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Silice cristalline

Fiche toxicologique n° 232

Sommaire de la fiche

Édition : Juillet 2022

Pathologie - Toxicologie

Les informations toxicologiques ont été extraites du Rapport d’expertise collective de l’Anses sur les « Dangers, expositions et risques relatifs à la silice cristalline ». Des éléments complémentaires issus de rapports et d’études bibliographiques récentes sont également rapportés.

  • Toxicocinétique - Métabolisme

    Les particules inhalées de silice cristalline se déposent dans les voies respiratoires et y persistent. Une faible part est solubilisée dans les liquides biologiques et excrétée dans les urines. Par voie orale, l’absorption est faible et les particules sont excrétées sous forme inchangée.

    Chez l'Homme

    Chez l’homme, il existe peu de données sur les charges pulmonaires en poussière de quartz et aucune conclusion n’a été arrêtée sur la clairance d’élimination. On trouve du quartz dans les macrophages broncho-alvéolaires et les expectorations de patients silicotiques. A l'autopsie de mineurs de roche dure exposés depuis 14 à 36 ans, les masses et les proportions de quartz retenues dans les poumons variaient considérablement (25 à 264 mg par poumon) ; la réponse pathologique de ces mineurs était variable sans bonne corrélation entre la teneur en quartz cristallin du poumon et le score pathologique[14, 1]. À défaut de mesure standardisée de la demi-vie des particules de silice cristalline dans les organes, l’absence de solubilité dans les liquides biologiques [1] et les résultats des études de rétention chez des travailleurs ayant été exposés à ces particules [1] sont en faveur d’une forte biopersistance de ces particules dans les tissus ou liquides biologiques.

  • Mode d'actions [1]
    • Aspects généraux : 

    De nombreux types cellulaires peuvent se trouver au contact direct des particules ou être exposés à des facteurs paracrines produits par d’autres cellules, qui peuvent agir sur leurs fonctions et leur intégrité. On peut citer les cellules épithéliales trachéales et bronchiques de l’épithélium alvéolaire (pneumocytes de type I et II) et vasculaire (cellules endothéliales) et du mésothélium pleural (cellules mésothéliales), ainsi que les fibroblastes du stroma. De plus, on trouve les macrophages alvéolaires et les cellules immunitaires circulantes telles que les monocytes et les lymphocytes. Les interactions entre les cellules et les particules provoquent des réponses cellulaires qui sont des mécanismes de défense de la cellule pour maintenir son homéostasie et/ou l’intégrité de son environnement[1].

     

    Les particules de silice cristalline, après inhalation, sont phagocytées par les MA aux fins d’élimination. Cette interaction avec les particules entraîne l'activation des macrophages qui libèrent une variété de médiateurs : des espèces réactives de l'oxygène (ROS) et de l'azote (RNS), des lipides bioactifs, des protéases, des cytokines inflammatoires et des facteurs pro-fibrotiques qui jouent un rôle essentiel dans la toxicité pulmonaire. Ces médiateurs entraînent le recrutement d’autres cellules immunitaires (macrophages, granulocytes, lymphocytes), l’induction de lésions pulmonaires, d’une inflammation et de fibroses aboutissant notamment à une silicose [16].

     

    • Inflammation persistante :

    L'inflammation persistante chez l’animal exposé par inhalation est considérée comme la principale cause de développement de la silicose, du cancer pulmonaire et des pathologies auto-immunes.

    Les espèces réactives de l'oxygène qui sont générées non seulement à la surface des particules de silice cristalline, mais également par les cellules phagocytaires et épithéliales exposées aux particules de quartz peuvent provoquer des lésions cellulaires et pulmonaires, notamment des dommages à l'ADN. Une lésion pulmonaire peut être initiée et amplifiée par une inflammation sévère. Différents produits (facteurs chimiotactiques, cytokines, facteurs de croissance) libérés par les macrophages alvéolaires activés (et également en train de mourir) vont non seulement recruter plus de macrophages, mais aussi des leucocytes polymorphonucléaires (PMN) et des lymphocytes, mais également affecter et activer les cellules épithéliales bronchiolaires et alvéolaires [1].

