette fixation représente environ 50% du fluorure absorbé. Elle est plus importante chez les personnes jeunes et les plus âgées que chez les gens d’âge moyen. La demi-vie plasmatique chez l’homme est de 2 à 9 heures.

    Excrétion

    La voie majeure d’élimination est l’urine, par filtration glomérulaire rénale ; une réabsorption peut survenir dans les tubes rénaux. Il existe une excrétion mineure dans les fèces, la salive et la sueur. Après arrêt de l’exposition, le fluorure stocké dans les os est relargué et éliminé avec une demi-vie de 8 à 20 ans chez l’homme.

    Surveillance Biologique de l'exposition

    Le dosage des fluorures urinaires, prélèvement en fin de poste de travail, reflète le niveau d'exposition du poste qui a précédé, tandis que le prélèvement fait avant le poste de travail en début de semaine (au mieux après 2 jours sans exposition) est le témoin de la charge corporelle et de l'exposition ancienne à l’HF. Une bonne corrélation existe entre la concentration des fluorures urinaires et la quantité de fluor absorbé.

    Le dosage des fluorures sanguins, prélèvement en fin de poste, est bien corrélé à l’intensité de l’exposition, est également proposé. Ce dosage ne présente pas d’avantage par rapport aux dosages urinaires des fluorures, sauf en cas d’altération de la fonction rénale.
    Pour les fluorures urinaires, il existe des valeurs biologiques d’interprétation pour la population professionnellement exposée (voir Recommandations § Au point de vue médical) 

  • Mode d'actions
  • Toxicité expérimentale [1, 6]
    Toxicité expérimentale

    Dans certains cas, les effets systémiques observés après exposition au fluorure de sodium peuvent être retenus, en raison de son métabolisme similaire à celui du fluorure d'hydrogène.

    Toxicité aiguë

    Le fluorure d’hydrogène est très toxique par inhalation et corrosif pour la peau et les yeux.

    Espèce CL50 
    Rat 792 - 1909 mg/m3/1 h
    Souris 279 mg/m3/1 h
    Cobaye 3540 mg/m3/15 mn
    Singe 1420 mg/m3/1 h

    Tableau 1. Toxicité aiguë par inhalation du fluorure d'hydrogène

     

    L’exposition au fluorure d’hydrogène gazeux ou à des aérosols de solutions aqueuses produit une corrosion des muqueuses oculaires, cutanées et respiratoires avec lésions caustiques, perte de poids et détresse respiratoire même à faible concentration.

    L’examen anatomo-pathologique des animaux révèle une ulcération bronchique, une hémorragie et un œdème pulmonaires, des lésions hépatiques et rénales, une hémorragie du thymus et une arythmie cardiaque liée à une hypocalcémie et une hyperkaliémie sériques.

    Le fluorure d’hydrogène est caustique pour la peau du rat (50 μL d’une solution à 70% pendant 1 min) provoquant érythème, œdème, vésication et nécrose progressant jusqu’au tissu musculaire ; la lésion cicatrise en 35 à 56 jours. L’application de 5 mL d’une solution à 5% sur la peau du lapin pendant 4 heures provoque, 24 heures après l’exposition, la formation d’escarres et la destruction du tissu sous-jacent ; ces lésions ne sont pas réversibles en 14 jours. Aucun effet corrosif ou irritant n’est observé avec une solution à 1%.

    Les solutions à plus de 2% sont corrosives pour l’œil du lapin.

    Par inhalation, chez la souris, il induit une irritation respiratoire objectivée par une baisse de la fréquence respiratoire ; une RD50 a été établie à 110-123 mg/m3.

    Toxicité subchronique, chronique

    Une exposition prolongée au fluorure d’hydrogène provoque essentiellement une irritation accompagnée de lésions hépatiques, rénales, osseuses et dentaires.

    L’effet majeur d’une exposition prolongée est une fluorose visible au niveau des dents (décoloration de l’émail, bouts cassants) essentiellement chez l’animal jeune. Des cavités de forme irrégulière ont également été observées dans les os de rats âgés de 12 mois (1mg/m3, 6 h/j pendant 1 mois).

