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1,4-Dioxane

Fiche toxicologique n° 28

Sommaire de la fiche

Édition : Juin 2023

Pathologie - Toxicologie

  • Toxicocinétique - Métabolisme [1, 10]

    Le 1,4-dioxane est rapidement absorbé par voies orale et respiratoire, métabolisé principalement en acide β-hydroxyéthoxy acétique, qui est ensuite éliminé dans les urines ; il ne s’accumule pas dans l’organisme.

    Chez l'animal
    Absorption

    Le 1,4-dioxane est rapidement et quasi complètement absorbé par voie orale et inhalatoire chez le rat. L'absorption cutanée n'a pas été quantifiée mais elle a été démontrée in vivo, chez le singe exposé à du 1,4-dioxane radiomarqué (excrétion urinaire de molécules marquées équivalent à 2,3 % de la dose appliquée, 4 mg/cm², après 24 heures).

    Métabolisme

    Les voies de métabolisation du 1,4-dioxane ne sont pas précisément connues mais entrainent la formation d'acide β-hydroxyéthoxy acétique (ou HEAA) [11].

    Chez le rat, il existerait une interconversion de l’HEAA en 1,4-dioxane-2-one.

    Schéma métabolique

    Excrétion

    Le métabolisme est fonction de la dose (exposition unique par voie orale chez le rat) : pour une dose inférieure à 10 mg/kg, on observe une transformation en HEAA et une excrétion entièrement dans l'urine, alors qu'une dose orale unique de 1000 mg/kg sature le métabolisme, résultant en une diminution de l'excrétion de HEAA urinaire et une augmentation du 1,4-dioxane dans l'air expiré.

    Le 1,4-dioxane est rapidement éliminé du sang, avec une demi-vie d'environ 1 heure.

    Chez l'Homme
    • Absorption [12]

    Chez l'homme, le 1,4-dioxane est rapidement absorbé à plus de 50 % de la dose initiale par inhalation (50 ppm pendant 6 heures). Son absorption cutanée est très faible (in vitro, environ 3 % de la dose appliquée sur de la peau humaine excisée, sous pansement occlusif) [10].

     

    • Métabolisme

    Sa biotransformation parait être semblable à celle du rat, avec une métabolisation au niveau hépatique et formation de HEAA (fig. 1), sans saturation métabolique (exposition à 50 ppm pendant 6 heures) ; la concentration plasmatique en HEAA est maximale 1 heure après la fin de l’exposition puis diminue.

     

    • Elimination

    Comme chez le rat, le 1,4-dioxane est rapidement éliminé du sang avec une demi-vie d'environ 1 heure (50 ppm, 6 heures). Environ 99 % de la dose totale de 1,4-dioxane est excrétée dans les urines sous forme de HEAA en 16 heures (47 % dans les 6 premières heures) avec une demi-vie d'élimination de 2,7 heures. Seul 0,7 % de la dose est éliminé dans l'urine sous forme inchangée. Pour des expositions professionnelles d'environ 5,8 mg/m3 (1,6 ppm, pendant 7,5 heures), les concentrations urinaires en 1,4-dioxane et en HEAA en fin de poste sont respectivement de l'ordre de 3,5 et 414 µmol/L, traduisant une élimination quasi complète [13].

  • Mode d'actions
  • Toxicité expérimentale [1]
    Toxicité aiguë

    Le 1,4-dioxane est faiblement toxique pour l'animal en exposition aiguë ; il est essentiellement narcotique, hépatotoxique et irritant pour les muqueuses respiratoires et oculaires.

    La CL50 par inhalation est de 51 300 mg/m3/4h chez le rat et 37 000 mg/m3/2h chez la souris. La DL50 orale est de 5170 à 7339 mg/kg chez le rat, 5850mg/kg chez la souris, 3256 à 4000 mg/kg chez le cobaye et 6500 mg/kg chez le lapin. Par voie cutanée, elle est de 7855 mg/kg chez le lapin.

