Accès rapides :

Vous êtes ici :

  1. Accueil
  2. Publications et outils
  3. Bases de données
  4. Eficatt
  5. Diphtérie (rubrique sélectionnée)

Diphtérie

Corynebacterium du complexe diphtheriae

3 espèces : Corynebacterium diphtheriae, Corynebacterium ulcerans et C. pseudotuberculosis, potentiellement porteuses du gène tox codant pour la toxine diphtérique.

Sommaire de la fiche

Édition : avril 2022

Pathologie Guide de lecture

  • Nom de la maladie

    Diphtérie

Transmission

Mode de transmission

Par l'intermédiaire des gouttelettes provenant des voies aériennes supérieures, générées par la toux, les éternuements ou la parole d'un sujet infecté ou porteur sain.

Plus rarement par contact des muqueuses avec des mains souillées par les secrétions oro-pharyngées infectées, ou par un support inerte souillé par la salive (jouets, livres, literie).

La transmission par contact cutané à partir de lésions cutanées est décrite. Ces diphtéries cutanées sont souvent importées chez des personnes en situation de précarité pour C. diphtheriae mais parfois acquises en pays développés à partir de réservoirs animaux (domestiques principalement) pour C. ulcerans et survenant volontiers sur terrain débilité (ex : insuffisance veineuse, diabète...). (8).

À noter que pour C. ulcerans : il n’a pas été décrit de transmission interhumaine en 16 ans de surveillance (entre 2003 et 2020).

Période de contagiosité

Période de contagiosité variable : 2 semaines environ (contagiosité importante) voire des mois à partir d'un porteur sain (contagiosité prolongée mais faible).

La maladie [3, R1]

Incubation
Courte de 2 à 5 jours, inférieure à 7 jours.
Clinique
  • Les présentations cliniques de l’infection à C. diphtheriae ou à C. ulcerans tox+ sont identiques et classiquement ORL ou cutanées.

Le symptôme caractéristique et le plus grave est la présence de fausses membranes (ou pseudomembranes) au siège de la multiplication des bacilles diphtériques.

L'angine diphtérique (forme habituelle) : peu fébrile, ± dysphagique. Les fausses membranes sont sur les amygdales, ± extensives au niveau du pharynx. Elles sont extensives, adhérentes, cohérentes, saignant au contact (caractéristique). L'extension au larynx entraîne une obstruction et une asphyxie : c'est le croup. L'angine s'accompagne d'adénopathies sous-angulomaxillaires. Il existe des aspects moins typiques faisant penser à une mononucléose infectieuse.

La forme cutanée, plus rare, se repère par une ou plusieurs lésions pustuleuses puis ulcérées, douloureuses, à bordure érythémateuse/violacée, d’évolution récente ou subaigüe, couvertes généralement d’une fausse membrane grisâtre très adhérente. Il peut y avoir des signes de cellulite sous-jacente. Ces lésions peuvent survenir sur une blessure ou une piqûre d’insecte préexistante. La plaie est souvent polycontaminée (S. aureus, S. pyogenes).

La gravité de l'infection est liée à la diffusion de l'exotoxine du bacille diphtérique dans le myocarde, entraînant une myocardite vers le 6e - 8e jour (parfois jusqu'à 6 semaines), ou dans le système nerveux entraînant une polyradiculonévrite apparaissant vers la 3e - 6e semaine, et régressant spontanément, mais pouvant nécessiter temporairement une assistance respiratoire.

  • Les formes cliniques liées aux isolats tox- sont cutanées, ORL (rarement des fausses membranes) et systémiques (septicémie, endocardites, arthrites...).
  • Une atteinte ganglionnaire particulière (adénite nécrosante) est liée à C. pseudotuberculosis.
Diagnostic

La diphtérie doit être évoquée systématiquement devant une angine à fausses membranes ou une ulcération cutanée pseudo-membraneuse.

Le diagnostic de diphtérie constitue une des urgences du laboratoire de microbiologie.

Toutes les corynebactéries du complexe diphtheriae isolées par les laboratoires de microbiologie doivent être adressées en urgence au CNR des corynébactéries (ou localement au CH à Mayotte et Nouvelle-Calédonie) pour la recherche du gène de la toxine et l’identification de l’espèce. Devant une suspicion de diphtérie, un échantillon de fausses membranes peut être envoyé au CNR, en parallèle à la culture réalisée localement. Pour la confirmation bactériologique d'une diphtérie, le CNR doit être averti et être destinataire des renseignements cliniques et épidémiologiques (séjour à l'étranger, profession, statut vaccinal, contact avec un ou des animaux, etc.) recueillies lors du signalement initial (voir fiche de renseignements sur site web du CNR).

