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Eaux et extraits de Javel, Hypochlorite de sodium en solution

Fiche toxicologique n° 157

Sommaire de la fiche

Édition : Septembre 2017

Pathologie - Toxicologie

  • Toxicocinétique - Métabolisme [1, 4, 5]

    L'hypochlorite de sodium est absorbé par voies digestive, respiratoire et cutanée. Il est métabolisé en chlorures et éliminé lentement par voie urinaire et plus faiblement au niveau des fèces.

    Chez l'animal
    Absorption

    L'hypochlorite de sodium est absorbé par voie orale, cuta­née et inhalatoire. Le pic plasmatique est atteint 2 heures après l'administration orale chez les animaux à jeun et après 4 heures chez les animaux nourris ; la 1/2 vie d'éli­mination du plasma est de 44 heures en cas de jeûne et 88,5 heures chez les animaux nourris.

    Métabolisme

    Une étude du deve­nir de solutions aqueuses de 36CI]-hypochlorite de sodium chez le rat indique qu'il est métabolisé en ions chlorures ; ceux-ci sont distribués, 96 heures après l'expo­sition par ordre de concentration décroissante, dans le plasma, le sang total, la moelle osseuse, les testicules, les reins et le poumon[6].

    Une heure après administration d'hypochlorite de sodium on a mesuré, dans le plasma et le contenu intestinal de rats, nourris ou à jeun, de l'acide trichloroacétique, dichloroacétique et du dichloroacétonitrile ; leur formation n'est pas dépendante de l'interaction, au niveau de l'intestin, de l'hypochlorite de sodium avec des substances organiques extérieures.

    Excrétion

    96 heures après l'exposition, seuls 51,2 % de la dose sont éliminés dont 36,4 % dans l'urine et 14,8 % dans les fèces ; après 120 heures, l'élimination de [36CI]-hypochlorite de sodium n'est pas encore totale.

  • Mode d'actions
  • Toxicité expérimentale
    Toxicité aiguë [4, 6, 8]

    L'hypochlorite de sodium sous forme concentrée provoque des effets corrosifs sur la peau et des effets sévères et souvent irréversibles sur les muqueuses respiratoire, digestive et oculaire.

    L'hypochlorite de sodium, en exposition aiguë, est essen­tiellement corrosif.

    La DL50 orale est de 8 910 mg/kg chez le rat et 5 800 mg/kg chez la souris ; la DL50 cutanée est supé­rieure à 10 000 mg/kg chez le lapin et la CL50 par inhala­tion est supérieure à 10,5 mg/l pour une exposition d'une heure chez le rat.

    Les symptômes, par voie orale, sont surtout ceux d'une irritation avec brûlures oropharyngées, œsophagiennes et gastriques (chien, 100 mL d'une solution à 5,25 %) ; l'inges­tion de quantités importantes (> 5 mL/kg) est associée à des lésions corrosives.

    Par voie cutanée, on observe un épaississement de la peau (souris, 1 000 mg/L, 10 min/j, 4 j) et une baisse de viabilité des cellules basales de l'épiderme (cobaye, solution à 0,5 % sur la peau pendant 2 semaines).

    L'hypochlorite de sodium est corrosif pour la peau du lapin (solution à 3,5 %, 15-30 min); la sévérité de l'irritation est fonction de la dose appliquée jusqu'à une concentration de 20 % [4].

    La causticité oculaire chez le lapin est, elle aussi, fonction de la dose appliquée, l'effet débutant avec une solution à 0,5 % :

    • 0,5 % : irritation réversible en 24 heures,
    • 5 % : douleur immédiate; si l'œil est lavé dans les 30 secondes la lésion (léger obscurcissement transitoire de la cornée et œdème de la conjonctive[5]) est réversible en 24 heures, par contre sans lavage la réversibilité n'est atteinte qu'après plus d'une semaine ; une dose identique appliquée dans l'œil du singe provoque une lésion plus rapidement réversible[5],
    • 15 % : douleur immédiate et importante, sans lavage oculaire on observe une hémorragie de la conjonctive et du nez, un œdème de la conjonctive et une apparence vitreuse de la cornée avec hématome modéré; la lésion est réversible en 2 à 3 semaines avec des séquelles cicatri­cielles plus ou moins importantes [8].

    L'hypochlorite de sodium est un irritant respiratoire pour la souris.