     

    Le mécanisme de la cancérogénicité des particules de silice cristalline chez l’Homme n’est pas établi. Selon le CIRC [14, 15], les données chez l’animal indiquent que trois mécanismes sont impliqués : (i) une génotoxicité indirecte causée par l’altération de la clairance par les macrophages alvéolaires induisant une inflammation pulmonaire persistante, suivie de la libération d’oxydants ; (ii) la génération de radicaux libres extracellulaires induisant un épuisement des défenses anti-oxydantes, des lésions des cellules épithéliales, puis finalement une prolifération de cellules endommagées ; (iii) une génotoxicité directe due à l’internalisation des particules de silice cristalline par les cellules épithéliales pulmonaires, suivie d’une génération intracellulaire de radicaux libres. D’après le CIRC, l’hypothèse privilégiée quant au mode d’action est une génotoxicité indirecte induite par l’inflammation, même si d’autres mécanismes, potentiellement initiés en parallèle, ne peuvent être exclus.

     

     

    • Effets immunitaires : 

    L'inhalation de poussières contenant de la silice cristalline est associée à un certain nombre de maladies aiguës et chroniques, notamment les maladies auto-immunes systémiques.

    Les données expérimentales ex-vivo chez l’homme et l’animal et in vivo chez l’animal, apportent plusieurs données mécanistiques en faveur d’une majoration des phénomènes d’auto-immunité sous l’effet de la silice cristalline : émergence des antigènes d’origine nucléaire (défaut de phacocytose des débris cellulaires…), activation du système immunitaire adaptatif vers la voie TH2 (initiation de la synthèse d’auto-anticorps), majoration de la production d’auto-anticorps via la voie de l’inflammasome et majoration des signaux de danger par une boucle d’amplification, diminution des systèmes de régulation. L'activation du système immunitaire inné conduit à la production de cytokines pro-inflammatoires, l’inflammation pulmonaire, l'activation de l'immunité adaptative, la rupture de la tolérance, des auto-anticorps et des lésions tissulaires.

     

    Ces études démontrent que la silice cristalline et l'amiante peuvent provoquer une auto-immunité chez la souris et le rat mais fournissent peu d’éléments sur les mécanismes possibles. Lorsque ces mécanismes ont été examinés[17], les résultats indiquent un rôle significatif de l’apoptose (mort cellulaire) en tant que source de stimulation immunitaire : l'activation des macrophages alvéolaires induite par la silice entraîne l'apoptose et l'inflammation, des débris cellulaires, la migration de cellules présentatrices d’antigène activées vers les ganglions lymphatiques et l’activation des lymphocytes T et B. Cependant, de nombreuses questions restent sans réponse.

  • Toxicité expérimentale [1]
    Toxicité expérimentale

    Les résultats des études expérimentales chez l’animal suggèrent que l’emphysème, pathologie respiratoire non maligne autre que la silicose, causé par une exposition à la poussière de silice cristalline pourrait précéder la silicose et les pathologies respiratoires observés chez l’Homme. Les données expérimentales disponibles ne mettent pas en évidence de différences en termes de toxicité et de potentiel cancérogène entre les différents polymorphes de la silice cristalline

    Toxicité générale de la silice cristalline :

    Les résultats des études expérimentales chez l’animal suggèrent que l’emphysème, pathologie respiratoire non maligne autre que la silicose, causé par une exposition à la poussière de silice cristalline pourrait précéder la silicose et les pathologies respiratoires observés chez l’Homme [1]. Une étude chez des rats exposés à la poussière de silice cristalline indique notamment que l’emphysème se produit à des doses de silice cristalline inférieures aux doses responsables de fibrose des voies respiratoires ou de l’apparition de nodules silicotiques précoces. Ces résultats supportent les observations issues des études humaines indiquant que l'emphysème induit par la silice cristalline peut se déclarer en l’absence de silicose.

    Les éléments clés dans le développement de la silicose ont pu être identifiés [1] :

    • La structure et la taille des particules de silice et leurs caractéristiques de surface ;
    • Les relations entre la charge de l’exposition et sa durée. Ainsi, il a pu être vérifié sur des modèles animaux qu’une fois la valeur seuil franchie, la pathologie fibrosante se développe et évolue même après l’arrêt de l’exposition ;
    • Le rôle des macrophages alvéolaires incluant le mécanisme initial de formation des nodules silicotiques avec des cycles récurrents de phagocytose de particules de silice par les macrophages avec génération de ERO, mort des macrophages, relargage de facteurs profibrosants puis recapture des particules par d’autres macrophages entraînant un cycle délétère expliquant la progression des lésions même après arrêt de l’exposition ;
    • Le recrutement de cellules inflammatoires (macrophages, lymphocytes T, mastocytes et neutrophiles) conduisant à l’entretien de l’alvéolite, la production de médiateurs / cytokines en lien avec la prolifération cellulaire et la fibrogénèse.