    Les signes cliniques observés sont un effet narcotique (narcose, apathie, coma), une irritation des muqueuses gastro-intestinale (voie orale) ou respiratoire et oculaire (inhalation), des modifications hépatiques (augmenta­tion du poids du foie et du taux de protéines microsomiales à 1000 mg/kg par voie orale chez la souris ; élévation des transaminases à 7320 mg/m3 par inhalation chez le rat) et rénales (voie orale) et une dilatation cardiaque (inhalation). Une administration orale de 1000 mg/kg induit les enzymes du métabolisme des xénobiotiques chez la souris et diminue le taux de dopamine et de séro­tonine dans l'hypothalamus du rat.

    Le 1,4-dioxane est irritant pour l'œil et le tractus respira­toire ; il n'est pas irritant pour la peau ; cependant, du fait de son potentiel à dissoudre les graisses, il peut provoquer un eczéma après exposition répétée ou prolongée. Il n'est pas sensibilisant pour le cobaye (test de maximisation).

    Toxicité subchronique, chronique

    La cavité nasale, la trachée, les poumons et le foie sont les cibles privilégiées d'une exposition prolongée au 1,4-dioxane par voie orale.

    L'exposition prolongée au 1,4-dioxane provoque, chez le rat et la souris exposés par voie orale (0 à 90 000 ppm dans l'eau de boisson pendant 2 semaines ou 0, 640, 1600, 4000, 10 000 et 25 000 ppm pendant 13 semaines), une mortalité importante à 90 000 ppm, une baisse de poids corporel et de consommation de nourriture et d'eau, une modification des paramètres hématologiques, biochi­miques et urinaires (à partir de 4000 ppm chez le rat et 10 000 ppm chez la souris), une augmentation du poids relatif et absolu des poumons (dès 10 000 ppm, souris des 2 sexes) et des reins (dès 1600 ppm chez le rat des 2 sexes et dès 10 000 ppm chez la souris femelle). Des lésions sont induites dans la cavité nasale (hypertrophie nucléaire et modification éosinophile de l'épithélium olfactif et respi­ratoire, vacuolisation du nerf olfactif), dans la trachée (hypertrophie nucléaire de l'épithélium), dans les pou­mons (accumulation cellulaire, dégénérescence de l'épi­thélium bronchique) et dans le foie (nécrose cellulaire et gonflement de la partie centrale) à partir de 4000 ppm chez la souris mâle, 1600 ppm chez la souris femelle et le rat des 2 sexes. La NOAEL a été établie à 640 ppm dans l'eau de boisson (équivalent à 170 mg/kg/j chez la souris et à 60 mg/kg/j chez le rat).

    Aucune modification n'a été observée après exposition du rat par inhalation à la plus forte concentration (400 mg/m3, 7h/j, 5/sem, pendant 2 ans). Par voie cutanée (solution aqueuse à 80 % sur la peau sans occlusion pen­dant 50 à 100 jours), une expérience ancienne montre, chez le lapin et le cobaye, des lésions rénales et hépatiques semblables à celles observées après exposition orale.

    Effets génotoxiques

    Le 1,4-dioxane est faiblement génotoxique ; les tests in vitro et in vivo donnent des résultats équivoques.

    In vitro, les résultats des tests suivants sont négatifs :

    • mutagenèse bactérienne (test d'Ames) sur Salmonella typhimurium (5 souches différentes) avec et sans activa­tion métabolique ;
    • mutation génique sur cellules ovariennes de hamster chinois (test HGPRT) avec et sans activation métabolique à des concentrations de 0,05 à 10 mg/mL ;
    • augmentation de l'aneuploïdie sur Saccharomyces cerevisiae ;
    • induction d'aberrations chromosomiques sur cellules ovariennes de hamster chinois, avec et sans activation métabolique ;
    • induction de synthèse non programmée de l'ADN dans les hépatocytes primaires de rat.

    D'autres tests ont donné des résultats ambigus :

    • l'induction d'échanges entre chromatides sœurs : positif sur cellules ovariennes de hamster chinois sans activation métabolique, négatif avec activation métabolique ;
    • l'élution alcaline, mettant en évidence des cassures simple brin de l'ADN, positif, dans les hépatocytes de rat en culture, à des concentrations cytotoxiques uniquement ;
    • un essai de transformation cellulaire, sur cellules Balb/3T3, avec activation métabolique, est positif alors qu'un autre est négatif, avec et sans activation métabo­lique.

