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Chlorobenzène

Fiche toxicologique n° 23

Sommaire de la fiche

Édition : 2009

Pathologie - Toxicologie

  • Toxicocinétique - Métabolisme [10, 12, 16, 22-25]

    Le chlorobenzène est rapidement absorbé par voie pulmonaire et de façon moindre par voie digestive ; l’absorption percutanée est négligeable. Il se concentre surtout dans le tissu adipeux. Le métabolisme hépatique est rapide et passe par la formation du 4-chlorobenzène-1,2-époxyde. Une faible proportion est éliminée sous forme inchangée dans l’air expiré, les urines et les fèces. Tous les métabolites sont éliminés par voie urinaire, principalement sous forme de 4-chlorocatéchol et de 4-chlorophénol chez l’homme. Le chlorobenzène ne s’accumule pas dans l’organisme.

    Chez l'Homme

    Chez l’homme, le 4-chlorocatéchol et le 4-chlorophénol, libre et conjugué, sont les principaux métabolites uri­naires et représentent environ 90 % des produits excrétés dans les urines. Chez des volontaires sains exposés pen­dant 7 h à des concentrations allant de 10 à 65 ppm, 42,7 % du chlorobenzène absorbé sont éliminés dans les urines sous forme de 4-chlorocatéchol, 13,2 % sous forme de 4-chlorophénol et 24 % sous forme de chlorophénols.

    Le 4-chlorocatéchol et le 4-chlorophénol apparaissent dans les urines rapidement après le début de l'exposition, avec un pic d'élimination atteint à la fin de l'exposition (vers la 8ième heure). L'élimination urinaire est biphasique : les demi-vies du 4-chlorocatéchol sont de 2,2 h et de 17,3 h pour chaque phase respectivement, celles du 4-chlorophénol sont de 3 h et de 12,2 h. L'excrétion du 4-chlorocatéchol est environ 3 fois plus importante que celle du 4-chlorophénol.

    Le dosage du 4-chlorocatéchol total et du 4-chlorophénol total dans les urines de fin de poste de travail est un bon indice biologique de l'exposition récente au chlorobenzène. Ce dosage est donc recommandé pour la sur­veillance biologique des sujets exposés. Ces 2 métabolites n'existent pas chez des sujets non exposés ; par contre, ils peuvent être présents dans les urines de sujets exposés au dichlorobenzène, au 4-chlorophénol ou aux crésols.

    Une bonne corrélation existe entre l'intensité de l'exposi­tion au chlorobenzène et la quantité de 4-chlorocatéchol total et de 4-chlorophénol total excrétée dans les urines. À des concentrations inférieures à 75 ppm (350 mg/m3), la relation est linéaire. Pour une exposition à 50 ppm (230 mg/m3) pendant 2 h, en l'absence de tout contact cutané, l'élimination urinaire sur des urines recueillies en fin de poste de travail est de 9 mg/g de créatinine pour le 4-chlorophénol et de 33 mg/g de créatinine pour le 4-chlorocatéchol.

    Les dosages du chlorobenzène dans le sang veineux et dans l'air expiré ont également été proposés pour la sur­veillance biologique des sujets exposés. Leur réalisation pratique est cependant délicate. Le taux de chlorobenzène sanguin est bien corrélé à l'intensité de l'exposition.

    Surveillance Biologique de l'exposition

    Le dosage dans les urines en fin de poste et fin de semaine de travail du 4-chlorophénol total et du 4-chlorocatéchol total sont le reflet de l'exposition récente au chloroben­zène. Des valeurs-guides existent pour ces paramètres (voir § Recommandations - Au point de vue médical).

  • Mode d'actions

    Le mécanisme d'action du chlorobenzène est très proba­blement lié, d'après les études chez le rat et la souris, à la formation d'un époxyde intermédiaire réactif responsable de liaisons irréversibles aux macromolécules des cellules hépatiques, rénales et pulmonaires. La détoxification pas­serait par l'action du glutathion, toute déplétion cellulaire en glutathion entraînant une augmentation de la forma­tion des liaisons aux macromolécules ; à l'inverse, l'ad­jonction d'un inhibiteur du système microsomal diminue le nombre de liaisons aux macromolécules [10] .

    Une étude chez la souris par administration intraveineuse de chlorobenzène retrouve la formation de liaisons entre les macromolécules des cellules épithéliales bronchiques et les métabolites du chlorobenzène.