     

    Toxicité comparée des polymorphes :

    Les données expérimentales disponibles ne mettent pas en évidence de différences en termes de toxicité et de potentiel cancérogène entre les différents polymorphes de la silice cristalline [1].

    Mossman et al. 2013, cité dans le rapport de l'ANSES [1]ont analysé des données expérimentales in vitro et in vivo pour des expositions à différents polymorphes de la silice cristalline. Les résultats de 29 études sur cultures cellulaires (plusieurs études ont testé les types de quartz suivants : Min-U-Sil 5, quartz DQ12, Norquartz-75, α-quartz ou non spécifié ; seules 2 études ont utilisé la cristobalite) et de 19 études par inhalation conduites chez des rongeurs (rats et souris) sont ainsi rapportées. Les auteurs indiquent que ces études expérimentales, quelle que soit la méthode d’exposition, n’ont mis en évidence aucune différence en termes de potentiel toxique ou de mécanisme d’action entre plusieurs polymorphes de la silice cristalline. Au terme de cette revue, les auteurs indiquent que les données expérimentales et épidémiologiques analysées ne fournissent aucune preuve de l’existence de différences en termes de potentiels inflammatoires et fibrogéniques entre le quartz et la cristobalite.

    Effets génotoxiques [1]

    La génotoxicité générée par les particules se traduit par des altérations chromosomiques et/ou des mutations géniques, soit directement, soit par l’intermédiaire d’espèces radicalaires ou de dérivés qui endommagent l’ADN.

    Borm et al. (2011) cités dans le rapport de l'Anses [1] ont revu les articles sur la génotoxicité et l’inflammation en réponse à l’exposition à la silice cristalline. Ils font l’hypothèse que l’inflammation chronique conduit à un stress oxydatif et à un endommagement de l’ADN persistants, dans un environnement où sont produites différentes molécules favorisant la survie et la prolifération. Les auteurs proposent que l’inflammation est la principale force qui provoque la génotoxicité (mécanisme secondaire) ; le traitement de surface augmente ou diminue l’internalisation par les macrophages ; la production de radicaux et l’inflammation dépendent du contenu en fer ; l’aire de surface dicte l’inflammation mais pas la production d’espèces radicalaires. Un effet inflammatoire a été observé uniquement dans les études employant du quartz, et non dans celles utilisant le quartz issu de lieu de travail.

    Moller et al. (2013) cités dans [1] ont revu les données d’études qui avaient mesuré l’oxydation de l’ADN (8-oxo-7,8- dihydroguanine), comme marqueur de génotoxicité induite par des particules, dont 10 articles ayant étudié les effets de la silice cristalline. Les auteurs concluent que les résultats des analyses donnent des preuves selon lesquelles l'exposition à des particules, par voie aérienne ou gastro-intestinale, est associée à des niveaux élevés d’altération de l’ADN. L'exposition par voie aérienne est associée à une augmentation dose-dépendante de l’oxydation. Les expositions pulmonaires ont utilisé des doses produisant une surcharge pulmonaire chez le rat. Cependant, Moller et al. (2013) mentionnent que l'induction de 8-oxo-7,8-dihydroguanine se produit à une dose inférieure à ce seuil. Prenant en compte toutes les particules étudiées (amiante, diesel, quartz, carbone nanométrique), les auteurs considèrent que les résultats montrent que ces particules génèrent une génotoxicité dose-dépendante, sans seuil spécifique, bien que les effets à faibles doses n’aient pas été bien étudiés. Cette étude montre aussi qu’il n’existe aucune preuve expérimentale directe pour supporter la notion selon laquelle l'inflammation serait un prérequis pour l’oxydation de l'ADN dans le poumon.