    L’exposition de rats pendant 14 jours, 6 h/j, 5 j/sem est létale à partir de 17,8 mg/m3 pour les femelles et 53 mg/m3 pour les mâles. Aux concentrations inférieures, on observe des modifications de poids corporel et des organes (foie, coeur, reins, poumons), des tremblements ainsi qu’une irritation respiratoire, nasale et oculaire.

    Une exposition pendant 90 jours (0-0,1-0,72-7,52 mg/m3, 6 h/j, 5 j/sem) provoque chez le rat, à la plus forte concentration, une létalité ainsi qu’une baisse de poids relatif des organes, et, à concentrations non létales, une irritation respiratoire, oculaire et nasale, des malformations dentaires, des modifications hématologiques (augmentation des plaquettes et diminution du nombre de lymphocytes et de globules rouges) et biochimiques sériques (baisse du taux de glucose et d’albumine, augmentation du taux de potassium et de phosphore).

    Une dégénérescence graisseuse du parenchyme hépatique avec foyers nécrotiques et invasion fibroblastique des espaces péri-portaux sont notés chez le cobaye (18 ppm, 6-7 h/j, pendant 50 jours); le lapin, exposé aux mêmes concentrations, développe une dégénérescence et une nécrose des tubes contournés rénaux.

    Effets génotoxiques

    Les données disponibles sur la mutagénicité des fluorures sont en faveur de l’absence d’effet génotoxique direct de l’ion F.

    In vitro, le test d’Ames sur bactéries est négatif pour les fluorures d’hydrogène et de sodium. Le fluorure d’hydrogène n’a pas été testé dans les cellules de mammifère ; en revanche, le fluorure de sodium donne des résultats positifs dans un grand nombre de tests (échanges entre chromatides soeurs, aberrations chromosomiques et synthèse non programmée de l’ADN).

    In vivo, les tests pratiqués avec le fluorure d’hydrogène par inhalation sont équivoques (drosophile, tests de létalité récessive, +/– ; souris, test de létalité dominante, – ; rat, moelle osseuse, aberrations chromosomiques, +) ; ils présentent souvent des insuffisances méthodologiques ou sont insuffisamment détaillés. Les résultats obtenus avec le fluorure de sodium sont négatifs par voie orale chez le rat, la souris et le hamster. Quelques résultats positifs ont été obtenus par voie intrapéritonéale (ip) chez la souris.

    Effets cancérogènes [7]

    Les fluorures ne sont pas considérés comme cancérogènes pour l’animal par l’Union européenne (non classés), ils n’ont pu être évalués par le CIRC (groupe 3).

    Il n’y a pas d’études publiées permettant d’apprécier la cancérogénicité du fluorure d’hydrogène.

    Quatre études, réalisées avec le fluorure de sodium dans l’eau de boisson (0-25-100-175 ppm pendant 2 ans) ou dans la nourriture (0-4-10-25 mg/kg/j pendant 2 ans) du rat et de la souris, ne montrent qu’une augmentation marginale du taux d’ostéosarcomes chez les rats mâles exposés à l’eau de boisson.

    Effets sur la reproduction

    Peu d’études sont disponibles avec le fluorure d’hydrogène ; le fluorure de sodium diminue la fertilité du mâle mais n’a pas d’effet sur le développement du fœtus.

    Fertilité

    Une atrophie testiculaire a été observée chez des chiens exposés au fluorure d’hydrogène (18 ppm, 6 h/j, 6 j/sem, 5 sem) ; cet effet n’apparaît pas chez les lapins ou les rats.

    Par voie orale, le fluorure de sodium est toxique pour la fertilité du mâle :

    • chez la souris à partir de 4,52 mg F/kg/j pendant 30 jours: baisse du comptage et de la mobilité spermatique, modification de l’épithélium germinal des testicules et de l’épididyme, anomalies des spermatozoïdes, y compris perte du flagelle;
    • chez le rat à partir de 2,26 mg F/kg/j pendant 30 jours : baisse du comptage et de la mobilité spermatique ;
    • chez le lapin à partir de 9 mg F/kg/j pendant 30 jours : réduction de 70% de la fertilité.
    Développement

    L’ion F passe la barrière placentaire et pénètre dans le fœtus.