  • Toxicité expérimentale
    Toxicité expérimentale

    Lors d’exposition aiguë (voie inhalatoire et orale), la toxicité concerne le système nerveux central (dépression), le foie et les reins. Par voie cutanée, la toxicité systémique est faible. C’est un irritant modéré pour la peau et les yeux. Une exposition prolongée à doses élevées peut également être à l’origine d’atteintes hématologiques (chien, rat, lapin), gastriques (chien) ou pulmonaires (rat, cochon d’inde, lapin). 

    Toxicité aiguë [10-14]

    La DL50 par voie orale est de 2910 mg/kg chez le rat, de 2830 mg/kg chez le lapin et de 1440 mg/kg chez la souris.

    La CL50 par inhalation est de 210 ppm (980 mg/m3) chez le rat et de 590 ppm (2750 mg/m3) chez le lapin pour une exposition de 6 h.

    La DL50 par voie cutanée est de 7000 mg/kg chez le rat.

    Le chlorobenzène est un dépresseur du système nerveux central. À dose toxique, il est responsable d'atteintes hépatiques et rénales. Il n'exerce qu'une faible toxicité sys­témique par voie cutanée. C'est un irritant modéré pour la peau et les muqueuses oculaires.

    L'injection sous-cutanée de 4000 à 5000 mg/kg chez le rat entraîne une hyperexcitabilité, une dépression du sys­tème nerveux central puis la mort des animaux ; il est aussi constaté une nécrose hépatique et rénale.

    Plusieurs études chez le chat retrouvent des signes d'irri­tation oculaire et des voies aériennes supérieures, asso­ciés à des troubles neurologiques à type de narcose dès 1200 ppm (5600 mg/m3), à une agitation, une instabilité, des tremblements, des convulsions et des myoclonies dès 2400 ppm (11 180 mg/m3) pendant 1 à 7 h, et à la mort des animaux vers 3700 ppm (17 240 mg/m3) pendant 7 h.

    Des signes d'irritation des muqueuses (larmoiement, hypersalivation), des signes neurologiques à type d'agita­tion, de prostration, d'ataxie, de troubles sensitivomoteurs des membres inférieurs ainsi qu'une dyspnée ont été observés chez des souris, rats et cochons d'Inde après administration orale de chlorobenzène. L'autopsie des ani­maux a montré un œdème cérébral, une nécrose hépa­tique centrolobulaire et une nécrose des tubes contournés proximaux rénaux et des muqueuses bronchiques et gastriques.

    L'injection par voie intrapéritonéale de 7,6 à 29,4 mmol/kg chez le rat mâle entraîne une nécrose hépatocytaire et tubulaire rénale, une déplétion du glutathion et du cyto­chrome P450 microsomal ainsi qu'une élévation des transaminases et de la bromosulfophtaléine.

    Toxicité subchronique, chronique [3, 10-12, 15-17]

    Chez le chien, par voie orale (27,25 à 272,5 mg/kg/j, 5 j/sem, 13 sem), aucun effet n'est observé à la plus faible dose ; la plus forte dose induit une perte de poids corporel, des anomalies hématologiques variées à type d'augmen­tation des formes jeunes leucocytaires, des modifications du bilan biologique (élévation des phosphatases alcalines, de la bilirubine, des transaminases et du cholestérol, baisse de la glycémie), des modifications hépatiques réna­les, du tissu hématopoïétique et de la muqueuse gas­trique et dans 50 % des cas, la mort des animaux.

    Chez le rat, par voie orale (14,4 à 370 mg/kg/j, 5 j/sem, 192 j), une augmentation du poids du foie et des reins est constatée dès 144 mg/kg/j, ainsi que des anomalies hépa­tiques à type de cirrhose et de nécrose focale dès 188 mg/kg/j. Une exposition par voie orale, plus longue (9 mois) à des doses inférieures (0,001 à 0,1 mg/kg/j), pro­voque à partir de 0,01 mg/kg/j une dépression du système nerveux central, des anomalies hématologiques (trombocytose, hyperéosinophilie, inhibition de l'érythropoïèse et de l'activité mitotique de la moelle osseuse), ainsi que des anomalies du bilan hépatique (élévation des phospha­tases alcalines et des transaminases).

    Par inhalation (200 à 1200 ppm = 930 à 5600 mg/m3, 7 h/j, 5 j/sem, 44 j) chez le rat, le lapin et le cochon d'Inde apparaissent, dès 475 ppm (2210 mg/m3), des lésions hépatiques limitées. À 1000 ppm (4660 mg/m3), appa­raissent chez les 3 espèces des altérations pulmonaires, rénales et hépatiques ; et vers 1200 ppm (5600 mg/m3) un coma. La dose sans effet est de 200 ppm (930 mg/m3) pour tous les animaux.