    Une méta-analyse non quantitative (hétérogénéité et nombre limité des études) a permis de soutenir l’hypothèse selon laquelle l’exposition à différents types de particules, dont la silice, est associée à une augmentation significative des échanges de chromatides soeurs, et une augmentation des micronoyaux.

    Selon le CIRC [14, 15], les données chez l’animal indiquent que trois mécanismes sont impliqués : (i) une génotoxicité indirecte causée par l’altération de la clairance médiée par les macrophages alvéolaires induisant une inflammation pulmonaire persistante, suivie de la libération d’oxydants ; (ii) la génération de radicaux libres extracellulaires induisant un épuisement des défenses anti-oxydantes, des lésions des cellules épithéliales, puis finalement une prolifération de cellules endommagées ; (iii) une génotoxicité directe due à l’internalisation des particules de silice cristalline par les cellules épithéliales pulmonaires, suivie d’une génération intracellulaire de radicaux libres. D’après le CIRC, l’hypothèse privilégiée quant au mode d’action est une génotoxicité indirecte induite par l’inflammation, même si d’autres mécanismes, potentiellement initiés en parallèle, ne peuvent être exclus.

    Effets cancérogènes

    L’apparition de tumeurs pulmonaires est observée uniquement chez le rat. Les données expérimentales disponibles ne mettent pas en évidence de différences en termes de toxicité et de potentiel cancérogène entre les différents polymorphes de la silice cristalline.

    La monographie du CIRC [15]rapporte qu’une augmentation de l’incidence de tumeurs pulmonaires a été observée dans plusieurs études réalisées chez le rat exposé par inhalation à de la silice cristalline à des concentrations allant de 1 à 52 mg/m3 pendant des durées comprises entre 29 jours et 24 mois.

    Contrairement aux études réalisées chez le rat, aucun développement de tumeurs n’a été observé dans les poumons de souris exposées à des concentrations allant jusqu’à 2 mg/m3 pendant 150 à 570 jours, avec cependant un nombre d’animaux très limité dans cette étude [15].

    L’inhalation de silice cristalline chez le hamster à des concentrations allant jusqu’à 3 mg/m3 pendant 18 mois n’a pas induit non plus de cancer pulmonaire. Des résultats similaires ont été rapportés après administration intra-trachéale à des poussières de quartz.

    Le rat est donc une espèce plus sensible à la toxicité pulmonaire de la silice cristalline, par rapport à la souris et au hamster. Des études comparatives ont aussi montré une réponse pulmonaire plus sévère chez le rat que chez l’Homme. Le CIRC a conclu que la preuve de la cancérogénicité du quartz est suffisante chez l’animal et limitée pour la tridymite et la cristobalite. Chez l’animal, l’hypothèse de mode d’action privilégiée est une génotoxicité indirecte induite par l’inflammation, même si d’autres mécanismes, potentiellement initiés en parallèle, ne peuvent être exclus.

    Le CIRC [15] propose trois mécanismes pour expliquer la cancérogénicité de la silice cristalline chez le rat et considère le premier comme le principal mode d’action expliquant les effets observés :

    • En premier lieu, du fait de sa cytotoxicité, la silice cristalline altèrerait la clairance médiée par les macrophages alvéolaires induisant une diminution de la phagocytose, une persistance des particules de silice cristalline dans les poumons et une inflammation liée à la libération de chemokines et de cytokines. Ainsi, chez le rat, les polynucléaires neutrophiles libéreraient des oxydants induisant une génotoxicité et une prolifération des cellules pulmonaires épithéliales conduisant à un cancer pulmonaire. Ce mécanisme peut conduire à un effet de surcharge (overload effect) conduisant dans le modèle du rat à l’inflammation, la fibrose et le cancer et ce indépendamment de la nature physico-chimique des particules testées.
    • Un second mécanisme consiste en la génération de radicaux libres extracellulaires par la silice cristalline épuisant la réserve d’antioxydants présents dans le fluide pulmonaire et induisant des lésions des cellules épithéliales suivies d’une prolifération cellulaire.
    • Enfin, le dernier mécanisme proposé est basé sur la prise en charge des particules de silice cristalline par les cellules épithéliales suivie d’une génération intracellulaire de radicaux libres induisant directement une génotoxicité.

