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Phtalate de diisononyle

Fiche toxicologique n° 245

Sommaire de la fiche

Édition : Juillet 2017

Pathologie - Toxicologie

  • Toxicocinétique - Métabolisme

    Par voie orale, le DINP est rapidement absorbé, métabolisé et distribué dans l’organisme, principalement dans le foie, les reins et le sang. L’absorption percutanée est faible. Il n’existe pas de donnée pour l’exposition par inhalation. Le DINP et ses métabolites sont excrétés via les urines et les fèces sans accumulation dans les tissus après 72 heures.

    Chez l'animal
    Absorption

    Par voie orale, les données disponibles chez le rat indiquent qu’une quantité non négligeable de DINP est absorbée 72 heures après l’administration par gavage (49 % d’une dose de 50 mg/kg) ; lorsque la dose administrée augmente (500 mg/kg), un phénomène de saturation apparaît et le pourcentage d’absorption diminue à 39 %.

    Par voie cutanée, l’absorption est lente et faible, le pourcentage absorbé de DINP pur appliqué sur la peau est de 4 % maximum en 7 jours chez le rat. Des études comparatives menées in vitro ont permis de montrer que l’absorption cutanée chez l’homme est encore plus faible[1].

    Par inhalation, il n’y a pas de donnée disponible pour le DINP. L’estimation de l’absorption peut se faire par analogie avec le phtalate de diisodécyle qui possède un carbone de plus sur la chaîne latérale, pour lequel les données chez le rat indiquent qu’il est absorbé lorsqu’il est sous forme d’aérosol (environ 75 %) [1].

    Distribution

    Après ingestion chez le rat, le DINP se retrouve principalement dans le foie, les reins et le sang. De petites quantités sont présentes dans les graisses et les testicules.

    Vingt quatre heures après l’application cutanée de 0,2 mL de DINP pur sur la peau de rats, seulement 0,3 % de la dose appliquée est détectée dans les urines, les fèces, le tractus gastro-intestinal et les tissus ; la majorité de la dose est retrouvée au niveau du site d’application.

    Métabolisme

    Le DINP est dé-estérifié en phtalate de mono-isononyle (MINP) par une lipase intestinale puis absorbé et métabolisé, par oxydation de la chaîne latérale du groupe ester ou par hydrolyse, en acide phtalique. Dans le foie, les deux métabolites majeurs identifiés sont le phtalate de mono-isononyle (MINP) et le phtalate de mono-oxo-isononyle (MOINP). D’autres métabolites ont été identifiés dans les urines et les fèces : le phtalate de mono-carboxy-isooctyle (MCIOP) et le phtalate de mono-hydroxy-isononyle (MHINP). 

    Excrétion

    Après administration d’une faible dose unique de DINP par gavage (rat, 50 mg/kg), l’élimination de la radioactivité est rapide (principalement dans les 24 heures suivant l’exposition) et se partage équitablement entre urine et fèces. Dans les urines collectées, l’acide phtalique est majoritairement retrouvé, sa quantité diminuant avec la dose ; dans les fèces, le pourcentage de diester augmente avec la dose, indiquant un phénomène de saturation (8 % pour 50 mg/kg et 41 % pour 500 mg/kg) et l’acide phtalique n’est quasiment pas détecté.

    Après administration orale de 300 mg/kg de DINP à des rats, le métabolite majeur identifié dans les urines est le phtalate de mono-carboxy-isooctyle (MCIOP, 82 %) ; viennent ensuite en faibles quantités le phtalate de mono-hydroxy-isononyle (MHINP, 8 %) et le MOINP (3 %) [11].

    L’augmentation des doses entraîne une élimination fécale plus importante : ainsi, après ingestion par des rats de 2500 mg/kg/j de DINP radiomarqué pendant 5 jours, la majorité de la radioactivité est mesurée dans les fèces en 72 heures (85 %) et de faibles quantités sont retrouvées dans les urines (12 %).

    L’excrétion des métabolites dans l’urine est biphasique.