L’envoi au CNR ne doit pas différer la mise en route urgente du traitement devant toute suspicion clinique de diphtérie.

Méthodes :
- Isolement : il s'effectue à partir d'écouvillons rhinopharyngés, de membranes ou de prélèvements cutanés. À partir de ces échantillons le plus souvent polymicrobiens, l'isolement des colonies suspectes nécessite un milieu sélectif.
- Complété par l'identification (MALDI-TOF typiquement), la recherche de la toxinogenèse (recherche du gène tox par PCR + production in vitro (test d'Elek)) et l'antibiogramme.

Traitement

Sérothérapie administrée sans retard si signes toxiniques avant même confirmation de la présence du gène codant pour la toxine diphtérique (tox+), pour neutraliser la toxine le plus rapidement possible (les antitoxines diphtériques actuellement disponibles en France ne disposant pas d’autorisation de mise sur le marché sont mises à disposition dans le cadre d'une demande d'Autorisation temporaire d'utilisation nominative - ATU) après avis spécialisé d’un infectiologue référent, dispensation par Santé Publique France (9).

Les recommandations du HCSP en situation de pénurie pour les antitoxines diphtériques (sérothérapie) sont :

  • diphtérie pharyngée et/ou laryngée avec fausses membranes, dues à une souche tox+ ;
  • diphtérie pharyngée et/ou laryngée avec manifestations toxiniques (signes systémiques de nature cardiovasculaire ou neurologique) ;
  • diphtérie cutanée avec manifestations toxiniques.


Antibiothérapie à ajuster en fonction de l'antibiogramme : Amoxicilline 3g/jr chez l'adulte en 3 prises (voie orale ou IV), macrolides en cas d'allergie aux bêta-lactamines. Durée de traitement pendant 14 jours sauf pour Azithromycine pendant 5 jours (R1). S'assurer de la négativité des prélèvements de gorge (ou cutanés) au décours du traitement à J15 et J16 (J7 et J8 pour azithromycine) en raison de rechute précoce possible après traitement.

Vaccination systématique initiée au plus tard durant la période de convalescence (maladie peu immunisante) : une dose de vaccin sauf si preuve d'antécédent de primovaccination d'au moins 3 doses avec rappel de moins de 5 ans. Les sujets incomplètement vaccinés recevront ultérieurement les doses additionnelles en fonction du calendrier vaccinal. En cas de sérothérapie, il est nécessaire d’attendre 3 mois avant d’initier la vaccination.

Populations à risque particulier

Terrain à risque accru d'acquisition

Terrain débilité, hygiène précaire ; non vaccinés, et personnes ayant des titres d'anticorps inférieurs à 0,1 UI/ml (cf. immunité).

Terrain à risque accru de forme grave

Alcooliques, dénutris, personnes en situation de précarité.

Cas particulier de la grossesse
Pas de pathologie spécifique.

Immunité et prévention vaccinale

On considère que l'individu est pleinement protégé pour des taux d'anticorps sériques supérieurs à 0,1 UI/ml. Toutefois, seuls les sujets ayant des taux d'anticorps inférieurs à 0,01 UI/ml sont réellement à risque de diphtérie.

Immunité naturelle

La maladie n’est pas constamment immunisante. Tout patient atteint de diphtérie doit recevoir un schéma de vaccination à 3 doses, initié au plus tard durant la période de convalescence. En cas de sérothérapie, il est nécessaire d’attendre 3 mois avant d’initier la vaccination.

Prévention vaccinale
Vaccin disponible, consultez le Calendrier vaccinal.
Descriptif du vaccin

Le vaccin est constitué d'anatoxine diphtérique rendue immunogène par adjonction d'hydroxyde d'alumine. Les seuls vaccins disponibles en France sont des associations de 2 types : concentration normale en anatoxine pour l'enfant et à faible concentration pour l'adulte car mieux toléré.

Immunité vaccinale

Dans une étude européenne menée dans 18 pays entre 2015 et 2018, la proportion de sérums en dessous du niveau de protection (<0.1 IU/mL) varie entre 22.8–82.0 % selon les pays et de 26 à 42 % en France, selon la tranche d’âge (40-49 ans et 50-59 ans) (10).

La durée de protection a longtemps été estimée à 10 ans ; des études récentes suggèrent une durée de protection d’au moins 20 ans.

Liens utiles