    Les données épidémiologiques et expérimentales disponibles ne mettent pas en évidence de différences en termes de toxicité et de potentiel cancérogène entre les différents polymorphes de la silice cristalline. Enfin, si la présence de particules ultra fines (PUF) de silice cristalline est possible dans certaines activités professionnelles, il n’y a pas actuellement d’études permettant de tester le pouvoir cancérogène des PUF de silice cristalline par rapport aux particules microniques.  

    Effets sur la reproduction

    Aucune donnée n’est disponible chez l’animal à la date de rédaction de la fiche.

  • Toxicité sur l’Homme

    Les données épidémiologiques et expérimentales analysées par le groupe d’experts de l’Anses n’ont pas mis en évidence de différences en termes de toxicité et de potentiel cancérogène entre les différents polymorphes de la silice cristalline. L’inhalation répétée de silice cristalline est à l’origine d’une pneumoconiose appelée silicose et caractérisée par une fibrose pulmonaire avec lésions nodulaires. La reconnaissance des formes ganglionnaires isolées comme des formes précoces à part entière de silicose pulmonaire est aujourd’hui discutée. L’exposition à la silice cristalline (même sans silicose) est associée à d’autres pathologies respiratoires non malignes comme la bronchite chronique, l’altération de la fonction respiratoire et la tuberculose. Les données analysées par le groupe d'experts de l’Anses sont en faveur d’un lien de causalité certain et fort avec la sclérodermie systémique, un lien de causalité certain avec la polyarthrite rhumatoïde et le lupus érythémateux systémique, un lien de causalité possible avec les vascularites à ANCA positives, sans relation dose-réponse quantitative identifiable. Une relation avec d’autres pathologies notamment rénales et cardiovasculaires a été évoquée, mais les données ne permettent pas de conclure sur le rôle propre de la silice cristalline. La silice cristalline est classée cancérogène pour l’Homme par le CIRC du fait de l’induction de cancer du poumon. D’autres types de cancers (digestifs) sont suspectés, mais les données disponibles à ce jour ne permettent pas de conclure.

    Toxicité chronique [1]

    Silicose

    • Définition

    La silicose proprement dite correspond à un spectre de maladies pulmonaires induites par l’inhalation de silice cristalline et caractérisées par une fibrose pulmonaire progressive avec formation nodulaire. C’est une pneumoconiose. Le diagnostic anatomopathologique standard repose sur la présence de nodules silicotiques dans le parenchyme pulmonaire (nodules fibro-hyalins caractéristiques avec présence en périphérie de particules de silice faiblement biréfringentes en lumière polarisée) [ILO 1930 cités dans [1]]. Toutefois, plusieurs travaux indiquent que la présence isolée de nodules silicotiques dans les ganglions médiastinaux ou hilaires constitue un facteur de risque de silicose (indépendant de l’exposition cumulée à la silice cristalline). Dans son dernier rapport, l’Anses recommande de redéfinir les critères de diagnostiques des diverses formes anatomocliniques de la silicose en intégrant les formes ganglionnaires isolées, considérées comme des formes précoces à part entière de la silicose pulmonaire [1].

    • Clinique

    Les manifestations cliniques de la silicose sont généralement tardives et non spécifiques : dyspnée d’effort, toux, expectoration, diminution de la fonction pulmonaire, ….

    Plusieurs formes cliniques de silicose sont décrites :

    ►  La silicose chronique (forme classique) survient généralement après plus de 20 ans d’exposition.

    ►  La forme PMF ou fibrose massive progressive résulte aussi d’une exposition longue. Elle se caractérise par la coalescence de nodules à l’origine de masses fibreuses pouvant atteindre de 1 à plusieurs centimètres, envahir le tissu pulmonaire adjacent, et devenir nécrotiques voire cavitaires [1].

    ►  La forme accélérée ou silicose accélérée peut s’observer après 5 à 15 ans d’exposition.

    ►  La forme aiguë ou silicoprotéinose aiguë résulte généralement d’une exposition intense sur une courte période de quelques semaines à quelques années. Elle est plus sévère que la silicose accélérée et correspond à une lipoprotéinose alvéolaire avec comblement des espaces alvéolaires par du matériel lipoprotéinacé associé à des particules de silice cristalline [1].

    ►  L’anthraco silicose résulte d’une exposition à des poussières mixtes de charbon contenant plus ou moins de quartz. Elle se caractérise par un tableau dit « de poumon de mineur de charbon » différent de la silicose classique [1].