    Quelle que soit la voie, aucune accumulation n’est observée 72 heures après l’exposition.

    Chez l'Homme

    A la suite de l’administration de 98,5 mg de DINP radiomarqué, via l’alimentation, à un homme de 63 ans, les métabolites urinaires ont été dosés pendant les 48 heures suivant l’exposition. Seulement 2 % de la dose administrée est éliminée sous forme de phtalate de mono-isononyle (MINP) ; les métabolites majeurs identifiés sont le MHINP (phtalate de mono-hydroxy-isononyle, 20 % de la dose administrée), le MOINP (phtalate de mono-oxo-isononyle, 10 % de la dose administrée) et le MCIOP (phtalate de mono-carboxy-isooctyle, 10 % de la dose administrée). L’élimination de ces métabolites est multiphasique et varie entre les métabolites oxydés (MHINP, MOINP et MCIOP) et non oxydés (MINP). Ainsi, au cours de la 1ère phase, la demi-vie d’élimination urinaire du MINP est de 3 heures, alors que pour les métabolites oxydés elle est de 5 heures ; de même, lors de la 2nde phase, les demi-vies sont de 12 heures pour le MINP et de 18 heures pour les métabolites oxydés [10, 12]

    Surveillance Biologique de l'exposition

    Les dosages des MHINP, MOINP et MCIOP urinaires en fin de poste et fin de semaine de travail sont proposés pour la surveillance biologique des sujets professionnellement exposés car il s’agit des 3 métabolites principaux du DINP. Chez 5 salariés de l’industrie des plastiques (joints d’étanchéité de voiture), des taux urinaires moyens de MHINP, MOINP et MCIOP en fin de poste, de l’ordre de 117, 44 et 58 µg/L respectivement sont observés ; dans la fabrication du PVC (film) , des taux urinaires moyens de MCIOP en fin de poste, de l’ordre de 34 à 51 µg/L sont notés. Des taux urinaires non nuls de MHINP, MOINP et MCIOP sont retrouvés dans la population générale allemande non professionnellement exposée (médianes inférieures à 4,7, 1,7 et 5,3 µg/L respectivement).

    Il n’existe pas de valeur biologique d'interprétation pour ces paramètres pour la population professionnellement exposée.

  • Mode d'actions
  • Toxicité expérimentale
    Toxicité aiguë

    Les données disponibles chez l’animal montrent que le DINP présente une toxicité aiguë faible quelle que soit la voie d’exposition. Il est très légèrement irritant pour les yeux et la peau et ne semble pas sensibilisant par voie cutanée.

    Par voie orale, les DL50 chez le rat sont supérieures à 10 g/kg ; après ingestion de fortes doses, les rats présentent un mauvais état général, avec dyspnée, apathie et respiration difficile.

    Par inhalation, la CL50 est supérieure à 4,4 mg/L (4 heures d’exposition) [15]. Aucune mortalité n’est observée, le poids des animaux reste stable et les poumons ne présentent aucune lésion macro ou microscopique [16].

    Par voie cutanée, il n’y a pas de toxicité systémique évidente à la dose maximale testée de 3,2 g/kg [16].

    A la suite de l’administration répétée, pendant 14 jours, de DINP à des souris (gavage, 0 – 0,2 – 2 – 20 et 200 mg/kg/j), des signes de stress oxydant et une réponse inflammatoire sont observés au niveau du foie et des reins. Dès 20 mg/kg/j, une augmentation des niveaux en cytokines pro-inflammatoires (interleukine-1 et facteur de nécrose tumorale TNF-α) est notée dans ces organes ; à la dose la plus forte, une accumulation d’espèces réactives de l’oxygène se produit [17].

     

    Irritation, sensibilisation [16]

    Chez le lapin, l’application de DINP pendant 4 heures sur la peau intacte, sous pansement semi-occlusif, entraîne l’apparition d’un érythème très léger chez 2 animaux, après 1 heure et 24 heures. L’application sur la peau abîmée pendant 24 heures conduit à l’apparition d’un érythème et d’un œdème légers. Dans tous les cas, les effets sont réversibles et disparaissent dans les 72 heures.