    Des anomalies hématologiques à type d'hyperréticulocytose, proportionnelles à la dose administrée, sont retrou­vées dans une étude par voie pulmonaire chez des rats et des lapins (75 à 250 ppm = 350 à 1165 mg/m3, 7 h/j, 5 j/sem, 24 sem) ; elles s'associent dès 75 ppm à des lésions hépatiques, rénales et surrénalliennes modérées.

    Des modifications des lignées sanguines lymphoïdes et myéloïdes, dont l'importance est proportionnelle à la dose, accompagnées d'anomalies hépatiques et rénales à type de nécrose, sont observées chez des rats par voie orale (250 mg/kg/j, 5 j/sem, 91 j). Aucune autre modifi­cation sanguine n'est retrouvée en dehors d'une porphy­rinurie modérée aux doses supérieures ou égales à 500 mg/kg/j.

    Des signes neurologiques à type d'encéphalopathie asso­ciés à une atteinte histologique hépatique et rénale sont constatés chez le rat pour des expositions continues supé­rieures à 1 mg/m3 pendant 70 à 82 jours. À ces doses, une augmentation des cholinestérases sanguines et une dimi­nution des alpha-globulines sont constatées.

    Effets génotoxiques [10, 18-20]

    Certains tests de génotoxicité in vitro et in vivo sont positifs.

    In vitro, le chlorobenzène n'est pas mutagène dans le test d'Ames pour les souches TA 1538, TA 1537, TA 1535, TA 100 et TA 98 de Salmonella typhimurium, avec ou sans activa­tion métabolique ; il induit un effet mutagène sur cellules ovariennes de hamster et lymphocytes de souris ; il n'en­traîne pas d'augmentation significative du nombre d'échanges de chromatides sœurs sur cellules humaines.

    In vivo, un test du micronoyau chez la souris par voie intra­péritonéale (225 mg/kg) est positif ; l'injection intrapérito­néale de chlorobenzène à des souris et des rats entraîne la formation d'adduits à l'ADN, principalement dans les cel­lules hépatiques.

    Effets cancérogènes [10, 15]

    Une augmentation significative de la fréquence de nodules néoplasiques hépatiques est observée uniquement chez le rat mâle.

    Une étude par voie orale chez le rat et la souris (30 à 60 mg/kg/j pour les souris mâles, 60 à 120 mg/kg/j pour les souris femelles et les rats des 2 sexes, 5 j/sem, 103 sem) a montré une augmentation significative de la fréquence des nodules néoplasiques hépatiques chez les rats mâles à la plus forte dose; aucune augmentation de la fréquence des tumeurs n'est retrouvée chez les rates et les souris des 2 sexes.

    Effets sur la reproduction [17, 19, 21]

    Des anomalies du développement musculo-squelettique à des doses toxiques pour la mère sont observées chez les rates ainsi que des malformations viscérales chez la lapine gestante. Chez le rat, l’inhalation répétée de chlorobenzène n’entraîne pas d’anomalie de la reproduction mais une incidence élevée d’anomalies testiculaires dégénératives sans répercussion sur le taux de fertilité à des doses toxiques.

    L'exposition de rates gestantes (75, 210 et 590 ppm = 350, 980 et 2755 mg/m3, 6 h/j, du 6ième au 15ième jour de gestation) ne provoque aucun effet tératogène ni embryotoxique. À 590 ppm, des anomalies du développement musculosquelettique sont constatées ; mais cette concentration entraîne chez les mères une perte de poids corporel ainsi qu'une augmentation du poids du foie. Aucune augmenta­tion du nombre des avortements spontanés n'est décelée.

    Dans la même étude, l'exposition de lapines (mêmes concentrations, 6 h/j, du 6ième au 18ième jour de gestation) ne provoque aucun effet tératogène ni augmentation du nombre des avortements spontanés. Chez le fœtus, quelques malformations viscérales (cœur, cerveau) sont retrouvées, sans relation avec la dose. Une augmen­tation du poids du foie et une perte de poids globale sont constatées dès 210 ppm (980 mg/m3) chez les mères.

    Chez le rat, l'inhalation répétée (50 à 450 ppm, 6 h/j, 7 j/sem, 10 sem), avant la fécondation, pendant la gros­sesse et l'allaitement, ne provoque aucune anomalie de la reproduction même à la dose la plus forte ; une incidence élevée d'anomalies testiculaires dégénératives, sans répercussion sur le taux de fertilité, est constatée à 450 ppm (2100 mg/m3). Par contre des effets systémiques avec anomalies histologiques rénales et hépatiques sont observés dès 150 ppm (700 mg/m3).