     

    • Epidémiologie

    L’exposition à la silice cristalline (concentration moyenne ou exposition cumulée) est le facteur le plus fortement associé au développement de la silicose [15]. La relation dose-réponse est bien documentée (données autopsiques, radiographiques et de mortalité par silicose, à partir d’une exposition cumulée à la silice cristalline de 0,02 mg/m3/année) [1].

    Les différentes formes de silice cristalline sont associées à la silicose [1].

    A partir des années 2000, des cas de silicose associée à des opérations sur plans de travail en pierre artificielle ont été rapportés [1]. La revue de la littérature réalisée par Leso et al. (analyse de 8 études épidémiologiques descriptives menées en Espagne, en Israël et en Australie) souligne les délais d’apparition précoces (4 à 10 ans) souvent observés pour ce type de silicose, et la méconnaissance du risque silicotique dans ce secteur qui favorise la mise en place de mesures de prévention insuffisantes et des niveaux d’exposition importants. En Australie (Queensland), un cluster de cas de silicose accélérée dans le secteur de la fabrication de plans de travail en pierre artificielle, a conduit le gouvernement à mettre en place un programme de recherche pour améliorer le dépistage de la silicose et la gestion du risque silicotique dans ce secteur. En février 2019, 99 cas de silicose (dont 15 PMF) ont été confirmés sur les 400 travailleurs dépistés à ce stade (soit 24,75 %). Ces différents travaux appuient la nécessité d’améliorer la prévention du risque silicotique dans ce secteur [20 à 23].

     

    • Exploration

    Les lésions de silicose peuvent s’observer aux rayons-X lorsque leur taille est suffisante pour apparaître sous forme d’opacités. La radiographie thoracique montre typiquement des opacités nodulaires bilatérales prédominant aux sommets, dont l’évolution se fait vers la confluence en opacités plus larges. Il existe un classement standardisé des opacités observées sur les radiographies thoraciques : la classification internationale des radiographies de pneumoconioses du Bureau International du Travail (BIT) [24, 25]. Des adénopathies (calcifiées ou non) peuvent également être observées (aspect caractéristique en coquille d’œuf des adénopathies calcifiées) [1]. L’analyse de la littérature réalisée par l’Anses souligne la meilleure sensibilité de la TDM thoracique (en particulier pour la détection de certaines anomalies comme l’emphysème ou les micronodules), et sa plus faible variabilité inter-lecteur [1].

    Une diminution de la fonction pulmonaire aux épreuves fonctionnelles respiratoires (EFR) peut être observée : syndrome restrictif (diminution de la capacité pulmonaire totale), obstructif (diminution du volume expiratoire maximal par seconde VEMS, et du rapport de Tiffeneau VEMS/CV) ou mixte. Les EFR sont souvent normales au stade initial.

     

    • Evolution

    La silicose peut continuer de progresser même après l’arrêt de l’exposition, probablement du fait de particules de silice cristalline encore retenues dans les poumons. « Les personnes atteintes de silicose et continuant d’être exposées une fois la maladie déclarée, sont plus susceptibles de voir leur pathologie progresser par rapport à ceux qui n’ont pas subi d’exposition additionnelle. » [1].

    La silicose chronique peut se compliquer par :

    • Des infections notamment à mycobactéries [Maciejewska 2014 cité par 1]. La plus fréquente est la silicotuberculose (complication infectieuse de la silicose par le bacille de Koch). Le risque de développer une silicotuberculose augmente avec l’exposition à la silice cristalline (durée d’exposition et dose inhalée) et la sévérité de la silicose [5][1]. Des études rapportent un risque augmenté de tuberculose chez des travailleurs exposés à la silice cristalline même en l’absence de silicose 27, 28]. L’association silicose et tuberculose augmente le risque de progression de la silicose [1].
    • Un pneumothorax lié à la rupture de bulles d’emphysème
    • Une hypertension artérielle pulmonaire
    • Un cœur pulmonaire chronique
    • Un cancer broncho pulmonaire (voir chapitre « Cancérogénicité »)

     

    Autres pathologies pulmonaires non malignes

    L’exposition à la silice cristalline (même en l'absence de silicose) a été associée à d’autres pathologies pulmonaires non malignes comme la bronchite chronique, l’emphysème (surtout chez le fumeur), l’altération de la fonction respiratoire (diminution du VEMS et du rapport de Tiffeneau), sans seuil d'effet identifié [1]. Il existe une relation dose-réponse significative pour la mortalité par maladies respiratoires non malignes (hors silicose)  [1].