    Au niveau oculaire, une irritation de la conjonctive et des sécrétions sont observées chez les lapins, dans les 24 heures suivant l’application du DINP, effets réversibles après 72 heures ; une légère opacité de la cornée a aussi été rapportée dans une étude, 72 heures après l’application (pas de donnée concernant la réversibilité).

    En ce qui concerne la sensibilisation cutanée, deux tests de Buehler ont été effectués chez le cobaye : dans le plus ancien, un effet faiblement positif est observé (mais en présence de réponse légèrement positive aussi chez les témoins) alors qu’aucun potentiel sensibilisant n’est mis en évidence dans le second. Aucune donnée n’est disponible pour la sensibilisation respiratoire. 

    Toxicité subchronique, chronique [16]

    L’exposition répétée par voie orale entraîne chez les rongeurs des effets hépatiques et rénaux, non observés chez le primate. Au niveau hépatique, une hépatomégalie est rapportée, associée à des perturbations enzymatiques, signe de prolifération de peroxysomes. Cette propriété, spécifique du rongeur, est également observée avec d’autres composés des phtalates.

    A la suite de l’administration quotidienne à des rats de DINP, pendant 13 semaines (0 - 77 – 227 - 460 - 767 ou 1554 mg/kg pc/j dans la nourriture), le poids des reins et du foie augmente et des perturbations enzymatiques (augmentation des taux de transaminases), biochimiques (baisse des taux de cholestérol) et des paramètres urinaires sont rapportées à partir de 227 mg/kg pc/j.

    Chez des souris, exposées à 365 – 972 - 2600 et 5770 mg/kg pc/j de DINP dans la nourriture pendant 13 semaines, aucun effet n’est rapporté à la plus faible dose. A partir de 972 mg/kg pc/j, le poids du foie augmente chez tous les animaux alors que celui des reins diminue chez les mâles, avec une diminution de certains paramètres urinaires à la plus forte dose (sodium, chlorure et créatinine). A partir de 2600 mg/kg pc/j, une diminution du poids des épididymes et des testicules est observée chez les souris. Chez les animaux exposés à la plus forte dose, les effets hépatiques se caractérisent par une augmentation du poids du foie, une pigmentation anormale et une légère dégénérescence/nécrose des hépatocytes ; sont aussi rapportées une nécrose des tubules rénaux, la présence de spermatozoïdes anormaux et une déplétion lymphoïde au niveau de la rate et du thymus.

    Chez le singe, à l’exception d’une diminution du poids corporel, aucun effet hépatique ou rénal n’est rapporté à la suite d’une exposition à 2500 mg/kg pc/j de DINP dans la nourriture, pendant 13 semaines.

    Lors des études chroniques réalisées chez le rat et la souris (2 ans, dans la nourriture) les mêmes effets hépatiques et rénaux sont observés, effets dont la fréquence d’apparition et la sévérité augmentent avec le temps et la dose d’exposition. Ainsi, chez le rat, des néphropathies chroniques sont rapportées uniquement chez les mâles à partir de 358 - 442 mg/kg pc/j de DINP ; les paramètres urinaires sont modifiés avec une augmentation du volume urinaire et de l’urée et une diminution des taux de calcium, chlore et créatinine. A la même dose, des modifications hépatiques (augmentation de l’activité des transaminases et de la palmitoyl CoA oxydase) et des effets histologiques (spongiose hépatique) sont observés chez les rats mâles et femelles. A partir de ces effets, un NOAEL de 88 mg/kg pc/j a été déterminé chez le rat. Chez la souris, des néphropathies sont toutefois aussi observées chez les femelles, mais seulement à la plus forte dose testée (soit 1887 mg/kg pc/j) ; des signes de prolifération de peroxysomes sont rapportés avec une augmentation du poids du foie et de l’activité de la palmitoyl CoA oxydase.