     

    In vivo, les résultats des tests sont également contradic­toires :

    • le test de létalité dominante est négatif chez la droso­phile et chez le rat (injection intrapéritonéale) ;
    • sur 6 tests d'induction de micronoyaux, par voie orale ou ip chez la souris, un seul présente des résultats positifs (900 - 5000 mg/kg, voie orale) ;
    • il n'y a pas d'induction de synthèse non programmée de l'ADN dans les hépatocytes ou dans les cellules de l'épi­thélium nasal du rat (1000 mg/kg par gavage ou 1 % dans l'eau de boisson pendant 2 semaines) ;
    • le test de létalité récessive liée au sexe est positif à forte concentration chez la drosophile ;
    • le test d'élution alcaline (cassures de l'ADN) est positif dans les cellules hépatiques de rat à des doses supérieures à 2500 mg/kg.
    Effets cancérogènes [10]

    Le 1,4-dioxane est cancérogène chez l'animal ; il provoque notamment des tumeurs hépatiques et nasales.

    Une exposition par inhalation (400 mg/m3, pendant 2 ans) n'induit aucune tumeur chez le rat.

    Par voie orale, dans l'eau de boisson, le 1,4-dioxane augmente l’incidence des adénomes et des carcinomes hépatiques à partir de 500 ppm chez la souris et 1000 ppm chez le rat. De plus, l’incidence des tumeurs de la cavité nasale, des fibromes sous-cutanés et des fibroadénomes mammaires augmente chez les rats mâles exposés à la plus forte dose (5000 ppm) ; à cette même dose chez les femelles, des tumeurs de la cavité nasale et des adénomes mammaires se développent.

    Le mécanisme de cancérogenèse du 1,4-dioxane n'est pas encore élucidé ; cependant, puisqu'il n'est pas considéré génotoxique, l'induction de tumeur pourrait être soumise à un effet de seuil ; les tumeurs hépatiques et nasales sont associées à une cytotoxicité et à des lésions de l'organe, qui semblent se produire à des doses où le métabolisme est saturé. La NOAEL pour la cancérogenèse hépatique est de 0,01 % (équivalent à 10 mg/kg/j) ; la saturation du métabolisme, oxydant le 1,4-dioxane en HEAA et 1,4-dioxane-2-one, se produit à des doses supérieures à 10 mg/kg et provoque une accumulation de 1,4-dioxane-2-ol et d'acide β-hydroxyéthoxy acétique cytotoxique.

    Il est classé cancérogène catégorie 1B par l'Union européenne et dans le groupe 2B (cancérogène possible pour l'homme) par le CIRC.

    Effets sur la reproduction

    Le 1,4-dioxane est embryotoxique chez le rat à des doses toxiques pour les mères. Il n'est pas tératogène.

    Fertilité

    Dans les études à long terme, il n’a pas été montré d’effet du 1,4-dioxane sur les organes reproducteurs du rat ou de la souris.

    Développement

    Des rates exposées par gavage (0-0,25-0,5-1 ml/kg/j, du 6ème au 15ème jour de gestation) présentent, à la plus forte dose, une baisse de la prise de poids et de la consommation de nourriture ; à cette dose, le poids fœtal est diminué, les autres paramètres restant inchangés (nombre d’implantations, de fœtus vivants ou de résorptions).

    Les fréquences des malformations et des anomalies restent dans les limites des valeurs de contrôle même si un léger retard d’ossification est observé dans la zone sternale à la plus forte dose. La NOAEL pour la toxicité maternelle et embryonnaire est 0,5 ml/kg (équivalent à 517 mg/kg/l) [14].

  • Toxicité sur l’Homme

    Lors d’une exposition aiguë très importante, des troubles digestifs, neurologiques puis une insuffisance rénale sont observés (un cas). Le dioxane est irritant (cutané, oculaire et des voies respiratoires) lors d’une exposition aiguë, et un cas de sensibilisation cutanée est décrit. Pour une exposition chronique, plusieurs études rétrospectives n’ont pas retrouvé d’effets sur la santé.  Il n’a pas été mis en évidence d’excès de risque de cancers pour des salariés exposés (faible effectif). Il n’a pas été mis en évidence d’effet génotoxique par le test d’aberrations chromosomiques chez des salariés exposés (faible effectif). Aucune donnée sur la toxicité éventuelle du dioxane pour la reproduction n’est disponible chez l’Homme à la date de publication de cette fiche toxicologique.