    Le fluorure de sodium n’induit pas d’effet sur le développement du rat (jusqu’à 250 mg/L dans l’eau de boisson soit 10 mg F/kg/j pendant 2 générations ou jusqu’à 200 mg/kg dans la nourriture du 1er au 20e jour de gestation) et du lapin (jusqu’à 400 mg/L soit 13,2 mg F/kg/j du 6e au 19e jour de gestation) ; ces doses sont légèrement toxiques pour les mères (baisse de la prise de boisson, blanchiment des dents). Bien que l’ion F atteigne le fœtus, la concentration est trop faible pour affecter la croissance osseuse.

    Dans une étude plus ancienne, des injections ip de fluorure de sodium (15 mg/kg/j du 14e au 20e jour de gestation) provoquent chez le rat des malformations du squelette et des retards d’ossification des vertèbres et des sternèbres sans toxicité maternelle.

  • Toxicité sur l’Homme

    Quelle que soit la voie d’exposition, le fluorure d’hydrogène peut entraîner de graves lésions caustiques souvent difficiles à guérir. En cas d’expositions répétées, on peut en plus observer une fluorose (atteinte ostéo-ligamentaire et dentaire).

    Toxicité aiguë [1, 4, 8]

    Le fluorure d’hydrogène ou ses solutions concentrées (supérieures ou égales à 20%) produisent des brûlures caustiques immédiates de la peau et des muqueuses en contact ; ces lésions s’aggravent secondairement. Les solutions diluées sont également caustiques, mais les brûlures qu’elles provoquent sont retardées.

    L’ingestion d’une solution de fluorure d’hydrogène est suivie de douleurs buccales, rétrosternales et épigastriques. Les vomissements sont fréquents ; ils sont parfois sanglants. Le délai d’apparition de ces troubles digestifs est variable ; il peut être de plusieurs heures, lorsque la solution ingérée est diluée. La chélation du calcium explique partiellement la causticité du fluorure d’hydrogène, elle est responsable de ses effets systémiques. L’hypocalcémie apparaît dans l’heure suivant l’ingestion. Elle provoque des paresthésies, des fasciculations, des myoclonies et des convulsions, des troubles de la conduction et de la repolarisation cardiaques.

    Les lésions caustiques digestives se constituent en 4 à 12 heures. La fibroscopie oesogastroduodénale permet d’en faire le bilan. Les examens biologiques révèlent, outre l’hypocalcémie, une acidose métabolique et une élévation des enzymes tissulaires témoignant de la nécrose; l’hyperleucocytose est constante.

    Les complications risquant de survenir dans les jours suivant l’ingestion sont une hémorragie digestive, une perforation oesophagienne ou gastrique, un choc (secondaire à une hémorragie abondante ou à une perforation), une acidose métabolique intense et/ou une coagulopathie de consommation (évoquant une nécrose étendue ou une perforation), une détresse respiratoire (révélant un oedème laryngé, une destruction du carrefour aérodigestif ou une fistule oesotrachéale). Sur le plan local, l’évolution ultérieure est dominée par le risque de constitution de sténoses digestives.

    Les insuffisances rénales, qui sont parfois observées, sont plus dues aux troubles hémodynamiques (compliquant les lésions caustiques ou les troubles métaboliques) qu’à la toxicité tubulaire directe de l’ion fluorure.

    Les diverses publications rapportent près de 50% de décès. Celui-ci survient, généralement, au cours des 24 premières heures. II est secondaire :

    • à une perforation digestive, à une hémorragie massive ;
    • ou, plus souvent, à une fibrillation ventriculaire qu’on attribue, classiquement, à l’hypocalcémie, mais qui semble plutôt due à l’administration trop rapide de sels de calcium.

    L’exposition au fluorure d’hydrogène gazeux ou à des aérosols de solutions aqueuses provoque une irritation des muqueuses oculaires et respiratoires : hyperhémie conjonctivale, larmoiement, toux, dyspnée… À l’arrêt de l’exposition, la symptomatologie s’amende, mais les lésions caustiques continuent d’évoluer à bas bruit. Au cours des heures suivantes se constituent des brûlures chimiques cutanées, oculaires et respiratoires. Il faut craindre la survenue retardée d’un oedème pulmonaire lésionnel.