    Les effets rénaux rapportés ci-dessus correspondent aux critères qui définissent la néphropathie à α2-microglobuline urinaire, pathologie rénale spécifique au rat mâle et non extrapolable à l’homme : accumulation dose dépendante de la protéine α2-microglobuline dans les reins conduisant à l’installation progressive d’une néphropathie pouvant entraîner l’apparition de tumeurs rénales.

    Une étude subchronique récente a étudié chez la souris les effets neurotoxiques du DINP, administré par voie intra-gastrique (0 - 0,2 - 2 – 20 – 200 mg /kg pc/j, pendant 14 jours). Des déficits cognitifs et une anxiété accrue sont rapportés chez les animaux exposés à 20 ou 200 mg/kg pc/j ; pour ces mêmes doses, des altérations histopathologiques ont été observées au niveau du cerveau (gonflement des cellules, raccourcissement ou disparition des dendrites apicales), ainsi qu’une augmentation des marqueurs de stress oxydant et d’inflammation [18]

    Effets génotoxiques [10]

    Le DINP ne présente pas de potentiel génotoxique.

    Des résultats négatifs ont été obtenus lors de la réalisation des tests de mutagenèse et de clastogenèse suivants :

    • In vitro, des essais de mutations géniques sur Salmonella typhimurium (test d’Ames) et sur cellules de lymphomes de souris, ainsi que des essais d’aberrations chromosomiques sur cellules ovariennes de hamster chinois, avec ou sans activation métabolique ;
    • In vivo, au cours de tests des micronoyaux réalisés chez des souris, exposées par gavage à 500, 1000 et 2000 mg/kg pendant 2 jours, ou chez des rats exposés par gavage à 0,5-1,7-5 mg/kg/j, pendant 5 jours.
    Effets cancérogènes [10, 16]

    L’administration prolongée de DINP entraîne l’apparition de tumeurs hépatiques chez le rat et la souris, de leucémies chez le rat et des tumeurs rénales chez le rat mâle uniquement. Dans le cas des tumeurs hépatiques, les mécanismes de cancérogénicité impliqués n’ont pas encore tous été identifiés et il est probable que certains soient indépendants des récepteurs PPARα : la pertinence d’une extrapolation de ces tumeurs chez l’homme est donc difficile à établir. Concernant les tumeurs rénales, le mécanisme d’action impliqué n’est pas jugé extrapolable à l’homme ; pour les leucémies, l’incidence spontanée élevée rend difficile l’interprétation des résultats obtenus. 

    Des essais de transformation cellulaire, réalisés sur des fibroblastes de souris, donnent des résultats divergents, dont un positif qui est en accord avec le mode d’action connu des proliférateurs de peroxysomes [10].

    De nombreuses études de cancérogénèse ont été menées chez le rat et la souris [10, 16], avec administration du DINP dans l’alimentation et ont permis de mettre en évidence :

    • une incidence accrue de néoplasies hépatiques statistiquement significative (adénomes et carcinomes) dans les deux espèces. Cette augmentation s’observe à partir de  733-885 mg/kg pc/j chez le rat mâle et femelle et 335 mg/kg pc/j chez la souris mâle.

    Un grand nombre de données relatives aux effets hépatiques consécutifs à l’administration de phtalates montrent qu’ils résultent de la prolifération de peroxysomes hépatiques (induction enzymatique, hépatomégalie et augmentation de la synthèse réplicative de l’ADN chez le rat et la souris). En revanche, la prolifération hépatique ne se produit ni chez le marmouset (13 semaines d’administration jusqu’à la dose de 2500 mg/kg/j), ni chez le singe Cynomolgus (2 semaines d’administration à la dose de 500 mg/kg/j), ni au niveau des hépatocytes humains.

    Des investigations récentes confortent cette spécificité d’espèce. Ainsi, il a été montré que les proliférateurs de peroxysomes exerçaient leurs effets via l’activation du récepteur PPARα et que le gène responsable de cette activation ne s’exprimait que très faiblement chez l’homme.