     

    Effets immunologiques

    Plusieurs maladies auto-immunes ont été associées à l’exposition à la silice cristalline. A partir d’une analyse de la littérature, le groupe d’experts de l’Anses a conclu à un lien de causalité certain et fort pour la sclérodermie systémique (association décrite sous le nom de syndrome d’Erasmus), à un lien de causalité certain pour la polyarthrite rhumatoïde (association décrite sous le nom de syndrome de Caplan-Colinet) et le lupus érythémateux systémique, à un lien de causalité possible avec les vascularites à ANCA positive. Les études analysées n’ont pas permis d’établir une relation dose-réponse quantitative, il est possible qu’une dose faible d’exposition suffise à développer l’une de ces pathologies.[1]

     

    Effets rénaux

    Un risque majoré de maladies rénales de différents types a été décrit chez des travailleurs exposés à la silice cristalline, sans qu’il ne soit possible d’affirmer que ce risque soit uniquement lié à la silice cristalline [29,1].

     

    Autres effets

    Une association entre l’exposition à la silice cristalline et d’autres pathologies notamment cardio-vasculaires a été évoquée, sans qu’il ne soit possible de conclure sur le rôle spécifique de la silice cristalline [1].

    Effets cancérogènes

    Les données épidémiologiques et expérimentales analysées par le groupe d’experts de l’Anses n’ont pas mis en évidence de différences en termes de toxicité et de potentiel cancérogène entre les différents polymorphes de la silice cristalline [1].

    • Cancer broncho-pulmonaire (CBP)

    La silice cristalline est classée comme cancérogène pour l’Homme depuis 1997 par le CIRC. Dans sa dernière évaluation, celui-ci conclue à un niveau de preuve suffisant de cancérogénicité chez l’Homme pour la forme quartz et cristobalite (du fait de l’induction de cancer du poumon). Sur cette base, la silice cristalline (sous la forme quartz et cristobalite) est aujourd’hui classée comme cancérogène pour l’Homme (groupe 1) [2].

    De nombreuses études rapportent une augmentation du risque de CBP associé à une exposition professionnelle à la silice cristalline. Les principaux secteurs étudiés sont l’exploitation minière, les carrières, le secteur de la céramique, l’industrie de la terre de diatomée, les opérations avec sable et graviers [15].

    La relation dose-réponse est bien documentée, sans qu’il ne soit possible d’identifier de seuil d’effet [30, 1].

    Il existe un risque accru de CBP chez les silicotiques. Plusieurs études montrent qu’il existe aussi un risque accru de CBP -à moindre mesure- chez les non silicotiques. Dans la revue de Poinen-Rughooputh (24 études de cohorte analysées), le ratio de mortalité standardisé (SMR) chez les silicotiques est de 2,32 (IC 95 % [1,91-2,81]) et chez les non silicotiques de 1,78 (IC 95 % [1,07-2,96]) ; et le ratio d’incidence standardisé (SIR) est respectivement de 2,49 (IC 95 % [1,87-3,33]) et de 1,18 (IC 95 % [0,86-1,62]) [30].

    Le tabagisme a un effet additif voire multiplicatif [31, 1].

     

    • Autres types de cancers

    Les cancers autres que pulmonaires ont été peu évalués (par rapport aux cancers pulmonaires) chez les travailleurs exposés à la silice cristalline [13]. Une augmentation de cancers digestifs (estomac, œsophage), cancers du larynx, cancers du rein, a été rapportée, mais l’association avec l’exposition à la silice cristalline n’est pas systématiquement retrouvée, et il n’a pas été possible d’établir de relation dose-réponse de façon avérée du fait des limites des études (facteurs de confusion non pris en compte, faible puissance…) [15,1].

    Effets sur la reproduction

    Il n’a pas été retrouvé de données chez l’Homme à la date de publication de cette fiche toxicologique.

  • Interférences métaboliques
  • Cohérence des réponses biologiques chez l'homme et l'animal
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