    En cas d’inhalation massive, l’absorption de fluorure d’hydrogène est suffisante pour produire une intoxication systémique (voir ingestion).

    Les jours suivants, la surinfection bactérienne des lésions oculaires et respiratoires est fréquente. L’hypersécrétion bronchique et la desquamation de la muqueuse brûlée peuvent être responsables d’obstructions tronculaires et d’atélectasies.

    À terme, des séquelles respiratoires (sténoses bronchiques, bronchiolites oblitérantes, bronchectasies, fibroses pulmonaires) et oculaires (opacités cornéennes) sont possibles.

    Les projections oculaires et cutanées sont responsables de lésions caustiques qui ne se constituent complètement qu’en 6 à 24 heures. La douleur n’est immédiate qu’en cas de contact avec des solutions concentrées (supérieures à 15%), sinon elle n’apparaît qu’après quelques dizaines de minutes, voire plusieurs heures. Elle s’accompagne d’un érythème et d’un oedème ; les téguments prennent ensuite un aspect blanchâtre. Si un traitement efficace n’est pas rapidement mis en oeuvre, l’évolution vers la nécrose est la règle.

    Une contamination cutanée sur la surface d’une main peut induire après 2 à 3 heures une hypocalcémie sévère.

    Toxicité chronique [1, 4, 8]

    Les études épidémiologiques et les cas cliniques publiés ne concernent que des populations ou des individus exposés simultanément au fluorure d’hydrogène, aux fluorures et/ou fluorosilicates. La cinétique du fluorure d’hydrogène ne différant pas de celle de ses dérivés minéraux solubles, leurs toxicités systémiques à terme sont probablement identiques.

    L’exposition répétée au fluorure d’hydrogène et à ses dérivés minéraux est responsable d’une irritation de la peau, des muqueuses oculaires (conjonctivite, kératite) et respiratoires (épistaxis, pharyngite, laryngite, bronchopathie chronique). Elle peut entraîner une surcharge fluorée, la fluorose. Cette intoxication se traduit par une augmentation de la densité osseuse, surtout évidente au niveau des vertèbres, du bassin et des côtes ; des exostoses, des ostéophytes et des calcifications ligamentaires (ligaments sacro-sciatiques, membranes interosseuses radiocubitales et obturatrices…) peuvent s’y associer. Cette hyperminéralisation se manifeste cliniquement par des arthralgies, puis une limitation des mouvements. L’atteinte dentaire (dentition marbrée) n’appartient pas au tableau de la fluorose professionnelle ; elle est due à la fixation du fluor sur les bourgeons dentaires et ne s’observe que lorsque l’intoxication a eu lieu dans l’enfance. Au contraire, la fréquence des caries dentaires est plus faible chez les ouvriers exposés au fluorure d’hydrogène et à ses dérivés minéraux que dans la population générale.

    Il n’y a pas de donnée sur un éventuel effet sensibilisant cutané du fluorure d’hydrogène.

    Effets cancérogènes [1, 8]

    L’incidence des cancers pulmonaires est élevée chez les mineurs extrayant le fluorure de calcium ainsi que dans l’industrie de l’aluminium; les cancers pancréatiques, génito-urinaires et des organes hématopoïétiques sont plus fréquents chez les ouvriers effectuant le raffinage de l’aluminium. Cependant, la responsabilité du fluorure d’hydrogène et de ses dérivés minéraux est incertaine, car ces postes de travail exposent simultanément à des cancérogènes connus: radiations ionisantes (mines), hydrocarbures aromatiques polycycliques (industrie de l’aluminium).

    Effets sur la reproduction [1, 8]

    Plusieurs types d’anomalies ont été suspectées sur des études portant sur des populations consommant des eaux riches en fluorures. Une réduction du taux global de fertilité, un excès de la fréquence des trisomies 21 ont été rapportés dans les régions où l’eau potable est riche en fluor. Ces études déjà anciennes souffraient de nombreux biais méthodologiques et n’ont pas été ultérieurement confirmées.

  • Interférences métaboliques
  • Cohérence des réponses biologiques chez l'homme et l'animal
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