    Cependant, il doit être souligné que le DEHP (phtalate de bis(2-éthylhexyle)), qui entraîne des effets assez similaires et était classé par le CIRC dans le groupe 3 « agent ne pouvant être classé quant à sa cancérogénicité pour l’homme en raison d’indications insuffisantes chez l’homme et d’indications limitées chez l’animal », a vu sa classification révisée en 2012 : il est désormais classé dans le groupe 2B « peut être cancérogène l’homme ». De nouvelles études sur le DEHP ont en effet suggéré l’implication probable d’autres mécanismes de cancérogénicité que la prolifération de peroxysomes et l’activation des récepteurs PPARα.

    • l’apparition de tumeurs rénales uniquement chez le rat mâle à partir de 733 mg/kg pc/j de DINP. Comme cela a été décrit dans la section toxicité chronique, le mécanisme de toxicité et la pathologie sont spécifiques au rat mâle (néphropathie à α2-microglobuline urinaire) et non extrapolables à l’homme. L’accumulation rénale d’α2-microglobuline est en effet observée dès 152 mg/kg pc/j : elle est localisée dans les zones de prolifération cellulaire, liée à la néphropathie tubulaire.
    • une augmentation significative de l’incidence des leucémies à cellules mononucléées chez le rat Fischer F344, dès 152 mg/kg pc/j chez les mâles et dès 184 mg/kg pc/j chez les femelles, espèce dont le taux de fréquence spontanée est élevé. L’augmentation de l’incidence des leucémies est sans équivalent chez l’homme et n’est pas prise en considération dans les évaluations de la cancérogénicité humaine[19].
    Effets sur la reproduction

    Le DINP est à l’origine d’effets sur les organes reproducteurs, principalement mâles, aussi bien chez les adultes (variation de poids des testicules, épididymes et ovaires), que chez les fœtus et les nouveau-nés (atrophie et modifications histologiques des testicules, hypospermatogenèse, baisse de la production de testostérone, effets sur les spermatozoïdes…). Chez les nouveau-nés, sont aussi rapportées une diminution des taux de viabilité et de survie pendant la lactation, des variations squelettiques et viscérales, et une diminution du poids moyen. Le DINP semble atteindre spécifiquement le développement de l’appareil reproducteur des mâles (exposition fœtale et/ou pré pubère), en lien au moins en partie avec un effet anti-androgénique, toutefois beaucoup plus faible que celui d’autres phtalates tel que le DEHP.

    Fertilité [15, 20]

    Les effets sur la reproduction chez le rat ont été examinés dans des études permettant une exposition sur une et deux générations.

    Au cours de l’étude une génération, les rats ont été exposés pendant 16 semaines (10 semaines avant l’accouplement et jusqu’au sevrage) à 0 – 0,5 – 1 ou 1,5 % de DINP dans la nourriture (0 ; 301-923 ; 622-1731 ; 966-2246 mg/kg pc/j). Chez les adultes, seules des altérations du poids des organes reproducteurs sont rapportées à la plus forte dose, sans lésion histologique associée : augmentation du poids des testicules et de l’épididyme chez les mâles, et diminution du poids des ovaires chez les femelles. Les paramètres liés à la fertilité sont inchangés (accouplement, fécondité ou durée de la gestation). Concernant la génération F1, une diminution du nombre de nouveau-nés vivants et du taux de survie pendant la lactation est rapportée à la dose la plus élevée (966 à 2246 mg/kg pc/j). A partir de cette étude, une NOAEL pour la fertilité de 622 mg/kg pc/j peut être déterminée.

    L’étude de reproduction sur 2 générations (0 ; 114-395 ; 235-758 ; 467-1541 mg/kg pc/j, traitement 10 semaines avant l’accouplement et jusqu’au sevrage de la génération F2) n’a pas mis en évidence d’effet sur les indices de fertilité, le nombre de nouveau-nés vivants ou le taux de survie pendant la lactation.