    La RD50 (dose qui provoque une baisse de 50 % de la fré­quence respiratoire) est de 4,1 ppm pour une atmosphère d'hypochlorite mesurée en chlore libre ; elle est très voi­sine de celle du chlore (6,7 ppm). La similarité des valeurs montre que l'irritation, due à l'hypochlorite, est associée au contenu en chlore [4].

    Il n'est pas sensibilisant pour le cobaye (solution à 40 % d'un mélange contenant 5,65 % d'hypochlorite de sodium) [4].

    Toxicité subchronique, chronique [1, 4]

    L'ingestion de doses répétées provoque peu d'effet en dehors de modifications du système immunitaire. Le contact cutané entraîne une dermatose d'irritation.

    L'hypochlorite de sodium, administré dans l'eau de bois­son, ne modifie pas la survie du rat (jusqu'à 4 000 mg/L), de la souris (jusqu'à 2 754 mg/L) ou du cobaye (50 mg/L). Il induit, chez le rat, une légère baisse de la consommation hydrique aux fortes doses et une faible augmentation de la prise de poids corporel (animaux jeunes), mais ne provoque aucune modification des paramètres sériques ou du poids des organes.

    Les effets sur le système immunitaire ont été testés chez la souris et le rat (30 mg/L dans l'eau de boisson). L'hypochlorite de sodium inhibe l'activité phagocytaire et, en particulier, tumoricide des macrophages pulmonaires, hépatiques et spléniques de la souris à partir de la 3e semaine d'exposition. Chez le rat, il n'y a pas de baisse d'activité phagocytaire des macrophages péritonéaux. Cependant on observe une baisse du poids de la rate, une diminution des réactions d'hypersensibilité de type retardé et du métabolisme oxydatif des macrophages, et une augmentation du taux de prostaglandines E2[9].

    Par voie cutanée, l'hypochlorite de sodium (0,1 mL d'une solution à 0,125 %) provoque une inflammation et une hyperplasie de l'épiderme du cobaye après 14 jours ; après 8 semaines d'exposition, on n'observe plus aucun effet sur la prolifération, le développement et la différenciation de l'épiderme [4].

    Effets génotoxiques

    L'hypochlorite de sodium est génotoxique in vitro. Certains tests in vivo sont également positifs.

    ln vitro, l'hypochlorite de sodium est mutagène dans le test de Ames sur S. typhimurium pour les souches TA 98 et TA 100 (avec activation métabolique), TA 1530 et TA 1535 (sans activation métabolique) et non mutagène pour la souche TA 1538. Il augmente les aberrations chromoso­miques dans les cellules de hamster chinois, mais pas dans les lymphocytes ou les fibroblastes humains ; néan­moins, dans ces dernières cellules il augmente les échan­ges entre chromatides-sœurs [1]. Il n'induit pas de transformation dans les cellules C3H/10T1/2 en culture [10].

    In vivo, les tests ne montrent pas de modification induite dans la moelle osseuse de souris (micronoyaux, aberra­tions chromosomiques et induction d'aneuploïdie) [1]. Cependant, une exposition répétée (1 ml/j d'une solution à 200 mg/l soit environ 4 mg/kg/j par gavage, pendant 5 jours) provoque, chez la souris B6C3F1, 3 semaines après le traitement, une augmentation significative des anoma­lies de la tête spermatique ; cette augmentation n'est plus significative après 5 semaines. La spécificité dans le temps pourrait indiquer un effet particulier sur les spermatocy­tes primaires tardifs, sensibles aux mutations [11].

    Effets cancérogènes [1, 4, 8, 12]

    Les essais réalisés ne sont pas en faveur d'un effet cancérogène de l'hypochlorite de sodium.

    Il n'y a pas d'augmentation de l'incidence ou de la période de latence des tumeurs chez les animaux exposés pen­dant 2 ans à des doses allant jusqu'à 2 000 ppm (rat)[12] et 1 000 ppm (souris) d'hypochlorite de sodium dans l'eau de boisson, quel que soit le sexe.

    L'administration d'hypochlorite de sodium (70, 140 et 275 ppm) pendant 2 ans dans l'eau de boisson du rat et de la souris induit, uniquement chez le rat femelle, une acti­vité cancérogène équivoque (augmentation du taux de leucémies) non-fonction de la dose[13].