    Toxicité aiguë [1, 15, 16]

    Chez l'homme, seul un auteur fait état d'effets systé­miques liés à une exposition aiguë au dioxane. Il s'agit d'une exposition par inhalation d'un salarié à des concentrations moyennes en dioxane de l'ordre de 1690 mg/m3 (470 ppm, soit 47 fois la VME), pendant une semaine sans protection respiratoire, associée à une exposition cuta­née, qui a entraîné des douleurs abdominales, suivies d'une hypertonie et de signes neurologiques, puis le décès par insuffisance rénale ; à l'autopsie, une nécrose hépatique centrolobulaire et rénale et des lésions cérébrales étaient constatées chez ce patient alcoolique.

    Le dioxane entraîne une irritation cutanée lors d'une exposition prolongée, ainsi qu'une irritation oculaire après une exposition par inhalation.

    Douze sujets ont été exposés à du dioxane pendant 15 minutes : à la concentration de 1080 mg/m3 (300 ppm) une irritation nasale, oculaire et thoracique est notée, tandis que la concentration de 720 mg/m3 (200 ppm) est considé­rée comme la concentration maximale acceptable.

    D'autres auteurs rapportent une irritation nasale et thora­cique pour une exposition à 5760 mg/m3 (1600 ppm) de dioxane pendant 10 minutes, à 19 800 mg/m3 (5500 ppm) pendant 1 minute, une irritation oculaire avec sensation de brûlures nasale et thoracique, tandis qu'à 36 000 mg/m3 (10 000 ppm), apparaît une irritation pulmonaire.

    Plusieurs cas de dermatites inflammatoires associées pour certains à un eczéma ont été rapportés chez des sala­riés (ayant une brûlure cutanée) après exposition profes­sionnelle par voie dermale ; le délai d'apparition des symptômes peut être retardé.

    Un cas de sensibilisation cutanée est rapporté chez un homme de 52 ans, qui a développé une dermite de la main gauche après avoir eu un contact quotidien cutané pendant 3 ans avec du dioxane ; les patchs tests (avec le dioxane dilué à 0,5 % dans l'eau) étaient positifs.

    Toxicité chronique [1, 15-17]

    Plusieurs études rétrospectives n'ont pas retrouvé d'effets sur la santé lors d'exposition chronique au dioxane :

    • l'une chez 151 employés de l'industrie textile exposés entre 1 et 6 ans à des concentrations allant jusque 5 fois la VME de 1,1,1-trichloroéthane mélangé à 4 % de dioxane (concentration atmosphérique inconnue) ne note ni ano­malie de l'examen clinique, ni de l'électrocardiogramme, ni du bilan hépatique ;
    • l'autre, parmi 80 salariés exposés à des taux atmosphé­riques de dioxane de 0,18 mg/m3 à 184 mg/m3 (0,05 à 50 ppm), ne retrouve pas d'effet clinique.
    Effets génotoxiques [1, 10, 15-17]

    Absence d'augmentation du nombre d'aberrations chromosomiques dans les lymphocytes de 6 salariés exposés au dioxane, comparés aux contrôles.

    Effets cancérogènes [1, 10, 15-17]

    Deux études de mortalité n'ont pas montré d'excès de risque de cancers chez les salariés professionnellement exposés au dioxane, mais elles portent sur des effectifs restreints d'individus :

    • l'une parmi 165 salariés de la production de dioxane exposés à des concentrations inférieures à 90 mg/m3 (0,1 à 25 ppm) pendant 1 mois à 10 ans ;
    • l'autre chez 74 salariés également affectés à la produc­tion de dioxane exposés pendant 3 à 41 ans (moyenne de durée d'exposition de 25 ans) à des teneurs en dioxane allant jusque 54 mg/m3 (15 ppm) (moyenne autour de 1 ppm).
    Effets sur la reproduction [1, 10, 15-17]

    Aucune donnée n'a été rapportée concernant la toxicité éventuelle pour la reproduction chez l'homme du dioxane.

  • Interférences métaboliques
  • Cohérence des réponses biologiques chez l'homme et l'animal
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