    Développement

    Dans deux études sur le développement (administration par gavage du DINP à des rates gestantes, du 6e au 15e jour de gestation), une augmentation de l’incidence des variations squelettiques (côtes surnuméraires cervicales et lombaires) et des variations viscérales (dilatation du bassinet) est observée à la plus forte dose (1000 mg/kg/j), en présence d’une très faible toxicité maternelle (baisse du poids corporel réversible). A partir de ces données, une NOAEL pour le développement prénatal de 500 mg/kg pc/j peut être déterminée [21, 22].

    Les effets sur l’appareil reproducteur mâle ont été étudiés chez des fœtus, après exposition des rates à 50, 250 ou 750 mg/kg pc/j de DINP, du 12e au 19e jour de gestation, par gavage. La distance anogénitale est inchangée alors que la concentration en testostérone dans les testicules diminue fortement aux 2 plus fortes doses, dans les 2 heures suivant l’administration, avant un retour à la normale après 24 heures ; des modifications histologiques sont observées dans les testicules aux mêmes doses (augmentation du nombre de gonocytes multinucléés, agrégation des cellules de Leydig) [23].

    Une étude récente a montré l’apparition des gonocytes multinucléés et de l’agrégation des cellules de Leydig dès 100 mg/kg  pc/j (rats, gavage, du 12e au 20e jour de gestation) ainsi que la modification de l’expression de certains gènes impliqués dans la stéroïdogenèse dès 10 mg/kg pc/j [24]. A la suite d’une exposition à 750 mg/kg pc/j de DINP, du 7e au 21e jour de gestation par gavage, les fœtus mâles de rats présentent une baisse du taux de testostérone testiculaire et du taux de testostérone plasmatique, et une augmentation du taux d’hormone lutéinisante. Ces effets ne sont pas retrouvés chez des animaux exposés aux mêmes dose mais seulement du 13e au 17e jour de gestation [25].

    La baisse de poids des nouveau-nés des deux sexes a été observée dans les études de reproduction sur 1 ou 2 générations citées ci-dessus, à toutes les doses et en absence de toxicité maternelle, ainsi que dans les études avec exposition périnatale [26, 27]

    Des rates gestantes ont  été exposées du 15e jour de gestation au 21e jour après la naissance à des concentrations croissantes de DINP dans la nourriture (0, 2, 20, 200 et 1000 mg/kg pc/j). Aucun effet n’est rapporté au niveau de la taille des portées ou du sexe-ratio. Par contre, pour toutes les doses, le poids moyen des nouveau-nés est réduit (mâles et femelles) et la distance anogénitale diminuée (uniquement chez les mâles) [27].

    Une exposition périnatale au DINP (gavage, du 14e jour de gestation au 3e jour après la naissance), à la dose de 750 mg/kg pc/j, induit des effets sur l’appareil reproducteur et la différenciation sexuelle des mâles (augmentation de la non-régression des mamelons, atrophie testiculaire, non développement des épididymes, hypospermatogenèse). De plus, chez les animaux exposés à 1500 mg/kg pc/j, la distance anogénitale diminue [15, 28].

    A la suite d’une exposition de rates gestantes du 7e jour de gestation au 17e jour après la naissance (gavage, 300 – 600 – 750 ou 900 mg/kg pc/j), une diminution de la distance anogénitale (à la plus forte dose), la persistance des mamelons (à partir 750 mg/kg pc/j) et des effets testiculaires (à partir de 600 mg/kg pc/j) sont rapportés chez les nouveau-nés mâles. Les effets ne sont plus visibles 90 jours après la naissance. Les changements testiculaires incluent notamment une motilité spermatique réduite, la présence de cellules germinales multinucléées ou l’augmentation du nombre de gonocytes dans les tubes séminifères [29].