    Par voie cutanée, l'hypochlorite de sodium n'induit ni tumeur cutanée ni hyperplasie épithéliale chez la souris. Une solution à 10 % est promotrice pour le développe­ment de cancers cutanés initiés par l'oxyde de nitroquinoline; elle ne l'est pas après initiation par le diméthylbenzanthracène.

    L’effet de l'hypochlorite de sodium sur le système immuni­taire pourrait potentialiser l'action promotrice via une action tumoricide diminuée sur les cellules néoplasiques [9].

    Effets sur la reproduction [1, 4]

    Les essais réalisés ne sont pas en faveur d'un effet sur la fertilité ou le développement de l'hypochlorite de sodium. Une diminution du nombre de spermatozoïdes n'est observée qu'à forte dose.

    Chez le rat, l'hypochlorite de sodium n'a pas d'effet sur la fertilité ni sur l'appareil reproducteur dans les 2 sexes. Chez la souris, il induit à forte dose des anomalies sper­matiques (cf. paragraphe Effets génotoxiques).

    Administré pendant 2,5 mois dans l'eau de boisson (100 mg/l), avant et pendant la gestation, il provoque une légère baisse de poids fœtal et une faible augmentation des variations du squelette et des tissus mous chez le rat. Une étude sur 7 générations à la même dose n'a pas mon­tré d'effet sur la croissance ou la survie.

  • Toxicité sur l’Homme

    L'hypochlorite de sodium provoque de graves lésions du tube digestif, de la peau et des yeux en cas de contact direct. Le mélange avec des acides produit du chlore, à l'origine de graves lésions respiratoires. En dehors de dermatoses de mécanisme irritatif, on ne note pas d'effet lié à l'exposition répétée de cette substance. On ne dispose pas de donnée sur d'éventuels effets cancérogènes ou sur la fonction de reproduction.

    Toxicité aiguë [5]

    Les effets toxiques de l'hypochlorite de sodium chez l'homme dépendent de la concentration de la solution. Les concentrations élevées ou les extraits sont extrêmement dangereux alors que les dilutions habituellement employées entraînent peu de risques.

    Les principales manifestations sont liées au caractère cor­rosif des formes concentrées.

    L'ingestion de faibles quantités des dilutions normales d'emploi n'entraîne que quelques troubles digestifs vite calmés. Par contre les solutions concentrées provoquent une forte irritation du tube digestif avec vomissements parfois sanglants. Il peut s'ensuivre une nécrose, des per­forations et de graves séquelles en cas de survie. Ces effets peuvent s'accompagner d'un état de choc et d'une hémo­lyse. Il ne faut pas négliger la possibilité d'une importante hypernatrémie lors des ingestions de grandes quantités d'hypochlorite de sodium ; dans certains cas cette pertur­bation ionique peut s'avérer mortelle [16].

    Les projections cutanées ou oculaires de produits concen­trés peuvent provoquer des brûlures sévères avec de pos­sibles séquelles oculaires.

    On retiendra tout particulièrement les dangers des mélanges des eaux et extraits de Javel avec des produits acides. Ces mélanges entraînent un dégagement de chlore qui peut provoquer une forte irritation bronchique voire un œdème aigu pulmonaire d'apparition parfois retardée [15, 19]. De même le mélange avec de l'ammo­niaque provoque la formation de chloramine qui est éga­lement irritant pour les voies respiratoires [21].

    Toxicité chronique [5]

    Des expositions répétées peuvent être la cause de lésions unguéales réversibles. Diverses dermatoses sont décrites chez des personnes employant de façon chronique de l'eau de Javel (dermatose bulleuse, porphyrie cutanée tar­dive) ; du fait de la fréquence d'emploi de cette substance, et de la rareté des cas décrits, il est difficile de conclure à la responsabilité du produit. L'emploi inapproprié d'eau de Javel pour le nettoyage régulier des mains conduit assez fréquemment à des dermatoses [14, 20, 22, 23].

    Les réactions cutanées allergiques sont devenues rares depuis que les quantités de chrome des eaux et extraits de Javel ont été fortement réduites. Depuis le début des années 1980 en France, les eaux de Javel ne contien­draient plus de chrome; selon leur provenance, le risque ne semble pas éliminé avec toutes les eaux de Javel [17, 18].

    Il n'existe pas de donnée sur d'autres effets toxiques après exposition chronique.

  • Interférences métaboliques
  • Cohérence des réponses biologiques chez l'homme et l'animal
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