  • Toxicité sur l’Homme

    Lors d’exposition aiguë, le chlorobenzène est un narcotique puissant, un toxique hépatique et un irritant de la peau et des muqueuses oculaires et respiratoires. Lors d’exposition chronique sont observés principalement des effets neurologiques centraux, des signes d’irritation (voies aérodigestives supérieures, peau), des lésions hépatiques, rénales et pulmonaires. Les données observées ne permettent pas de conclure formellement à un effet reprotoxique du chlorobenzène.

    Toxicité aiguë [3, 10, 12, 26, 27]

    Le chlorobenzène est un narcotique puissant, un toxique hépatique et un irritant de la peau et des muqueuses oculaires et respiratoires.

    L'inhalation de vapeurs provoque une irritation oculaire et des voies respiratoires lors d'exposition à des concentra­tions de l'ordre de 200 ppm (930 mg/m3). À forte dose, on peut observer une atteinte neurologique associant som­nolence, manque de coordination, dépression du système nerveux central puis troubles de conscience.

    Un cas d'hémoptysie a été rapporté par un auteur lors d'une inhalation massive de chlorobenzène.

    Des perturbations électroencéphalographiques ont été induites chez des volontaires sains après une exposition à des concentrations allant de 0,1 à 0,3 mg/m3 pendant 13 min.

    L'ingestion de chlorobenzène peut entraîner une pâleur ou une cyanose, une méthémoglobinémie, voire un col­lapsus; ces effets peuvent être réversibles. Deux cas d'at­teinte hépatique avec cytolyse, réversibles en 2 semaines après traitement par N-acétylcystéine et alprostadil, ont été rapportés.

    Toxicité chronique [3, 12, 16, 26, 28, 29]

    Les effets de l'exposition chronique s'exercent principale­ment sur le système nerveux central.

    La voie respiratoire est la voie usuelle d'intoxication en milieu professionnel. L'inhalation prolongée de vapeurs peut être à l'origine de signes neurologiques (tels des céphalées, une somnolence, des vertiges, des paresthé­sies, des myoclonies des extrémités et parfois des troubles de la sensibilité tactile), de signes d'irritation des voies aérodigestives supérieures, de lésions hépatiques, rénales et pulmonaires.

    Plusieurs études chez des travailleurs exposés au chloro­benzène retrouvent une fréquence accrue de troubles neurologiques à type de céphalées, malaises, somnolence, irritabilité, ainsi que des troubles dyspeptiques, une perte de poids et d'appétit. Ces troubles apparaissent le plus souvent peu de temps après le début de l'exposition et pour des concentrations atmosphériques faibles. Dans une de ces études, les anomalies telles les paresthésies, hypoesthésies ou contractures des extrémités n'ont été observées que chez les sujets exposés uniquement au chlorobenzène.

    Une étude chez des travailleurs exposés au chlorobenzène et à d'autres dérivés chlorés du benzène, à des concentra­tions de l'ordre de 15 ppm, ne retrouve aucun effet sur la santé, ni aucune modification des fonctions hépatiques et de la formule sanguine.

    Des contacts répétés ou prolongés du liquide avec la peau peuvent entraîner des dermatoses et des brûlures cutanées.

    Des modifications hématologiques ont rarement été rap­portées. Un cas d'anémie avec aplasie médullaire est apparu chez une femme de 70 ans, ayant utilisé pour la confection de chapeaux, une colle contenant 70 % de chlorobenzène (sans benzène). La responsabilité du chlorobenzène reste cependant difficile à évaluer. Une leucopénie modérée et une augmentation de l'activité des peroxydases leucocytaires ont été constatées dans une étude chez des travailleurs exposés au chlorobenzène depuis au moins 3 ans. Elles s'associaient à un allonge­ment des vitesses de conduction nerveuse. La significa­tion de ces anomalies hématologiques est cependant inconnue.

    Effets sur la reproduction [30]

    Une étude russe fait état d'une augmentation significa­tive de la fréquence des troubles menstruels et hormo­naux chez des femmes exposées au chlorobenzène dans une usine de vernis. Une fréquence accrue des anomalies du développement des nouveau-nés ainsi qu'une aug­mentation de la mortalité périnatale sont aussi mention­nées. Cependant, la responsabilité du chlorobenzène ne peut être affirmée étant donné l'exposition concomittante à d'autres produits chimiques.

  • Interférences métaboliques
  • Cohérence des réponses biologiques chez l'homme et l'animal
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