    Les effets rapportés, réversibles pour certains, apparaissant pour de fortes doses et non systématiquement retrouvés dans les études, ne sont à l’origine d’aucune altération de la fertilité ou des performances reproductives. Le DINP semble atteindre spécifiquement le développement de l’appareil reproducteur des mâles (exposition fœtale et/ou pré pubère), lié au moins en partie à un effet anti-androgénique, toutefois beaucoup plus faible que celui d’autres phtalates tel que le DEHP. Par ailleurs, les mécanismes mis en jeu ne sont pas clairement identifiés [2, 28].

  • Toxicité sur l’Homme

    Il existe peu de données concernant les effets chez l’homme de l’exposition au DINP. Aucune donnée concernant des éventuels effets génotoxiques ou cancérogènes du DINP n’est disponible chez l’homme à la date de publication de cette fiche toxicologique. Certaines études suggèrent une association entre exposition environnementale au DINP, notamment en période prénatale, et effets de type anti-androgénique chez l’homme.

    Toxicité aiguë
    Aucune donnée n’est disponible chez l’homme à la date de publication de cette fiche toxicologique.
    Toxicité chronique

    Un cas de dermatite de contact d’irritation est rapporté chez une enfant de 10 ans ayant manipulé le matériau de remplissage d’une balle de jeu. Le rôle possible du DINP, un des composants, mais aussi celui du nettoyant utilisé pour retirer le matériau collant est évoqué. Cependant, aucune exploration n’est réalisée [30].

    Aucune réaction cutanée irritative ou allergique n’est observée lors de tests cutanés chez des volontaires pour évaluer le potentiel irritant et sensibilisant de 7 phtalates dont le DINP : test d’irritation préalable avec application unique des substances non diluées, sous occlusion pendant 24h, chez 15 sujets ; test HRIPT (Human repeated insult patch test) avec application répétée sous occlusion des composés purs (phases d’induction et de provocation) chez 104 personnes [31].

    Effets génotoxiques

    Aucune donnée n’est disponible chez l’homme à la date de publication de cette fiche toxicologique.

    Effets cancérogènes

    Aucune donnée n’est disponible chez l’homme à la date de publication de cette fiche toxicologique.

    Effets sur la reproduction

    En milieu professionnel, aucune donnée n’est disponible chez l’homme à la date de publication de cette fiche toxicologique.

    Certaines études épidémiologiques en population générale masculine mettent en évidence une association entre exposition environnementale au DINP (estimée à partir des dosages de métabolites urinaires ou de métabolites sériques secondaires) et des perturbations des hormones reproductrices suggérant plusieurs hypothèses mécanistiques (effet anti-androgénique et action sur la sécrétion centrale de gonadotrophines [32] ou à l’inverse effet androgénique [33]).

    D’autres études se sont intéressées à l’exposition au DINP en période prénatale, particulièrement critique pour les effets sur la fonction reproductrice masculine. Une étude retrouve une association négative entre les niveaux de certains métabolites sériques secondaires du DINP chez des femmes enceintes en Suède (prélèvements de la 6e à la 35e semaine de grossesse) et le volume séminal et testiculaire chez leurs fils à l’adolescence ainsi qu’une association positive avec les taux de FSH et LH chez ces mêmes adolescents [34]. Deux études évaluant l’éventuelle association entre exposition prénatale au DINP (estimée par le dosage des métabolites urinaires chez les mères pendant le premier trimestre de grossesse) et distance ano-génitale chez les nourrissons de sexe masculin, pour une des études, ou chez les nouveau-nés des deux sexes, pour l’autre étude, ont des résultats contradictoires [35, 36].

    Il n’y a pas d’association consistante retrouvée entre expositions pré- ou périnatales au DINP et cryptorchidie ou hypospadias chez l’enfant [37, 38].

    Les résultats de ces études transversales sur des effectifs faibles ainsi que les éventuelles implications cliniques en termes d’incidence sur la fonction reproductrice masculine restent à confirmer.

  • Interférences métaboliques
  • Cohérence des réponses biologiques chez l'homme et l'animal
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